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Vivement l'Ecole!

litterature

Coup de coeur - Jean-Marie Laclavetine...

3 Avril 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Puissance de la littérature et de la poésie. Tu en connaissais quelque chose, toi qui t’es laissé ensorceler par les féeries de Lorca et de Machado. J’ignore comment tu en es arrivée à la grande littérature espagnole, à quel âge tu as sauté le pas entre Fantômette et Ignacio Sánchez Mejías, mais je sais que les livres ont été pour toi, comme pour moi et pour tant d’autres, un instrument d’exploration, un élixir d’éternité, une barque pour naviguer sur le fleuve qui sépare nos royaumes respectifs. Je ne me souviens pas d’en avoir parlé avec toi. Je ne sais pas ce qui t’a conduit vers eux, comment tu as réalisé leur pouvoir, mais j’imagine qu’il y a eu un moment précis, une révélation. Pour ma part je me souviens parfaitement, tel Aureliano Buendía face au peloton d’exécution dans Cent ans de solitude, de ce lointain après-midi où Alexandre Dumas m’emmena faire connaissance avec la mort. Laisse-moi te le raconter.

 

Étais-tu présente ce jour-là, dans notre appartement de la rue Blaise-Pascal, je ne le sais plus. Je devais avoir douze ou treize ans, c’était avant la Chambre d’Amour, c’est certain, avant la grande vague millésimée 1968.

 

Disons que tu étais là. Souviens-toi, la cuisine est étroite, pour les repas nous nous serrons autour d’une petite table en formica : toi, Bernard, Dominique, moi, les parents. Les repas sont riches, souvent à base de friture, de beignets (d’aubergines, de cervelle, de courgettes, de salsifis, de pommes de terre : le beignet est prêt à tout, il peut absorber l’univers, il résume la vie, brûlant au-dehors et tendre au-dedans, tout habillé d’or et pourtant habitué des cuisines modestes, écœurant à la longue comme la vie quand on en abuse). Chacun de nous a sa spécialité : toi la rébellion spontanée, pendant un temps l’anorexie envisagée comme une arme fatale, moi l’insolence systématique et les facéties ravageuses au point de me faire surnommer Attila, Dominique le petit prince aux cheveux blonds et sa poésie angélique (il aura une période punk, tout de même), Bernard la droiture et la gentillesse mais une obsession balistique qui le conduit à expérimenter jusqu’à ses plus extrêmes limites l’art du jet de boulettes de mie de pain. Au sommet de sa technique il utilise la vitre convexe de la pendule accrochée au mur pour atteindre par ricochet la mise en plis impeccable de Maman, qui finit le repas avec la chevelure constellée comme un sapin de Noël et reste néanmoins impavide et souriante.

 

Jean-Marie Laclavetine - La vie des morts

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Coup de coeur... Patrick Chamoiseau...

2 Avril 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Livre: Le Conteur, la nuit et le panier, Patrick Chamoiseau, Seuil, Cadre  rouge, 9782021417685 - Leslibraires.fr

Cette la-ronde ouverte ici, que j’imagine couronnée de flambeaux, animée de tambours, dansante ainsi que le veut le quadrille, est pour moi l’espace de transmission non d’une ordonnance ou d’une vérité, mais d’une expérience encore en train d’aller, l’onde questionnante d’une pratique d’écriture. Nous ne sommes ni dans l’exposition d’une certitude quant à la littérature ni dans un atelier de recettes narratives, nous sommes dans l’instance d’une circonfession esthétique.

Une écriture créative, une écriture gardée vivante, sup‑ pose un état poétique et un esprit de création mis en œuvre dans une langue (ou dans une configuration particulière de langues). Mais cette démarche, même scrutée de très près, ne révèle rien, et ne peut rien révéler, de cet instant particulier où la création se produit dans la langue.

L’instant-création est un mystère impraticable.

Tomber en état d’écriture est une fréquentation de ce mystère.

Patrick Chamoiseau - Le conteur, la nuit et le panier

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Coup de coeur... Françoise Henry...

1 Avril 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Amazon.fr - Loin du soleil - Henry, Françoise - Livres

Nul doute qu'à cet instant un mot s'est mis à clignoter dans sa tête, même s'il ne s'y est pas attardé - il en avait vu d'autres, dans la campagne environnante : illettré. Petit mot léger et plutôt élégant dans sa sonorité, mais qui porte en lui quelque chose de définitif, de scellé, et qui viendrait se coller à ton front, à tes pas, à ta peau. Et surtout, handicaper ton avenir. Sans faire de remarques, en honnête commerçant, il a choisi avec toi la monture qui correspondait le mieux à tes drôles d'yeux. C'était peut-être le plus important pour toi, la forme des lunettes. Des lunettes rondes, comme celles que tu portes aujourd'hui.

