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Vivement l'Ecole!

refugies

La Méditerranée est devenue une «fosse commune» - Najat Vallaud-Belkacem/France Terre d'Asile et François Thomas/SOS Méditerranée

10 Février 2023 , Rédigé par Liberation Publié dans #Refugies

A Bordeaux lors du Climat Libé Tour, François Thomas, président de SOS Méditerranée, et Najat Vallaud-Belkacem, présidente de l’association France Terre d’Asile, ont évoqué la situation dramatique des migrants lors de la traversée.

Transports, alimentation, végétalisation… En 2023, Libé explore la thématique de la transition écologique lors d’une série de rendez-vous inédits. Objectif : trouver des solutions au plus près des territoires. Première étape, Bordeaux, les 4 et 5 février. Un événement auquel se sont associés des étudiants de première année de l’Institut de journalisme Bordeaux Aquitaine.

«C’est un compteur infernal. Hier encore, douze personnes sont décédées en Méditerranée», déplore François Thomas, le président de SOS Méditerranée, à l’occasion de la conférence intitulée «Le défi de la crise migratoire en Méditerranée» samedi à Bordeaux. Il s’agit de drames qui touchent des êtres humains qui nous ressemblent. «La mer Méditerranée est la route migratoire la plus meurtrière du monde, a renchéri à ses côtés Najat Vallaud-Belkacem, présidente de l’association France Terre d’Asile. Depuis 2014, près de 25 000 personnes sont décédées en tentant de traverser la Grande Bleue. «Ce chiffre est certainement très en dessous de la réalité», prévient-elle, «il y a beaucoup de personnes qui disparaissent en mer sans témoin». La Méditerranée n’est donc pas un «cimetière», mais une «fosse commune», ajoute François Thomas. Un constat glacial.

«On se sent complètement démuni en tant qu’ONG», admet l’ancien marin. A qui la faute ? «Le principal responsable de ces drames est l’Union Européenne», dénonce sans hésiter Najat Vallaud-Belkacem. L’ancienne ministre - qui a écrit une chanson sur les exilés intitulée («Lampedusa» écouter ci-dessous) pointe du doigt le manque de solidarité envers l’Italie. En 2013, après le naufrage ayant entraîné le décès de 366 personnes au large de l’île de Lampedusa, l’Italie avait lancé l’opération Mare Nostrum pour secourir en mer les naufragés. «L’Union européenne aurait dû soutenir et continuer cette opération», regrette celle qui était porte-parole du gouvernement français à l’époque. Frontex, l’agence de l’UE composée de gardes-côtes, ne remplit pas cette mission.

Les arrivées de personnes migrantes ont commencé à augmenter de manière importante à partir de 2011 et du Printemps arabe. L’instabilité politique dans des pays nord-africains, comme en Libye après la chute de la dictature, poussent de nombreuses personnes à l’exil. «Plusieurs enquêtes accusent Frontex, la Libye ou encore la Grèce de ‘‘push-back’', c’est-à-dire de renvois illégaux de migrants», appuie Najat Vallaud-Belkacem.

«Désengagement» des Etats

Najat Vallaud-Belkacem dénonce le «désengagement» des Etats qui «multiplient les lois pour empêcher les ONG de travailler en les accusant d’être les complices des passeurs», confirme François Thomas. Le dernier projet de loi immigration, présenté il y a quelques jours en Conseil des ministres, inquiète les associations, dont SOS Méditerranée. En Italie, un récent «décret sécurité» va considérablement faire obstacle aux ONG pour porter secours à des naufragés, en leur assignant des ports de débarquement très éloignés des zones de sauvetage. Et la crise énergétique s’en mêle. «Nos coûts de carburants pour les bateaux humanitaires ont doublé», constate avec effarement François Thomas. «Plus le port de débarquement est loin, plus le temps manque pour retourner en mer et sauver d’autres personnes», s’insurge-t-il. L’Ocean Viking, le navire humanitaire de SOS Méditerranée, a été récemment au cœur d’un bras de fer politique entre l’Italie et la France, les deux pays refusant de faire accoster le bateau.

