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Le ministre de l'Éducation nationale Pap Ndiaye annonce des "grands débats" dans les écoles à la rentrée
En déplacement à Vouneuil-sous-Biard, près de Poitiers, le ministre de l'Éducation nationale Pap NDiaye annonce que dès la rentrée de septembre, des "grands débats" seront organisés dans les établissements scolaires, pour repenser le métier d'enseignant et renforcer les liens avec le périscolaire.
Après le grand débat national lancé à la suite du mouvement des "gilets jaunes" ou encore le Ségur de la santé en pleine crise du Covid-19, voici venus les grands débats dans les écoles. C'est ce qu'annonce, vendredi 10 juin, le ministre de l'Éducation nationale Pap Ndiaye, en déplacement au centre de loisirs de Vouneuil-sous-Biard, près de Poitiers.
Il a notamment rencontré les acteurs du périscolaire, pour évoquer avec eux le dispositif de colos apprenantes, le contrat "C carré" de Vouneuil, la valise maths déployée à Nouaillé-Maupertuis ou encore le dispositif langage de l'école Tony-Lainé, à Poitiers. Le ministre est aussi venu soutenir le député Ensemble (anciennement LREM) de la deuxième circonscription de la Vienne Sacha Houlié, candidat à sa réélection dimanche.
"À partir de septembre ou d'octobre, nous avons pour projet de lancer les grands débats sur l'école", explique Pap Ndiaye. "Non pas de faire un Grenelle de l'éducation, une grand-messe à Paris, mais plutôt au plus près des demandes locales et du terrain, pour imaginer des dispositifs dans l'alliance entre le scolaire et le périscolaire."
Le ministre de l'Éducation nationale se donne comme objectif de "lutter contre les inégalités scolaires et de projeter le monde éducatif dans une nouvelle dynamique, de le sortir d'une forme de morosité liée en partie à la crise sanitaire. Tout cela ne se fera qu'en embarquant le plus de monde possible."
"Je serai un ministre de terrain"
À l'occasion de cette prise de parole, l'une des rares devant la presse depuis sa nomination rue de Grenelle, il a aussi tracé les grandes lignes de son mandat. "Il a pu exister des malentendus avec le personnel éducatif, liés à des questions de délimitation de responsabilité et des questions budgétaires aussi", admet Pap Ndiaye. "Tout cela est à penser, peut-être à changer, y compris dans le cadre de ces grands débats. Ce sera l'occasion, dans chaque école de France, de proposer et d'imaginer ce qui peut être fait à l'échelle des établissements, afin que ces liens parfois distendus puissent être renoués. J'y serai très attentif, je serai d'ailleurs moi-même un ministre de terrain."
Bastien Munch
"La lycéenne qui a interpellé Macron dans le Tarn a reçu la visite des gendarmes" - Au lycée...
«C’est intimidant» : la lycéenne qui a interpellé Macron dans le Tarn a reçu la visite des gendarmes
Laura, 18 ans, avait interpellé jeudi Emmanuel Macron sur ses ministres accusés d’agressions sexuelles. Elle a reçu ce vendredi matin, à son lycée, la visite de deux gendarmes. Selon elle, ils auraient cherché à l’intimider. Ce n’était pas l’« objet » de cette visite, affirme la gendarmerie.
S’adresser à Emmanuel Macron dans la rue peut-il avoir des conséquences ? Laura, 18 ans, a en tout cas reçu ce vendredi la visite de gendarmes à son lycée, moins de 24 heures après avoir interpellé le président de la République au sujet de ses ministres accusés d’agressions sexuelles. Si cet échange n’était pas l’objet de cette « rencontre », assure la gendarmerie de Gaillac (Tarn) au Parisien, ce n’est pas la version de la jeune fille qui réfléchit à une éventuelle suite.
Jeudi, la jeune fille avait interpellé Emmanuel Macron alors qu’il était en déplacement dans le Tarn. La vidéo a depuis été vue des millions de fois. Face au président de la République, Laura dénonce : « Vous mettez à la tête de l’État des hommes qui sont accusés de viol et de violences pour les femmes (les ministres Gérald Darmanin et Damien Abad sont tous les deux accusés, le premier étant le seul faisant l’objet d’une enquête pour laquelle le parquet a requis un non-lieu) , pourquoi ? » Ce à quoi Emmanuel Macron brandit alors la « présomption d’innocence », aucun de ses ministres n’ayant été condamné.
VIDEO. Macron interpellé dans le Tarn sur des ministres accusés de viols
De cet échange, Laura pensait en avoir terminé, jusqu’à la journée de vendredi. « J’étais en cours d’espagnol quand autour de 11h30, la proviseure adjointe est venue me chercher pour parler. À l’extérieur du cours, elle m’a demandé si j’acceptais de parler à des gendarmes », explique Laura au Parisien, ce vendredi soir.
En marge de son échange avec Emmanuel Macron, la veille, la lycéenne avait avoué avoir été victime d’une agression sexuelle dans le RER il y a 4 ans, sans avoir porté plainte. « Ils m’ont demandé si je voulais porter plainte, mais ça a été très bref », explique-t-elle. Et la jeune fille de raconter ensuite un tout autre échange, plus proche selon elle de l’« intimidation » et qualifiant une visite « ambiguë ».
« Aucune infraction » de la part de la lycéenne, confirme la gendarmerie
« On est rapidement venu à l’échange avec Emmanuel Macron. Ils m’ont demandé ce que j’avais voulu faire, alors je leur ai dit que je voulais poser telle question, etc. Puis la gendarme m’a dit : C’était pas à faire. Son collègue a ajouté que si j’avais voulu interpeller le président de la République, alors j’aurais dû passer par des voies hiérarchiques, en écrivant à l’Élysée », assure Laura. Elle a l’impression, raconte-t-elle, que les gendarmes sont ici « à la demande de quelqu’un ».