- C'est pas grave si c'est pas des lunettes pour lire, a déclaré Marie-Jo en quittant la boutique. C'est des lunettes pour vivre, voilà tout.

Françoise Henry - Loin du soleil

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Coup de coeur... Pierre Schoendoerffer...

31 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Une voiture de l'Amirauté vient se ranger le long du bord.

Le commandant s'en va. C'est un spectre, mais il se tient très droit. Un peu de sang coule d'une coupure sur sa joue, dilué de pluie. La garde présente les armes. Tous les officiers sont là. Tout l'équipage, les permissionnaires et les autres en tenue de travail. Tous, immobiles, figés. Je ne savais pas que nous l'aimions tant - que nous le respections tant; un respect qui se reconnaît à la pâleur de ceux qui le regardent, aux larmes refoulées quand il nous regarde.

Il ne dira pas un mot. Et c'est très bien ainsi.

Il passe lentement, raide. Il salue la garde. Sa pince noire et luisante tremble un peu.

Sifflet du maître d'équipage.

Le commandant monte sur la coupée et s'arrête, tourné vers la poupe, vers le pavillon. De nouveau il salue d'un geste lent. Longtemps. Mince et droit.

Il franchit la coupée et monte dans la voiture - la portière claque. Il ne s'est pas retourné. Il n'a pas dit un mot.

Pierre Schoendoerffer - Le crabe-tambour

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Coup de coeur... Daniel Defoe...

30 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Il n’y a rien de si absurde, de si extravagant ni de si ridicule, qu’un homme qui a la tête échauffée tout ensemble par le vin et par un mauvais penchant de son désir ; il est possédé à la fois par deux démons, et ne peut pas plus se gouverner par raison qu’un moulin ne saurait moudre sans eau ; le vice foule aux pieds tout ce qui était bon en lui ; oui et ses sens mêmes sont obscurcis par sa propre rage, et il agit en absurde à ses propres yeux : ainsi il continuera de boire, étant déjà ivre ; il ramassera une fille commune, sans se soucier de ce qu’elle est ni demander qui elle est : saine ou pourrie, propre ou sale, laide ou jolie, vieille ou jeune ; si aveuglé qu’il ne saurait distinguer. Un tel homme est pire qu’un lunatique ; poussé par sa tête ridicule, il ne sait pas plus ce qu’il fait que ne le savait mon misérable quand je lui tirai de la poche sa montre et sa bourse d’or.

Ce sont là les hommes dont Salomon dit :

" - Ils marchent comme le bœuf à l’abattoir, jusqu’à ce que le fer leur perce le foie. "

Daniel Defoe - Moll Flanders

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Coup de coeur... Amitav Ghosh...

29 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Le Palais des Miroirs - Amitav Ghosh - Littérature - Livre

C'est ainsi que le pouvoir disparaît : dans un moment de cruel réalisme, entre le déclin d'une autorité illusoire et son remplacement par une autre; à l'instant où un monde, dégagé de son ancrage au rêve, se découvre coincé sur l'étroit sentier de la survie et de l'instinct de conservation.

(...)

Pour Rajkumar et Saya John, la période la plus active de l'année commençait avec les pluies et la crue des rivières. Toutes les deux ou trois semaines, ils chargeaient une cargaison de sacs, de caisses et de cartons sur l'un des bateaux de l'Irrawaddy Steamshipe Flotilla : des bateaux à roues trépidantes, menés le plus souvent par des capitaines écossais avec des équipages composés essentiellement de ces khalasi de Chittagong dont Rajkumar avait autrefois souhaité faire partie.

Amitav Ghosh - Le palais des miroirs

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Coup de coeur... Albert Camus...

28 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Les curieux événements qui font le sujet de cette chronique se sont produits en 194., à Oran. De l'avis général, ils n'y étaient pas à leur place, sortant un peu de l'ordinaire. À première vue, Oran est, en effet, une ville ordinaire et rien de plus qu'une préfecture française de la côte algérienne.

La cité elle-même, on doit l'avouer, est laide. D'aspect tranquille, il faut quelque temps pour apercevoir ce qui la rend différente de tant d'autres villes commerçantes, sous toutes les latitudes. Comment faire imaginer, par exemple, une ville sans pigeons, sans arbres et sans jardins, où l'on ne rencontre ni battements d'ailes ni froissements de feuilles, un lieu neutre pour tout dire ? Le changement des saisons ne s'y lit que dans le ciel. Le printemps s'annonce seulement par la qualité de l'air ou par les corbeilles de fleurs que des petits vendeurs ramènent des banlieues ; c'est un printemps qu'on vend sur les marchés. Pendant l'été, le soleil incendie les maisons trop sèches et couvre les murs d'une cendre grise ; on ne peut plus vivre alors que dans l'ombre des volets clos. En automne, c'est, au contraire, un déluge de boue. Les beaux jours viennent seulement en hiver.