Sacha, présent dans le public, témoigne. Ses grands-parents habitent près de Toulon où s’est amarré l’Ocean Viking, après vingt jours bloqué en mer, avec plus de 230 rescapés à bord. «J’ai été écœuré par le mépris et la haine des habitants», avoue-t-il. «Comment lutter contre ce rejet ?», demande désabusé le jeune homme aux conférenciers. Najat Vallaud-Belkacem et François Thomas répondent d’une seule voix : il faut «se rencontrer». L’ancienne ministre de l’Education encourage sans surprise l’école à informer sur les migrations. Son plaidoyer résonne d’autant plus qu’elle le prononce ce jour à l’université de Bordeaux.

Tous réfugiés climatiques demain ?

Najat Vallaud-Belkacem interpelle le public : «Qui a vu la série l’Effondrement ?» Une dizaine de mains se lèvent parmi la centaine de personnes présentes. «Je ne veux pas inquiéter les bordelais, mais en 2100, votre ville sera certainement inondée», annonce-t-elle. Silence et frissons dans la salle. Un spectateur brise le silence avec ironie : «Ben oui ! Ce n’est pas par hasard que la ville s’appelle Bordeaux.»

Les Bordelais seront-ils prochainement des réfugiés climatiques ? «Le climat risque d’apporter des problèmes supplémentaires à la question migratoire», explique Najat Vallaud-Belkacem. Fonte des glaces, montée des eaux et désertification, les populations du Sud sont les plus confrontées à ces phénomènes. «Pour le moment, les migrations se font surtout du Sud vers le Sud, mais, à l’avenir, on sera confronté à davantage de migrations du Sud vers le Nord», constate la présidente de France Terre d’Asile. Pourtant, le statut de réfugié climatique n’existe pas dans la législation française et internationale.

«Nous sommes capables d’accueillir dignement tous les migrants. Nous l’avons prouvé avec les Ukrainiens», assure-t-elle. «Pourquoi traite-t-on les réfugiés syriens différemment ?» demande-t-elle au public. Tonnerre d’applaudissements…

par Lucile Coppalle et Isabelle Veloso Vieira, élèves de l'IJBA

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A voir... Le chant des vivants - Documentaire

13 Juin 2022 , Rédigé par France 3 - France Inter Publié dans #Réfugiés

Documentaires en streaming - Regarder les meilleurs documentaires de France  2, France 5 | France tv
 
Réalisé par Cécile Allegra
Survivants de la longue route de l'exil, des réfugiés venus d'Erythrée, du Soudan, de Somalie, de Guinée, de République démocratique du Congo arrivent à Conques, au coeur de l'Aveyron. Là, une association, Limbo, entourée d'habitants accueillants, permet au groupe de se poser un temps. La réalisatrice pose sa caméra dans une bibliothèque, la cuisine d'une maison, un coin d'une ancienne grange. Un à un, les jeunes survivants entament avec elle un échange pour évoquer ce qui les a profondément marqué dans l'exil. A partir de mots notés, ensemble, ils commencent à écrire des chansons. Les neuf mélodies composées à cette occasion redessinent la route de l'exil, disent la douleur traversée et créent de la sorte un grand chant des vivants.
 
A voir en cliquant ci-desssous
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JEUNESSE NAUFRAGÉE - Témoignages sur les parcours de mineurs secourus par l'Aquarius et l'Ocean Viking

15 Décembre 2020 , Rédigé par SOS Méditerranée Publié dans #Jeunesse, #Refugies

JEUNESSE NAUFRAGÉE - Témoignages sur les parcours de mineurs secourus par l'Aquarius et l'Ocean Viking
Mineurs naufragés : un devoir de protection
Près du quart des rescapés secourus par l’Aquarius et l’Ocean Viking, les navires de SOS MEDITERRANEE, sont mineurs, dont la grande majorité voyagent seuls. Ce dossier a pour but de raconter leur histoire, sur la base de leurs propres témoignages.