« Je me suis évidemment demandé si j’avais fait quelque chose de mal, raconte la jeune femme. Évidemment que c’est intimidant de voir les gendarmes débarquer au lycée. » Laura s’étonne aussi : « Ils auraient pu trouver mon adresse finalement plutôt que d’aller au lycée. Il y a deux mois, car j’étais en voyage scolaire pour les élections, j’avais fait ma procuration à la gendarmerie ! »
Contactée avant notre échange avec la jeune fille, la commandante de la gendarmerie de Gaillac Laura Barbuto a assuré que la visite des forces de l’ordre dans l’établissement scolaire ne partait pas d’une mauvaise intention : « On s’inquiétait qu’elle puisse avoir été victime (d’agression sexuelle) et qu’elle n’ait pas pu porter plainte. » L’échange avec Emmanuel Macron n’était pas « l’objet » de cette visite, assure-t-elle. Et la commandante de gendarmerie de signaler, d’ailleurs, qu’il n’y a « aucune infraction » dans l’interpellation d’Emmanuel Macron par la lycéenne.
Laura et ses parents, « offusqués », ont contacté un avocat ce vendredi. Laura réfléchit aux suites qu’elle pourrait donner.
Aubin Laratte
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"C'est intimidant" : la lycéenne qui a interpellé Macron dans le Tarn a reçu la visite des gendarmes
Laura, 18 ans, avait interpellé jeudi Emmanuel Macron sur ses ministres accusés d'agressions sexuelles. Elle a reçu ce vendredi matin, à son lycée, la visite de deux gendarmes. Selon elle, ils...
Moi JEune: ces adolescentes qui en ont «marre de toujours tout faire» à la maison
EXTRAITS
Tâches ménagères, garde des frères et sœurs, corvées administratives… Des adolescentes dénoncent leur quotidien dédié au foyer familial, au détriment de leurs études et de leur jeunesse.
En publiant ces témoignages, Libération poursuit son aventure éditoriale avec la Zone d’expression prioritaire, média participatif qui donne à entendre la parole des jeunes dans toute leur diversité et sur tous les sujets qui les concernent. Ces récits, à découvrir aussi sur Zep.media, dressent un panorama inédit et bien vivant des jeunesses de France. Retrouvez les précédentes publications.
«C’est bon ! Tes amies peuvent attendre» – Mary-Kate, 14 ans, collégienne, Floirac (Gironde)
«Chez moi, tous les jours, je m’occupe du ménage, de la cuisine. Même en ayant trois frères. Ils ont entre 16 et 26 ans, je suis la plus petite de la famille. Et c’est à moi de tout faire ! C’est comme ça depuis quatre ans, depuis que j’ai 10 ans. Cela s’est fait d’un seul coup, dès mon arrivée en France. En Côte d’Ivoire, il y avait des gens qui faisaient le ménage à la maison. Quand je suis arrivée chez mon oncle et ma tante (que j’appelle mes parents), j’ai commencé à le faire pour être polie, sauf qu’au fur et à mesure, je me suis retrouvée à tout faire toute seule.
Pour moi, quel que soit le sexe, on devrait tous être élevés de la même manière. Par exemple, mes frères ont plus le droit de sortir que moi, et plus tard aussi, parce que ce sont des hommes. S’il leur arrive quelque chose, ils pourront plus se défendre que moi. Eux, ils peuvent dormir chez leurs amis. Moi, en quatre ans, je n’ai dormi que deux fois chez les miens. La raison, c’est que je suis une fille et que, d’après mon oncle, je n’en ai pas besoin : je dois rester à la maison.
Parfois, je demande à mon frère de m’aider à faire le ménage. Il me dit oui, mais comme il passe plus de la moitié de sa journée au téléphone avec sa copine, il oublie. Quand je l’explique à ma mère et qu’elle lui demande, il répond : “Mais si, j’ai fait le ménage !“ Sauf qu’il a fait sa vaisselle, celle avec laquelle il a mangé, et c’est tout. Entre-temps, moi j’ai fait toutes les tâches ménagères (aspirateur, serpillière, etc.).
J’en ai marre de toujours tout faire quand je rentre chez moi. Quelle que soit l’heure, je dois constamment faire le ménage. Je balaie, je fais la vaisselle, j’étends le linge, je me douche, je fais mes devoirs, je fais à manger…
Que je sois une fille ou pas, j’ai le droit d’avoir du temps pour moi ! Peut-être que si mes frères m’aidaient dans mon quotidien, je ne serais pas dans cette situation. Et ce serait bien aussi pour eux, pour pouvoir être de meilleurs maris plus tard, sans compter sur leurs femmes.»
«Si on a un souci avec les papiers, c’est toi direct» – Sophia, 18 ans, étudiante, Rennes (Ille-et-Vilaine)
«Déclaration d’impôts, demande de bourse, compte en banque, dossiers d’inscription… C’est moi qui gère tous les papiers de ma famille. Avoir cette responsabilité sur le dos, ce n’est pas simple, parce que l’administration, ça ne rigole pas. Une seule erreur et ça peut être lourd de conséquences. Mon père est marocain et ma mère est italo-marocaine. Chez moi, toute la famille privilégie l’arabe. Ma mère se débrouille bien en français dans la vie de tous les jours mais plus c’est technique, moins c’est facile pour elle.
Ce n’est pas moi l’aînée, j’ai un grand frère. Alors pourquoi c’est moi qui m’occupe de tout ça ? D’autant plus que mon frère est en licence 2 Administration économique et sociale ! Et pourtant c’est moi qui ai rempli son dossier de bourse et d’inscription en catastrophe en août.
On n’a pas de cours à l’école pour nous apprendre tout ça. C’est dommage d’ailleurs, mais ce n’est pas moi qui fais les programmes. Parfois, les documents sont clairs et bien expliqués mais souvent c’est du hiéroglyphe multiplié par dix ! Alors système D oblige, je fais une petite recherche Internet pour apprendre. La CAF, c’est le truc que j’aime le moins faire. Je me débrouille avec des “Comment écrire une lettre de…“ sur Google.