Une manière commode de faire la connaissance d'une ville est de chercher comment on y travaille, comment on y aime et comment on y meurt. Dans notre petite ville, est-ce l'effet du climat, tout cela se fait ensemble, du même air frénétique et absent. C'est-à-dire qu'on s'y ennuie et qu'on s'y applique à prendre des habitudes. Nos concitoyens travaillent beaucoup, mais toujours pour s'enrichir. Ils s'intéressent surtout au commerce et ils s'occupent d'abord, selon leur expression, de faire des affaires. Naturellement ils ont du goût aussi pour les joies simples, ils aiment les femmes, le cinéma et les bains de mer. Mais, très raisonnablement, ils réservent ces plaisirs pour le samedi soir et le dimanche, essayant, les autres jours de la semaine, de gagner beaucoup d'argent. Le soir, lorsqu'ils quittent leurs bureaux, ils se réunissent à heure fixe dans les cafés, ils se promènent sur le même boulevard ou bien ils se mettent à leurs balcons. Les désirs des plus jeunes sont violents et brefs, tandis que les vices des plus âgés ne dépassent pas les associations de boulomanes, les banquets des amicales et les cercles où l'on joue gros jeu sur le hasard des cartes.

Albert Camus - La Peste

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Coup de coeur... Madame de Sévigné...

27 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

 A Paris, lundi 1er décembre (1664)

« Il faut que je vous conte une petite historiette, qui est très vraie et qui vous divertira. Le Roi se mêle depuis peu de faire des vers ; MM. De Saint-Aignan et Dangeau lui apprennent comme il s'y faut prendre. Il fit l'autre jour un petit madrigal, que lui-même ne trouva pas trop joli. Un matin, il dit au maréchal de Gramont : Monsieur le maréchal, je vous prie, lisez ce petit madrigal, et voyez si vous en avez jamais vu un si impertinent. Parce qu'on sait que depuis peu j'aime les vers, on m'en apporte de toutes les façons. » Le maréchal, après avoir lu, dit au Roi : « Sire, Votre Majesté juge divinement bien de toutes choses ; il est vrai que voilà le plus sot et le plus ridicule madrigal que j'aie jamais lu. » Le Roi se mit à rire, et lui dit : « N'est-il pas vrai que celui qui l'a fait est bien fat ? – Sire, il n'y a pas moyen de lui donner un autre nom. – Oh bien ! dit le Roi, je suis ravi que vous m'en ayez parlé si bonnement ; c'est moi qui l'ai fait. – Ah ! Sire, quelle trahison ! Que votre majesté me le rende ; je l'ai lu brusquement. – Non, Monsieur le maréchal ; les premiers sentiments sont toujours les plus naturels. » Le Roi a fort ri de cette folie, et tout le monde trouve que voilà la plus cruelle petite chose que l'on puisse faire à un vieux courtisan. Pour moi, qui aime toujours à faire des réflexions, je voudrais que le Roi en fît là-dessus, et qu'il jugeât par là combien il est loin de connaître jamais la vérité.

Madame de Sévigné - Lettres

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Coup de coeur... Léon Tolstoï

26 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Guerre et Paix (Edition intégrale: les 3 volumes) eBook: Tolstoï, Léon,  Paskévitch, Irène: Amazon.fr

Le Français est sûr de lui parce qu'il a un grand respect de son corps comme de son esprit ; et hommes et femmes possèdent un charme irrésistible qui les rend amusants. L'Anglais est sûr de lui parce qu'il est un citoyen de l'État le mieux organisé du monde, et, en tant qu'Anglais, il sait toujours ce qu'il doit faire, et c'est pourquoi il sait de façon indubitable que tout ce qu'il fait en tant qu'Anglais est si bien. L'Italien est sûr de lui parce qu'il est inquiet et oublie facilement aussi bien sa propre personne que les autres. Le Russe est sûr de lui précisément parce qu'il ne sait rien et ne veut rien savoir. L'Allemand est sûr de lui, de façon pire et plus incontestable que les autres, parce qu'il connaît la vérité, une science qu'il a lui-même inventée, mais qui est pour lui une vérité absolue. Tel était Pfuel, à l'évidence.