Télécharger le dossier "Jeunesse naufragée"

"Au début je n’avais pas peur car je ne pouvais rien voir. Mais quand le soleil s’est levé, j’ai été terrifiée de me retrouver au milieu de la mer. J’ai vu les autres pleurer, vomir, prier. Je n’ai pas bougé, je voulais pleurer mais j’avais trop peur de tomber à l’eau. J’étais paralysée par la peur.”

Esther, 17 ans, originaire du Ghana
 

Ils s’appellent James, Esther, Sélim, Souleyman, Yasmine, Magdi, Youssouf, Abdo, Hamid et Yussif. Avant d’être des « migrants », ce sont avant tout des adolescents avec des histoires singulières éprouvantes. Leur âge, leur isolement et les dangers qui jalonnent la route migratoire maritime la plus mortelle au monde en Méditerranée centrale les rendent tout particulièrement vulnérables. 

Les droits humains fondamentaux et les besoins essentiels de ces jeunes - exposés à de multiples exactions durant leur trajet, leur séjour en Libye et la traversée de la Méditerranée - doivent être garantis en toute circonstance : le premier de ces droits est celui de vivre.

Le devoir d’assistance à personne en danger de mort devrait s’imposer sans ambages à terre comme en mer : c’est pourquoi SOS MEDITERRANEE réclame depuis sa création en 2015 que des flottes navales européennes soient mobilisées sans plus attendre pour secourir toutes ces embarcations de fortune perdues en haute mer.

A défaut, des ONG comme SOS MEDITERRANEE continuent de porter assistance aux femmes, aux hommes et aux enfants qui fuient l’enfer libyen au péril de leur vie. La protection de tous les rescapés à bord des navires de SOS MEDITERRANEE demeure une priorité jusqu’au débarquement dans un port sûr, comme le prévoit le droit maritime international. Une attention particulière est portée à ces rescapés mineurs doublement vulnérables.

Outre sa mission de sauvetage et de protection des rescapés, l’association porte également une mission de témoignage tout aussi vitale. Ce dossier rassemble des extraits de dix témoignages de jeunes recueillis entre 2016 et 2020, mettant en lumière le drame qui se déroule en mer aux portes de l’Europe dans l’indifférence quasi générale, afin de donner un visage et une voix à cette jeunesse naufragée.

Illustrations : Hippolyte, reporteur graphique.

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29 décembre 2019... Des migrants se noient tous les jours en Méditerranée...

29 Décembre 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Refugies

Les paysages défilent. Bientôt Paris. Je me souviens...
 
La rentrée scolaire 2015 avait quelques jours. Nous étions le 3 septembre. La photo d’un enfant prénommé Aylan, allongé sur une plage turque dans son t-shirt rouge, allait en quelques minutes faire le tour du monde. Il était mort noyé en Méditerranée. Celle-ci rendait son corps, comme un message. Comme des milliers d’autres messages.
 
La tragédie se poursuit.
 
Elle a lieu loin des caméras tant il est difficile d’envoyer des équipes de journalistes passer des jours et des nuits, en pleine mer, à la recherche de témoignages, d’images, de vérité. Ces femmes, hommes et enfants meurent loin des regards, dans un silence déchirant. L’oubli souvent n’est pas loin. Il rode pour effacer. Dans les sociétés hyperdéveloppées, tout ce qui ne se voit pas n’« existe » pas. Nous - citoyens des sociétés hyperdéveloppées - sommes devenus dépendants de l’image. Celle-ci valide tout. Sans elle, nous ne croyons à rien. Les politiques tels Donald Trump ou Emmanuel Macron l’ont très bien compris. Ne donnons pas à réfléchir; donnons à voir. Saturons l’espace médiatique d’images, d’éléments de langage, de « punch line », ces mots qui ne font sens qu’à condition de percuter les esprits pour « faire image » le plus instantanément possible.
 