Parfois, quand je pense à tout ça, je me dis qu’il n’y a pas qu’un aspect négatif. Quand je vois des personnes de mon entourage qui sont en galère totale administrativement parlant, je me dis que moi, au moins, je sais faire. Quand mes camarades de classe sont perdus par rapport à leurs dossiers de bourse, ils me demandent de l’aide : “Si on a un souci avec des papiers, c’est toi direct !“ Ça reste gratifiant. Ils ont tous leurs bourses grâce à moi.»
(...)
«Sois une bonne fille» – Mallory, 15 ans, lycéenne, Grande-Synthe (Nord)
«Ma mère est persuadée que je suis naïve, fragile, hyper influençable, une fille facile qui se laisse embarquer dans des plans foireux et qui fait tout ce qu’on lui dit de faire. Elle me connaît très mal. Je suis devenue, par la force des choses, très indépendante, je sais me débrouiller seule. Si seulement ma mère m’accordait de la liberté.
A la maison, je me sens comme exclue par mes parents. Ma mère fait beaucoup de différence entre nous parce que je suis une fille, la fille aînée. Mes frères peuvent sortir alors que je dois plutôt rester enfermée. Je dois effectuer toutes les tâches ménagères : laver la maison, m’occuper du linge, repasser, faire la vaisselle, garder mes deux petits frères et ma petite sœur. J’ai l’impression d’être en prison.
Quand je vais au sport, je dois être accompagnée de mon grand frère, “à cause des gens dehors”. Quand je sors mon chien, j’ai pas le droit de rester plus de vingt minutes dehors, sinon c’est un interrogatoire en rentrant. Ma mère me bombarde de remarques : “Tu foutais quoi !” ; “Il te faut autant de temps pour sortir un chien ?” ; “T’étais où ?” ; “Tu étais avec un mec, c’est sûr !”
Ma mère me répète à longueur de journée : “Sois une bonne fille, Mallory !“ Elle veut dire : ne pas traîner dans la rue, ne pas fumer, ne pas boire, être respectable et respectueuse, bien travailler à l’école, faire de longues études, avoir un bon métier…
Je n’ai pas le droit d’avoir un petit copain. Si j’ai le malheur d’en avoir un, ma mère ne me laisse pas sortir, ni le voir. Et s’il ne lui plaît pas, elle fait tout pour que la relation prenne fin. Elle me fait la misère. Limite c’est elle qui veut choisir mon mec. Ses critères : qu’il habite près de chez nous, qu’il soit «français» comme nous, surtout pas un Arabe ou un musulman. Il doit avoir le même âge que moi, ne pas être un charo, c’est-à-dire ne pas traîner dans la rue avec ses potes.
Elle contrôle toute ma vie. Elle fait ça pour me protéger et parce qu’elle craint le qu’en-dira-t-on. J’habite dans un petit quartier plutôt calme. Mes voisins connaissent ma mère et lui balancent le moindre de mes faits et gestes, quoi que je dise ou fasse. Une fois, on m’a vue avec un mec, elle a pété un câble alors que c’était juste un pote d’école. Les mauvaises langues…
J’en ai marre d’être la gentille Mallory qui la ferme. Résultat, je finis souvent punie : elle me confisque mon téléphone, je dois faire plus de corvées que d’habitude, etc. La double peine. Mes parents sont séparés depuis que j’ai un an et demi. Je vis avec ma mère et mon beau-père. Plus je grandis, plus ma mère m’empêche de voir mon père. Parfois, je n’ai qu’une envie, c’est de me barrer de chez elle et aller chez lui. Chez lui, j’ai le droit de sortir, je me sens libre de faire ce que je veux. Mon père me laisse faire des erreurs, ça m’aide à grandir, à gagner en maturité, à apprendre à ne plus les faire.»
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Moi JEune: ces adolescentes qui en ont "marre de toujours tout faire" à la maison
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Il manque au moins 7 000 chauffeurs de cars scolaires pour la rentrée, alerte la fédération
Le secteur des chauffeurs de cars scolaires connaît une pénurie de candidats, alerte le président de la Fédération nationale des transports de voyageurs, ce mercredi 8 juin 2022. Le métier de chauffeur de car scolaire n’attire plus, déplore la Fédération, qui invite à repenser le métier.
La rentrée risque d’être tendue dans les transports scolaires cette année. Selon la Fédération nationale des transports de voyageurs (FNTV), citée par Franceinfo mercredi 8 juin 2022, il manquera entre 7000 et 8 000 chauffeurs de cars au mois de septembre. Le secteur recrute.
« C’est près de 20 % des enfants qui ne pourront pas être transportés à la rentrée », déplore le président de la FNTV, Jean-Sébastien Barrault, qui lance « un cri d’alarme ». Pour pallier ces manques, la FNTV espère recruter « environ 15 000 conducteurs cette année ».
Il appelle à une réflexion profonde sur la question
Le secteur souffre d’un manque de chauffeurs dans toute la France et « traverse une crise importante » depuis le début de la crise du Covid-19, estime Jean-Sébastien Barrault. Selon lui, les chauffeurs « ont quitté le métier pour aller vers d’autres métiers de la conduite ne souffrant pas de la crise ».
Pour Jean-Sébastien Barrault, le métier est aussi traversé par une crise profonde, liée à la précarité des contrats à temps partiel, avec des plages horaires le matin pour transporter les enfants à l’école et le soir, pour aller les chercher. Il invite les collectivités locales à une réflexion sur la profession pour augmenter le temps de travail et attirer de nouveaux candidats.
Ouest-France
Il manque au moins 7 000 chauffeurs de cars scolaires pour la rentrée, alerte la fédération
Le secteur des chauffeurs de cars scolaires connaît une pénurie de candidats, alerte le président de la Fédération nationale des transports de voyageurs, ce mercredi 8 juin 2022. Le métier de...
Interdisciplinarité - Des jeunes font vivre la mémoire des usines Cosserat
Résumé
C'est un bel exemple de travail de mémoire sur un patrimoine local réalisé par des jeunes : des lycéens en Bac pro et des étudiants en Arts d'Amiens proposent une exposition sur un des fleurons déchus de l'industrie textile : les usines Cosserat.