Léon Tolstoï - Guerre et Paix

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Coup de coeur... Jean Contrucci...

25 Mars 2021 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

5 avril 1545, en début de soirée

Dehors, la tempête redoublait.

Avril est souvent cruel en Provence. On croit le printemps installé, les arbres se poudrent de fleurs, la campagne enfile sa tunique vert tendre, mais que la chavane ouvre les cataractes du ciel et on a un avant-goût du Déluge. En quelques heures, elle gâte les récoltes et les fruits attendus, gâche des mois de travail acharné et ruine tout espoir d’arracher son pain à la terre avare.

À chaque coup de tonnerre le cœur d’Isabelle s’emballait. Allongée sur sa couche dans la pièce obscure qui lui servait de chambre, au premier étage de la bastide, la jeune fille pelotonnée sous sa couverture de laine grossière fermait les yeux à s’en faire mal. L’éclair, passé par la lucarne à la tête du lit, lui transperçait les paupières de son éclat, précédant de peu le fracas du tonnerre venu des cieux déchaînés.

Comme si le Bon Dieu avait décidé ce soir d’ensevelir les hommes sous les décombres de son paradis.

Cela durait depuis la tombée du jour, sans une seconde de répit. Des hauts du Luberon, décapités par les nuées noires, cascadaient des torrents furibonds venus grossir les flots boueux chargés des bois morts arrachés à ses rives par la Durance, lancée comme une folle vers ses épousailles avec le Rhône.

Perchée sur une butte à l’entrée du vallon de Fenouillet, entre La Roque-d’Anthéron et Valbonnette 1, La Crémade tremblait sur ses fondations. Les vagues de pluie mêlées de grêle crépitaient sur les tuiles rondes de la vieille bastide. Le bruit était assourdissant. Sous les assauts furieux du vent, les poutres faîtières de la charpente craquaient comme les mâtures d’un voilier dans la tempête.

Dans la remise, à droite du bâtiment principal, les bêtes affolées bêlaient, meuglaient, bottaient contre les cloisons de bois de l’étable. Même Boumian – un grand berger de Crau noir et hirsute, capable de briser l’échine du loup quand il rôdait trop près du troupeau  n’en menait pas large, le museau entre les pattes, allongé aux pieds de son maître.

Dans la grande cuisine où fumait une flambée mourante, Martin Jaume, qu’on appelait Le Mestre, avait rallumé les trois chandelles posées sur la table encore encombrée des reliefs du repas. Planté au milieu de la pièce commune, tel un capitaine debout sur le pont balayé par les lames, son visage embroussaillé de poils gris levé vers le plafond, il écoutait gémir sa maison, les sens en alerte, attentif à tous les bruits qui en provenaient.

Dès les premiers signes de la tourmente à venir, le métayer avait quitté sa couche. Il avait remis ses chausses et ses grosses galoches aux semelles cloutées, avait fait trembler de son pas lourd les marches de bois qui menaient au rez-de-chaussée et gagné la vaste salle où se dressait la table familiale, flanquée de ses bancs et de ses coffres à linge ou à vaisselle. Depuis, droit comme un cyprès, il n’avait plus bougé : il 

écoutait la colère divine et tentait d’en déchiffrer la raison. Par sa seule présence, il voulait rassurer tout son monde, bêtes et gens, et même les pierres de la maison sortie de ses grosses mains de paysan. Il montrait à l’orage qu’il ne craignait pas de l’affronter face à face. L’air de dire à chacun : « Tenez bon. Vous ne risquez rien, puisque je suis là. »

Avant de descendre, Jaume avait contemplé Élise, sa femme, agenouillée dans sa longue chemise de nuit. Sans reprendre souffle, elle marmonnait des patenôtres au pied du lit conjugal. Il l’avait rembarrée avec un haussement d’épaule :

—Cesse donc, avec ces bêtises de papiste ! Tu crois que le Bon Dieu ne sait pas ce qu’il fait ? As-tu oublié la promesse de l’Éternel à Moïse devant la Terre promise ? « Je donnerai à votre pays la pluie en son temps et tu recueilleras ton blé. »

Ce rappel ne rassurait pas la malheureuse Élise. Un œuf à la main, consacré le jour de la Sainte-Claire 2 par le curé de Lauris, elle enchaînait en bredouillant ses invocations à la bienheureuse, réputée pour savoir chasser les nuages.

Sainte Claire, éloigne le tonnerre et calme les éclairs, Amen.

Rien à faire : ni le défi du Mestre, ni les invocations de sa femme ne faisaient reculer la pluie. Dieu semblait devenu insensible aux plaintes de Sa créature.

Jean Contrucci - Le printemps des maudits

 

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