La France, dans cette affaire, n’a pas joué le rôle qui doit être le sien. Tous les arguments consistant à freiner, voire à interdire, l’accueil des réfugiés sont irrecevables. Le monde entier, même si aucun pays ne peut se prévaloir d’une innocence d’agneau, a été choqué par l’épisode honteux de l’Aquarius, ce navire affrété par une ONG (Organisation Non Gouvernementale) et que la « Macronie » a tout fait pour éloigner de nos côtes, d’un port d’accueil. Pendant cette période, notre pays s’est rapproché des démocraties populistes.
 
L’« extrême centre » se déportait vers l’« extrême droite ».
 
Je suis un « réfugié ». Privilégié car arrivé en France dans d’excellentes conditions, ni poussé par la guerre, ni la famine ni quelque autre catastrophe. Pourtant, je me souviens que mes premiers pas au lycée en France ne furent pas des plus agréables. Lorsque vint mon tour, parmi les « nouveaux », de dire quel était mon établissement d’origine et que mes camarades entendirent, dans le hall où nous étions rassemblés, « Lycée Lyautey à Casablanca au Maroc », je fus transpercé par des dizaines de regards allant de l’interrogation à l’agressivité. Après l’appel des « nouveaux », il y eut la classe. Par bonheur, étant un littéraire-né, je me suis retrouvé entouré de trente-six filles. J’étais le seul garçon. Belle année initiatique…
 
Néanmoins, il y eut cet épisode. Un jour, ce devait être en décembre de cette année de terminale, en cours d’Education physique et sportive où plusieurs classes se mêlaient, un garçon dont j'ai effacé le prénom, après un désaccord sans importance, me dit: «Tu me fais chier, mec ! Retourne dans ton pays ! » Je souffre encore aujourd’hui en écrivant ces mots.
 
La France, je n’en doute pas, est un pays d’accueil. L’immense majorité des femmes et hommes qui le peuplent sont prêts à ouvrir leur porte et leur cœur. Hélas, il reste, tapi dans l’ombre mais de plus en plus en lumière, un fond de racisme et d’antisémitisme qui n’est ni « primaire », ni encore moins « ordinaire » - qu’est-ce que c’est que ça, le « racisme ordinaire » ? Les « succès » des partis d’extrême droite en Europe sont inquiétants. Les populismes gagnent du terrain. Plus personne ne se cache pour apporter son soutien à tel dirigeant ou telle dirigeante ou de partis ouvertement fascistes.
 
Jamais je n'oublierai le jour où le Président Macron et son gouvernement ont refusé l’accueil, ont refusé l’asile à l’Aquarius, ont refusé de porter secours aux femmes, hommes et enfants qu’il transportait. J’ai ressenti pendant des semaines et je le ressens encore, ce goût amer de tristesse infinie mêlée de rage intérieure qui avait envahi ma gorge le jour où ce « camarade » me demanda de « retourner chez moi ». Qu’il soit rassuré, j’y retournerai.
 
"Réfugiés" …
 
Aylan en quittant sa terre, sa maison, ses jouets, ne savait pas que la mort lui donnait rendez-vous en mer, celle d’Ulysse et des Sirènes. Peut-être, comme les compagnons du navigateur homérique, aurait-il dû trouver un stratagème pour ne pas les entendre, ces sirènes européennes. Elles lui ont tant promis. Naïf enfant, il les a crues. Elles l’ont puni de mort !
 
Que les choses soient claires. La France n’est pas plus ni moins coupable que les autres pays. Mais la France est un pays « particulier ». Il est celui d’Hugo!
 
Entre tant d’autres qui auraient, le poing tendu vers le destin, engagé un duel à mort pour que triomphe la vie, pour que l’emporte l’humanité, pour que ne disparaisse pas Aylan…
 
À la sortie du tunnel de Saint-Cloud, sur la droite, la Tour Eiffel. Paris…
 
Mon amie va bientôt me laisser. La vie, pour nous, continue, mais au moins avons-nous les yeux ouverts et les poings serrés.
 