En savoir plus
Ces usines ont fabriqué pendant plus de 200 ans un velours réputé, avant de fermer définitivement il y a 10 ans. Les jeunes ont rencontré d'anciens salariés, visité les usines aujourd'hui en friche et en partie classées, récupéré des archives publiques et privées. Une façon très concrète de faire de l'histoire qui a relié certains d'entre eux à leur histoire familiale. Julien par exemple, en terminale informatique, qui a travaillé sur le site internet de l'expo.
"Je sais que ma grand-mère a des tantes qui ont travaillé dans cette usine. On en a parlé pas mal, même hier soir ! Elle était contente. Elle m'a dit que ça lui rappelait ses tantes, quand elles lui en parlaient..."
Julien, pas forcément passionné par l'histoire jusque-là, explique que pour travailler sur l'exposition, ils ont dû s'intéresser à l'histoire de ces usines, pour savoir comment ils allaient programmer le site. Un travail dont il assure que lui et ses camarades sont tous très fiers.
L'exposition est répartie en trois salles : une salle "hier", la partie la plus historique, une salle "aujourd'hui", où on trouve par exemple des tenues confectionnées par des élèves en Bac pro de couture avec du velours Cosserat et une salle demain, où les étudiants proposent par exemple un travail photographique sur le geste ouvrier. Des étudiants de la faculté des Arts ont aussi réalisé des bandes dessinées sur l'usine. Parmi eux Jean-Etienne qui a composé une bande dessinée de 8 planches, racontant l'histoire d'une petite fille qui emmène sa grand-mère, qui ne parle plus, à l'usine Cosserat. On découvre que la grand-mère y a travaillé lors de la guerre de 14-18.
"Les hommes étant partis au front, les femmes avaient pris leur place dans l'usine, à cette époque, ce qui a permis un début d'émancipation féminine. La grand-mère retrouve la parole et explique à sa petite fille que toute les valeurs qu'elle lui a transmises viennent de là. C'est une histoire de transmission."
La transmission d'un patrimoine
La transmission est aussi au cœur du documentaire réalisé par les étudiants, projeté dans l'exposition. Sébastien Bausmayer, étudiant en cinéma et réalisateur, a été frappé par l'attachement à cette usine des anciens salariés.
"Cet attachement à un lieu qu'on peut penser froid, une usine, était frappant. Il y a toute une histoire affective. Quand ils ont vu les ruines, l'état de cette usine, il y en a qui ont pleuré. Il y en a qui ont vu des machines démembrées, qui ont vu 30 ans de leur vie en train de partir en poussière..."
Celui qui a lancé cette aventure pédagogique, c'est Louis Teyssedou, professeur de Lettre et d'Histoire en lycée professionnel. Il a imaginé en plein confinement ce travail sur les usines Cosserat qui lui a permis de balayer avec ses élèves tout le programme d'histoire de terminale. Mais il ne se doutait pas que ça le mènerait si loin !
"Je suis tombé un peu par hasard sur Cosserat il y a quelques années et maintenant, je suis pris au piège ! On a écrit un livre, on fait une exposition et puis on avance. Tous les jours, il y a des découvertes."
Ce qu'il n'avais pas prévu c'est que ce travaille donne tant, avec une telle richesse de matière et d'entrées différente qui permette à un nombre grandissant de jeunes ou d'artistes de s'y joindre. Il ne compte donc pas s'arrêter là.
"On va sûrement continuer parce qu'on ne peut pas laisser ça à plat, ou en cours de route. On espère, peut-être, faire un défilé de mode sur le site de l'usine. On est plusieurs à se poser des questions pour voir comment on va travailler l'année prochaine mais on va continuer."
L'expo Cosserat une mémoire pour demain c'est jusqu'au 8 juillet à l'Université Picardie Jules Verne. Les lycéens ont également réalisé un livre et un documentaire sur ces anciennes usines, sur lesquels vous pouvez également consulter cette archive de l'INA.
Lionel Thomson
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Des jeunes font vivre la mémoire des usines Cosserat
C'est un bel exemple de travail de mémoire sur un patrimoine local réalisé par des jeunes : des lycéens en Bac pro et des étudiants en Arts d'Amiens proposent une exposition sur un des fleuron...
« Ce qui me permet de dire je », en pleine injonction identitaire ! - Par Claude Lelièvre
C'est le titre d'un « traité d'ontologie relative » qui n'est pas écrit par un philosophe professionnel qui se croirait obligé aux détours des figures imposées, mais par un agrégé de lettres directeur d'une agence de presse spécialisée dans l'éducation, Pascal Bouchard. Et c'est ce qui en fait le prix en ces temps d'injonctions identitaires.
Pas de figures imposées, mais un parcours de figures libres. Le risque serait la banalité ; mais la singularité des propos force l''attention. C'est d'ailleurs un philosophe professionnel, Denis Kambouchner, qui en a écrit la préface en marquant bien l'originalité et l'intérêt de l'ouvrage qui vient fort à propos en un moment où les injonctions ''identitaires'' se multiplient, s'affrontent, s'efforcent de ''faire la loi''.
D'où l'intérêt très actuel de ce livre à la fois très personnel et très politique au sens non politicien du terme. Quelques titres de chapitres successifs évocateurs. « Qu'ai-je qui me soit propre ? ». « N'ayant rien qui me soit propre, pour pouvoir dire JE, je revendique d'être l'auteur de moi-même » . « Mais suis-je pour autant responsable de moi-même ? » . « Pour passer du JE au Nous, un système de créances est nécessaire ». « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE, impose l'existence d'une morale » . « La nécessité d'un NOUS pour qu'il y ait un JE impose aussi un système de reconnaissance sociale ».. « Mais un JE revendiqué incite à la transgression, à l'abolition du NOUS ou à l'élaboration d'un NOUS factice et mortifère ». « L'Ecole est nécessairement prise entre l'affirmation des JE et l'élaboration d'un NOUS ». « Jusqu'à quel point la culture, le partage du rêve éveillé nous protège-t-il d'un NOUS totalitaire ? »
Et cela se termine par une vingtaine de pages -sérieuses – sur sa « Déclaration de non -candidature à l'élection présidentielle ». Bravo l'artiste ou le funambule aux propos aussi bien d'ordre ''égotiste'' qu'''ontologique'', singuliers et anthropologiques. Finalement très politiques.