Christophe Chartreux
 
« Vae Victis » - Mort aux vaincus... Hélas!
 
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France 2019 - Expulsion d'une élève de huit ans!

10 Octobre 2019 , Rédigé par France Bleu Armorique Publié dans #Education, #Refugies

Une centaine de parents d'élèves de l'école du Contour Saint-Aubin à Rennes se sont réuni mercredi 09 octobre à 08h00 pour former une chaîne humaine. Une action symbolique pour montrer leur indignation après l'expulsion en Géorgie d'une élève de huit ans vendredi 4 octobre dernier.

Chacun arrive de son côté, avec des sacs, des cordelettes, des pinces à linge, pour accrocher les dessins des enfants sur les murs de l'école. Une enceinte et un micro sont installés, le café est chaud. Les parents ne font pas qu’emmener leurs enfants à l'école, comme d'habitude, ce mercredi 9 octobre au matin ; ils se mobilisent, solidaires envers Mariam, élève de l'école, âgée de 8 ans, expulsée vendredi 4 octobre vers la Géorgie depuis l’aéroport de Rennes, avec 5 autres familles.

Une mobilisation presque improvisée, mais très émouvante. Une chaîne humaine est formée devant le portail pour défendre cette école qui est devenue pour l'occasion "Zone d'enfance protégée" : "Il faut arrêter les expulsions dans les établissements scolaires "affirme Jean-Paul, un parent d'élèves. "La menace elle est pour les enfants expulsés, mais aussi pour nos enfants qui ne comprennent pas que de telles décisions soient prises".

Elle n'a pas pu dire au revoir à ses copines

L'incompréhension. C'est le mot qui règne chez les parents, mais aussi chez les élèves. Pour exprimer leur émotion, les enfants dessinent, écrivent des messages avec leurs propres mots candides. Des dessins exposés et affichés sur le portail de l'école. On peut y lire : "Tu es ma meilleure amie", "Revient, je t'aime beaucoup". "Comment expliquer à sa fille de huit ans que sa meilleure amie a été emmenée par des policiers, dans un avion, sans dire au revoir à ses copines ?" s'interroge une maman, les larmes aux yeux.

Surtout que la petite fille était très bien intégrée. Elle participait aux fêtes d’anniversaire, aux sorties scolaires. Désormais elle vit en Géorgie dans la peur de la mafia. "Aujourd'hui elle est confinée en Géorgie, sa mère à peur de la scolariser, elle s'est même teinte les cheveux" explique Aveline, une parent-d'élèves qui a régulièrement des nouvelles de Mariam et de ses parents.

Les associations et collectifs de soutien aux sans-papiers se réunissent aussi ce mercredi 09 octobre à 14h00 devant la préfecture Beauregard, en attendant la décision de la  Cour Nationale du Droit d'Asile (CNDA) qui doit statuer sur le cas de la famille de Mariam ce mercredi

Maxime Bossonney, France Bleu Armorique, France Bleu

France 2019 - Expulsion d'une élève de huit ans!
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#immigration - "80% des réfugiés sont accueillis au sud de la Méditerranée, pas au nord"...

8 Octobre 2019 , Rédigé par Europe 1 Publié dans #Refugies

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Changer de regard pour transformer le monde : les réfugiés - Najat Vallaud-Belkacem/Universités d’été de l’économie de demain, septembre 2019

7 Octobre 2019 , Rédigé par Najat Vallaud-Belkacem Publié dans #Refugies

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Classes populaires et migrants, fausse opposition et débat vicié...

25 Septembre 2019 , Rédigé par Liberation Publié dans #Refugies

Résultat de recherche d'images pour "refugies france"

Avec le Président, encore une fois, l’immigration pose «problème». Les difficultés, dans les quartiers populaires, ce ne sont pas les populations venues d’ailleurs, ce sont les conditions de vie et le sentiment de relégation permanent que subissent leurs habitants. Il serait temps de passer aux choses sérieuses et de se donner les moyens de bien les accueillir.