Claude Lelièvre
« Ce qui me permet de dire JE. Traité d'ontologie relative » de Pascal Bouchard. Paru en mai 2022 aux éditions EdiSens. 142 pages ; 16 euros.
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" Ce qui me permet de dire je ", en pleine injonction identitaire !
C'est le titre d'un " traité d'ontologie relative " qui n'est pas écrit par un philosophe professionnel qui se croirait obligé aux détours des figures imposées, mais par un agrégé de lettres...
Lycée : Les élèves de seconde vont-ils s’emparer de la nouvelle option maths en 1re ?
Les maths qui avaient disparu du tronc commun au lycée, font leur retour dès la rentrée, mais sous forme d'option
- Emmanuel Macron a annoncé jeudi dernier, lors d’une visite à Marseille, le retour des mathématiques « en option », « non obligatoire », en classe de Première dès la rentrée prochaine.
- Une nouvelle qui tombe tardivement, alors que beaucoup d’élèves de seconde n’ont plus qu’une semaine de cours.
- Certains élèves ayant choisi la spécialité maths en 1re pourraient changer leurs plans et en prendre une autre, en s’inscrivant en option maths en parallèle. Ce qui pose question.
Une nouvelle qui prend les proviseurs et les lycéens de court. Emmanuel Macron a annoncé jeudi, lors d’une visite à Marseille, le retour des mathématiques « en option », « non obligatoire », en classe de 1re dès la rentrée prochaine. « Cet enseignement permettra aux non-spécialistes de consolider l’apprentissage et la maîtrise des notions fondamentales et de poursuivre le cas échéant avec l’option mathématiques complémentaires en terminale », a précisé le ministère de l’Education nationale, dans un communiqué.
Problème : cette information tombe alors que beaucoup de lycéens de seconde ont déjà eu leur conseil de classe et qu’ils ont souvent déjà rendu leur fiche dialogue dans laquelle ils ont déterminé quelles spécialités ils souhaitent prendre en 1re. Or, certains de ceux qui ont choisi la spécialité maths, mais n’ont pas un excellent niveau dans la matière, pourraient être tentés de changer leur fusil d’épaule : « Ils peuvent se dire que l’option maths leur suffira pour la suite et finalement choisir une autre spécialité dans lequel ils sont plus à l’aise », indique Eric Labastre, secrétaire générale de la FCPE.
Difficile de conseiller les élèves…
Certains proviseurs ont déjà envoyé un mail aux élèves afin d’inciter ceux inscrits en spécialité maths (réputée très exigeante) à réviser leur choix. Mais d’autres misent sur la prudence, à l’instar de Christelle Kaufmann, proviseure du lycée Louis Rascol à Albi et membre du SNPDEN : « C’est difficile de leur conseiller d’abandonner la spécialité maths au profit de l’option, car on ne connaît pas encore le programme de cette dernière qui ne sera publié que fin juin. On sait juste qu’elle abordera les statistiques, les probabilités et le traitement des données. On ne voudrait pas qu’ils se retrouvent bloqués par la suite dans le choix de leurs études supérieures ».
Selon Mélanie Guenais, vice-présidente du collectif des sociétés savantes et associations des professeurs et universitaires scientifiques : « Penser que l’option maths suffira pour se diriger vers la gestion, l’économie, les Staps, la filière santé, la psycho, voire même le droit est très risqué. Car dans ces filières, on privilégie davantage sur Parcoursup, les dossiers de candidats qui ont suivi la spécialité maths », indique-t-elle.
Quid de l’option maths complémentaires en Terminale ?
Autre interrogation : si l’option maths peut permettre d’accéder à l’option maths complémentaires en terminale, les élèves auront-ils le niveau pour suivre cette dernière ? Car à l’origine, cette option de terminale est destinée aux élèves qui abandonnent la spécialité maths en fin de 1re mais qui ont tout de même besoin de maîtriser quelques bases de mathématiques pour leur poursuite d’études. « Les élèves qui auront fait 1h30 d’option maths par semaine en 1re vont se retrouver avec des camarades qui en auront suivi 4h par semaine. Les groupes risquent d’être très hétérogènes », souligne Eric Labastre.
« Or, les maths nécessitent une pratique régulière. C’est comme cela qu’on acquiert des automatismes. Donc suivre 1h30 à par semaine dans des groupes qui seront peut-être composés de 40 élèves, cela risque d’être insuffisant pour y parvenir », souligne Mélanie Guenais. « Dans l’idéal, il faudrait que les lycées mettent en place des séances de remise à niveau en terminale pour que les élèves ayant juste suivi l’option maths puissent rattraper leurs camarades. Mais auront-ils les moyens de le faire ? », interroge Christelle Kaufmann.
Tous les lycées pourront-ils proposer l'option ?
Les lycées qui n’ont pas choisi la spécialité maths auront moins de questions à se poser. « Dans mon lycée, ils représentent 30 % des élèves de 1re. J’espère vraiment que beaucoup d’entre eux suivront l’option maths », confie Christelle Kaufmann. « Encore faut-il que l’information passe bien, puisque les élèves de seconde finissent les cours vendredi », ajoute Eric Labastre. « L’enjeu est surtout de savoir si les filles et les lycéens issus de milieux défavorisés inscrits dans d’autres spécialités, voudront suivre cette option. Car la réforme du bac a accru les inégalités en ce qui concerne l’accès aux mathématiques », ajoute Mélanie Guenais.
Last but not least. Reste à savoir si tous les établissements seront en capacité de proposer cet enseignement facultatif. « Il y a une telle pénurie de profs de maths, qu’il va falloir jouer sur les heures supplémentaires que les enseignants pourront prendre », souligne Eric Labastre. « Dans certains lycées, au aura très certainement recours aux contractuels pour assurer toutes les heures », ajoute Christelle Kaufmann.