Tribune. Le 16 septembre, s’invitant au pot de rentrée des parlementaires de son camp, Emmanuel Macron a prévenu ses troupes qu’il comptait désormais «regarder en face» le sujet de l’immigration (débattu le 30 septembre à l’Assemblée nationale, le 2 octobre au Sénat). Puis il a ajouté en substance ceci : «Les bourgeois n’ont pas de problèmes avec [elle] : ils ne la croisent pas. Ce sont les classes populaires qui vivent avec.» Textuellement, vivre avec l’immigration, avec des immigrés, serait donc un problème. Les commentaires ont, dans les jours qui ont suivi, souvent fait le lien avec les propos décomplexés de Nicolas Sarkozy. En réalité, ces deux présidents de la République empruntent un sillon largement creusé depuis quarante ans et les premières poussées du Front national aux européennes de 1984. Bien avant eux, Jacques Chirac parlait en juin 1991 du bruit et de l’odeur des immigrés. Aucun de ces trois-là n’a jamais vécu dans un quartier populaire - et quand bien même d’ailleurs, cela n’autorise personne à parler au nom de l’ensemble d’une «classe populaire» fantasmée.

Il se trouve que j’ai grandi, passé toute mon enfance dans des quartiers très populaires, des cités de la banlieue parisienne que l’on qualifiait alors de «cités-dortoirs» ou de «clapiers». Parmi nos voisins, ceux qui étaient français depuis plus de deux générations - comme ma famille, d’origine italienne mais au-delà de mon grand-père - étaient très largement minoritaires. La plupart des habitants des tours et des barres venaient d’Algérie et du Mali. Est-ce que nous vivions cela comme «un problème» ? A vrai dire, je ne m’étais jamais posé la question avant d’entendre des élus en parler. J’étais heureux, nous étions heureux, je crois, de vivre là. Mes parents étaient entrés un peu racistes dans leur première cité HLM, ils ne l’étaient plus en repartant. Ce qui posait «problème», c’étaient les conditions de logement, la mauvaise insonorisation, les volets qui tombaient en panne et que l’office HLM public ne voulait jamais réparer ; c’étaient les conditions de transport qui nous maintenaient loin de la ville et nos parents du travail. Mes copains étaient très logiquement d’origine algérienne, malienne, française. Nous ne nous en rendions pas réellement compte, ou alors au moment des vacances - je les enviais un peu lorsqu’ils partaient au bled, le soir tombé, dans des voitures aux toits chargés. Vivre «avec l’immigration» n’était pas un problème.

Oui mais c’était un autre temps, celui du plein-emploi, des Trente Glorieuses, immigrés et cités n’étaient pas encore un problème. Plus précisément, je pense qu’ils n’étaient pas encore perçus par une partie de la classe politique, et du pays, comme tel. A dire vrai, ils étaient invisibles. Tant qu’ils n’inquiètent pas les centres-villes, les quartiers populaires n’intéressent jamais personne - ce qui parfois rend l’émeute inéluctable, lorsqu’il faut secouer, faire peur, pour être pris en compte.

Plus tard, au milieu des années 90, alors que le chômage de masse était tombé sur ces quartiers, que des émeutes secouaient très régulièrement les cités, je suis retourné vivre dans l’une d’elles parce que j’étais déjà père de famille et encore étudiant, puis jeune journaliste. Le préfet de l’Essonne, département où je commençais à travailler pour Libération, s’est d’ailleurs étonné un jour qu’un journaliste habite dans ce qu’il pensait être l’un des pires quartiers de son département. J’y ai passé, nous y avons passé des années heureuses. J’ai retrouvé avec plaisir la vie particulière, les liens sociaux plus intenses, les solidarités de la cité. Les enfants ont regretté notre départ, comme j’avais regretté quinze ans plus tôt de quitter ma cité.