Delphine Bancaud
La nouvelle option maths en 1re va-t-elle séduire les lycéens ?
Une nouvelle qui prend les proviseurs et les lycéens de court. Emmanuel Macron a annoncé jeudi, lors d'une visite à Marseille, le retour des mathématiques " en option ", " non obligatoire ", en...
Mixité scolaire : que peuvent apporter les cours de récréation « non genrées » ?

Si la mixité scolaire représente un énorme progrès par rapport à une situation antérieure de ségrégation des sexes qui aboutissait à de plus grandes inégalités qu’aujourd’hui, son instauration n’a pas suffi seule à donner les mêmes chances aux filles et aux garçons. De nombreux travaux ont montré qu’il ne suffit pas de décréter la mixité (même si cela est nécessaire) pour que disparaisse la division sexuée des savoirs, des compétences et de l’orientation.
Bousculant les rapports sociaux de sexe, la mixité doit amener à construire un nouveau rapport de force entre les groupes en donnant une place à la coopération entre les filles et les garçons. De cette façon, une rupture avec la dissymétrie des statuts pourrait s’instaurer. Or, on constate aujourd’hui que la mixité scolaire conforte le concept social de domination masculine.
Les filles doivent être discrètes, ne parler qu’à bon escient, demander la parole sans chercher à briller aux dépens des autres ; alors que les garçons se mettent en avant, prennent la parole spontanément, cherchent à attirer l’attention et à « s’affirmer ».
Cela renvoie les filles à une contrainte de féminité qu’implique une position d’infériorité, tout comme les garçons sont renvoyés à une contrainte de virilité et à une position de supériorité et de dominance, pas toujours compatibles avec un rapport positif à l’école, d’où les échecs scolaires. On retrouve dans les travaux publiés, deux portraits stéréotypés des garçons et des filles largement influencés par la socialisation de la famille et par l’école.
Réinventer les dynamiques
« Il y a donc une illusion de croire que les femmes pourront changer leur condition sociale et professionnelle par un simple changement d’orientation scolaire », note Nicole Mosconi, professeure en sciences de l’éducation. C’est l’ensemble des rapports sociaux entre les sexes qu’il faudrait transformer, tant dans le domaine professionnel (avec une réelle mixité des emplois) que dans le domaine familial. On pourrait dire que la mixité socialise également les deux sexes à un égal apprentissage de leurs positions sociales inégales et à travers la transmission des savoirs, s’opère une socialisation différenciée.
Dans son dernier rapport 2022 portant sur les perceptions et vécus de l’égalité chez les jeunes générations, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes souligne une conscience plus aiguë des stéréotypes, des inégalités persistantes et confirme le fait que l’école renforce le plus les comportements sexués en favorisant l’internalisation des normes, à travers notamment les manuels scolaires et les supports pédagogiques qui échouent à fournir une représentation réaliste : seuls 9,8 % des textes présentés ont été rédigés par des femmes.
L’adoption d’un plan national d’orientation professionnelle s’avère nécessaire pour orienter les jeunes filles vers les métiers techniques, du numérique, et d’avenir. Face à ces inégalités, il en résulte que cette génération est en manque d’éducation à la vie relationnelle et se sent désarmée face à différentes violences sexistes et sexuelles. Comment faire ?

L’enjeu social de la mixité se trouve dans la capacité des institutions à se réinventer et dans la capacité des individus à porter un regard neuf. On pourrait inscrire la mixité dans un mouvement permanent et la qualifier de processus innovant dans la mesure où elle détruit les règles sociales de la domination masculine et amène l’école à développer la posture d’adulte émancipateur favorisant la promotion d’interactions sociales constructives, le respect et la considération de la parole de chacun.
En donnant une place à la coopération entre les femmes et les hommes, la mixité ouvre et enrichit les modes de sociabilité, elle défait les positions acquises pour donner un autre sens au monde. La mixité pourrait constituer un espace-temps particulier où peut se jouer, malgré l’asymétrie des statuts, une réciprocité formatrice entre les filles et les garçons. Pour cela, il nous faut mettre en place un travail pédagogique et réorganiser les espaces, notamment celui de la cour de récréation permettant de regarder de quelle façon la mixité peut encourager la création de ce nouvel espace social relationnel dans une dimension d’ouverture et de décloisonnement dans la relation entre les filles et les garçons.
Transformer les pratiques
La cour de récréation en tant qu’espace libre non régulé par les adultes (même s’ils le surveillent), pourrait constituer le lieu idéal pour apprendre à vivre ensemble de façon égalitaire. Mais dans les faits, c’est aussi le lieu où s’exerce la domination masculine. Les jeux bon enfant de maternelle, où fille et garçon s’amusent à se poursuivre, se muent souvent en primaire en jeux de domination physique. Embêter les filles, les bousculer « pour rire » se pratique depuis des décennies. Mais parfois, l’agression à connotation sexuelle n’est pas loin : jupes des filles soulevées, puis au collège, remarques désobligeantes à propos d’un tee-shirt trop court. Le manque de respect vis-à-vis des filles et de leur intimité devient une habitude ; y compris chez les lycéens.
Édith Maruéjoulos, géographe du genre, a observé que bien que la cour de récréation d’une école primaire soit mixte, les relations l’étaient peu. « En général, les garçons ont l’espace central avec le terrain de football, le terrain de basket, ou des jeux qui demandent de l’expression, c’est-à-dire de courir, de prendre de la place… et les filles, sans s’en rendre compte, vont se mettre sur les espaces qu’on leur laisse ».
Avoir moins de place pour jouer, ne pas pouvoir jouer à ce que l’on veut parce qu’on est une fille, ou un garçon pas assez conforme, c’est l’expérience de l’injustice et l’installation d’inégalités durables. Cette inégale répartition de l’espace crée des conflits entre les garçons eux-mêmes. C’est l’espace où il faut être alors quand vous ne pouvez pas y entrer… La cour de récréation est donc un espace hiérarchisé.
Les études de Marie Monnart ont montré ô combien il était important de prendre en compte la dimension géographique des placements et des stratégies de déplacement pour éclairer les implications sociales. Dans cet espace récréatif se joue une occupation hiérarchisée à partir de quelques places choisies. Comprendre le rôle joué par la ressource spatiale dans les processus d’intégration et d’exclusion au sein des groupes de pairs permet d’apprendre aux enfants à partager l’espace dès l’école, à commencer par ce micro-espace public qu’est la cour de récréation et à le considérer comme un espace mixte coopératif.
Suite en 2014, au rapport du commissariat à la prospective et en 2017 à l’étude du Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes, des collectivités locales ont mené des expérimentations sur les cours d’école non genrées. Le travail sur l’égalité filles-garçons dans les cours de récré bénéficie en premier lieu aux filles mais, au-delà, à tous les enfants qui aimeraient jouer aux billes ou lire…
En 2018, la ville de Trappes dans les Yvelines a rénové ses 36 cours en tenant compte des questions liées au genre. En 2020, il semblerait que les choses se soient accélérées, tant la presse s’est fait l’écho d’initiatives pour « dégenrer » les cours, selon le terme utilisé par le maire de Grenoble. Le bitume qui couvrait 5 000 mètres carrés a été partiellement cassé, pour laisser la place à des pelouses, de la prairie, du sable, des graviers, des copeaux de bois, un potager… Il s’est agi de varier la qualité des espaces pour créer des ambiances différentes ; favoriser les pratiques culturelles (des « murs d’expression ») ; prévoir des sièges pour les lecteurs… En mettant sans cesse la mixité en valeur, des idées ont été proposées telles que des récréations sans ballons avec des jeux de société, coopératifs (kapla, yo-yo) et aussi des jeux sans technicité.
Travailler sur l’égalité nécessite d’accompagner la transformation des pratiques en s’intégrant dans une réflexion plus globale sur la mixité. Cela passe par une démarche collective associant élèves et adultes, que cela soit en classe par le travail de l’équipe enseignante sur l’égalité filles-garçons (littérature jeunesse, débats…) mais aussi dans les cours de récréation. Il est incohérent de laisser les garçons faire ce qu’ils veulent dans la cour, et une fois qu’ils sont en classe, de leur imposer des règles. L’implication de tous les acteurs autour du projet d’école est indispensable ainsi que la restructuration de l’espace et un accompagnement formatif sur les stéréotypes sexistes et les représentations partagées de l’égalité.
Christine Gautier Chovelon, Enseignante chercheure en sciences de l'éducation et de la formation - Affiliée au laboratoire de recherche LINE, Université Côte d’Azur
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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Mixité scolaire : que peuvent apporter les cours de récréation " non genrées " ?
Si la mixité scolaire représente un énorme progrès par rapport à une situation antérieure de ségrégation des sexes qui aboutissait à de plus grandes inégalités qu'aujourd'hui, son instau...
Orthographe : la dictée ne suffit pas à évaluer le niveau des élèves
« C’est une hécatombe », « c’est innommable », « je m’insurge », « ça m’attriste », « c’est épouvantable », « c’est une désolation », « c’est abominable ». Mais de quel « fléau » les personnes interrogées par Agnès Millet, Vincent Lucci et Jacqueline Billiez dans les années 1990 se plaignaient-elles donc par ces mots ? L’orthographe. Dans leur enquête, les trois chercheurs ont prêté l’oreille aux discours tenus à ce sujet par des utilisateurs ordinaires, enseignants, secrétaires, professionnels du livre, et des élèves du CM2 à la terminale.
Les fautes, la baisse du niveau, les réformes, autant de sujets sensibles en France et, selon les conclusions de l’enquête, de débats passionnels. La presse les affectionne, et chacun se situe dans une relation complexe, faite d’attachement et d’agacement, de certitudes et d’insécurité. Internet fourmille de trucs, astuces, conseils, outils et techniques pour améliorer son niveau et les applis se multiplient. Apprendre des listes de mots ? Faire des dictées sans relâche ? Connaître les règles ? Les solutions exigent d’abord de cerner le problème.
L’étude de Danièle Manesse et Danièle Cogis, publiée dans les années 2000, a conforté l’idée que le niveau baisse : menée auprès de quelques 3000 élèves de CM2, elle relève que
« l’écart entre les résultats des élèves de 1987 et ceux de 2005 est en moyenne de deux niveaux scolaires. Les élèves de cinquième de 2005 font le même nombre de fautes que les élèves de CM2 il y a vingt ans. Les élèves de troisième de 2005, le même nombre d’erreurs que les élèves de cinquième de 1987 ».
En 1987, 50 % des élèves faisaient moins de six fautes. Ils ne sont plus que 22 % en 2005. Le même texte d’une dizaine de lignes a de nouveau été dicté à des élèves de CM2 en 2015. Les élèves ont fait en moyenne 17,8 erreurs en 2015, contre 14,3 en 2007 et 10,6 en 1987. La baisse du niveau se répartit de manière large et ne concerne pas seulement certains élèves ; l’écart entre les plus forts et les plus faibles s’est creusé lui aussi. C’est l’orthographe grammaticale qui est principalement en jeu : entre sujet et verbe, par exemple pour le -nt, à la 3e personne du pluriel, les marques de nombre sur le nom et l’adjectif, le participe passé.
Complexité grammaticale
Les difficultés orthographiques perdurent jusqu’à un niveau avancé et deux types de facteurs explicatifs se dégagent : la complexité intrinsèque du système orthographique du français et l’enseignement de ce système. L’orthographe du français est une des moins transparentes. Notre écriture est alphabétique, c’est-à-dire qu’elle code du son, mais elle est loin de fonctionner sur le principe d’une lettre pour un son et d’un son pour une lettre.