Tout n’était pas rose pour autant. Pour tout dire, il est souvent plus fatigant de vivre dans une cité qu’à la campagne ou dans un quartier calme de centre-ville. Mais ce ne sont pas les étrangers, les immigrés, l’autre, qui fatiguent. Du moins pas en tant qu’immigrés. Pas plus qu’un jeune Français ne m’a jamais fatigué en tant que jeune Français. Ce qui fatigue dans les cités, c’est le bruit des scooters le soir, lorsqu’ils tournent en boucle, dans des quartiers où tout résonne et où la police entre rarement. Ce qui fatigue, c’est le contrôle social imposé par les réseaux de vente de drogue, ou par tous ceux, virils, qui tiennent le pavé ou les murs. Ce qui fatigue, ce sont les ruptures de charge dans les transports, le manque d’emploi, l’ennui, la malnutrition, le sentiment de relégation. On se trompe toujours de frontière. Ce qui doit faire distinction, c’est la loi. De quel côté se trouve le citoyen, français ou étranger ? Dans la légalité ou dans l’illégalité, qu’il soit natif d’ici ou immigré. Ce n’est pas qu’une question morale de rétablir ainsi ce qui nous distingue les uns des autres, dans les quartiers populaires comme ailleurs. C’est une question très pragmatique aussi. A se tromper de frontière constamment, à confondre, consciemment ou non, immigration et délinquance (ou plus largement tout ce qui pose «problème»), on se prive d’alliés précieux. Ceux qui vivent dans les quartiers populaires sont très majoritairement ceux qui n’ont pas les moyens de vivre ailleurs. Les loyers modérés des cités enclavées, ainsi que les politiques implicites de logement, font que les quartiers les plus populaires sont généralement peuplés d’immigrés - qui majoritairement fatiguent, eux aussi, du bruit, du contrôle social hors-la-loi et de tous les problèmes que l’on voudrait leur faire porter. Continuer d’opposer immigrés et français, au lieu d’opposer hors-la-loi et dans la loi, c’est se priver d’entraîner l’ensemble des citoyens de ce pays, y compris ceux issus de l’immigration, dans la mobilisation nécessaire contre tout ce qui nuit aux conditions d’existence, de vivre ensemble, dans les cités comme ailleurs.

Emmanuel Macron se trompe, comme Jacques Chirac ou Nicolas Sarkozy avant lui, de frontière (je me demande d’ailleurs souvent par quels biais, quels filtres on leur rapporte ce que les habitants des quartiers populaires sont censés penser). Quelles traces leurs propos réitérés laissent-ils dans ces cités, au bout de trente ans ? Comment s’étonner de l’attitude parfois «sécessionniste», selon les mots de Gérard Collomb, ministre de l’Intérieur reparti tenter de conserver sa ville après avoir laissé une loi qui résume assez bien toute son action locale et nationale vis-à-vis des étrangers : leur mener la vie dure, les écœurer pour les dissuader de venir ou de rester. Lorsque je travaillais sur les mécanismes d’émeutes urbaines pour Libération, j’avais souvent le sentiment que le rejet des centres-villes, de ce pays, était une forme d’orgueil du rejeté, cachant parfois un désir profond d’intégration.

Depuis quarante ans (mais cela s’était déjà produit dans le passé, avec d’autres vagues d’immigration, italiennes, polonaises), on monte les citoyens français et immigrés les uns contre les autres. Pratique ancienne qui permet au passage de masquer les abandons des pouvoirs et des services publics, sur ces territoires, dans ces cités. Une démocratie adulte, lucide, soucieuse de continuer de vivre ensemble, sans sécession, sans relégation ni stigmatisations (les unes entretenant soigneusement les autres) devrait enfin passer aux choses sérieuses. Faciliter, travailler sur l’intégration si l’on doit accueillir plus. Se donner les moyens pour cela, et donner des clés à ceux qui arrivent ainsi que l’envie d’appartenir à une communauté, à un destin national éventuellement. En s’y sentant pleinement partie et responsable, et non régulièrement stigmatisé.

Olivier Bertrand journaliste et auteur des «Imprudents» (le Seuil)

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