À cet égard, l’orthographe de l’anglais est plus complexe encore (par exemple, le son [i] peut s’écrire de plusieurs manières et les lettres ough se prononcent différemment selon les mots). Elle est plus simple sur les marques grammaticales (genre, nombre, personne verbale…), peu fréquentes en anglais et souvent audibles. En français, les difficultés se concentrent sur les lettres muettes, notamment les finales : il chante et ils chantent se prononcent de manière identique, mais à l’écrit on a un double marquage du pluriel, sur le pronom personnel il et sur la finale verbale. Mangez pourrait s’écrire mengez, manjez, mangé, manger, etc., ce serait correct au niveau phonétique, mais pas au niveau orthographique.
L’orthographe du français demande des compétences grammaticales pointues, ces règles qu’on sait parfois réciter sans pour autant y avoir recours : « le participe passé conjugué avec l’auxiliaire avoir s’accorde avec le complément d’objet direct (COD) quand il est placé avant le verbe ». Même à l’oral, dans les contextes où cet accord serait audible, il est fréquent qu’il ne soit pas réalisé. Exemple : « La tête qu’il a fait ! » et non « La tête qu’il a faite ». Et c’est le cas y compris chez des locuteurs qui contrôlent leur parole, à la radio ou en conférence.
La dictée est une manière d’évaluer où en sont les élèves, mais le problème suivant se pose : les compétences testées dans la dictée correspondent-elles aux compétences orthographiques réellement mobilisées lorsqu’on produit un texte ? Savoir orthographier est un savoir procédural, c’est-à-dire que les savoirs déclaratifs (ou théoriques) jouent un rôle, mais ne suffisent pas. D’autant que les élèves intériorisent des pseudo-règles à la source d’erreurs : il faut un e au féminin donc j’ai jouée « ée », car je suis une fille.
Productions d’élèves
Pour étudier les compétences orthographiques dans des situations réelles de production écrite, il importe donc de partir de textes rédigés par les élèves plutôt que de dictées. C’est dans cet esprit qu’a été constitué le corpus qui sert de base au projet ANR E-Calm. En comparant plusieurs versions des textes des élèves, on peut voir aussi ce qu’ils sont amenés à corriger, ou ce sur quoi de nouvelles erreurs interviennent.
Enfin, ce corpus s’assortit d’entretiens avec les scripteurs autour de leurs textes afin de mieux cerner comment ils procèdent, une question décisive étant celle du contrôle exercé en cours de production : soit le scripteur fait face à une gestion difficile du processus d’écriture mais pourrait réussir à identifier et corriger une erreur, soit il ne parvient pas à en faire l’analyse.
Une autre question importante est de savoir quelles zones de l’orthographe le texte de la dictée permet de tester. En général, le niveau de difficulté reste largement intuitif (longueur du texte, mots jugés difficiles, etc.). Les concours de dictée cumulent les subtilités (un lexique rare, des temps verbaux peu usités). À l’école, on comptabilise les points en moins, mais sur quoi, au juste ? On rassemble, pêle-mêle, des problèmes de doubles lettres, d’accords, de conjugaisons, etc.
Une dictée finit souvent par tester l’orthographe en général et non des problèmes bien ciblés, sélectionnés par rapport au niveau des élèves et par rapport aux caractéristiques de la langue écrite. Les chercheurs en didactique de l’orthographe montrent l’importance d’identifier des compétences exigibles, c’est-à-dire les besoins effectifs des scripteurs et ce qu’il faut attendre d’eux dans le cadre d’un apprentissage progressif, étape par étape.
Objectifs ciblés
Pour enseigner l’orthographe de manière efficace, l’idée défendue aujourd’hui est donc de cibler les objectifs, de travailler les procédures et l’explicitation du raisonnement qui permet de mener à bien ces procédures. Plutôt que « il faut accorder en genre et en nombre », on travaille de manière distincte le marquage du nombre dans le groupe nominal (déterminant, nom, adjectif) et on aborde à part le marquage du genre (beaucoup d’adjectifs ne varient pas en genre).

On observe des énoncés pour inférer comment ça fonctionne, on écrit au quotidien en discutant des choix effectués pour mettre en évidence comment on s’y prend. C’est le cas du dispositif Twictée, qui permet de travailler selon ces principes : les élèves coopèrent et négocient leurs choix orthographiques à travers des messages à rédiger, tout en se familiarisant aux codes des réseaux sociaux.
L’apprentissage de l’orthographe est long et le reconnaître est important pour permettre aux élèves de s’approprier cette compétence plutôt que de cultiver le sentiment que leur propre langue leur échappera toujours. Actuellement, les universités mettent en place des formations à l’écriture, sous l’impulsion notamment du projet ANR UOH Ecri+. D’abord, il faut rappeler que l’orthographe ne suffit pas et que produire des textes maîtrisés, c’est savoir gérer leur cohérence, écrire à partir de sources, argumenter.
Concernant l’orthographe, il faut s’interroger sur les dispositifs en usage : est-il pertinent de reproduire ce qui a été fait auparavant sous prétexte que – mais aussi alors que – ça n’a pas fonctionné ? La réflexion doit se porter sur ce dont on a réellement et prioritairement besoin pour écrire correctement, et sur la manière dont les scripteurs s’y prennent quand ils sont en situation d’écrire.
Fanny Rinck, Maîtresse de conférences en Sciences du langage, Université Grenoble Alpes (UGA)
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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Comment le lycée participe à « l’impression d’incompétence » des filles en informatique
EXTRAITS
Dans l’étude « Les freins à l’accès des filles aux filières informatiques et numériques », le centre pour l’égalité femmes-hommes Hubertine-Auclert souligne le rôle du lycée dans la production des stéréotypes de genre.
Le lycée « n’est pas un espace neutre », il « produit des inégalités entre les filles et les garçons, notamment sur l’orientation ». C’est la conclusion de l’étude « Les freins à l’accès des filles aux filières informatiques et numériques » menée par le centre Hubertine-Auclert. Ce centre francilien pour l’égalité femmes-hommes, associé à la région Ile-de-France, a mené pendant trois ans une enquête de terrain auprès de cinq lycées franciliens et y a réalisé plus de trois cents entretiens auprès d’élèves, de la seconde à la terminale.
L’enquête a plus particulièrement suivi celles et ceux qui ont choisi l’option « informatique et création numérique » en seconde et l’enseignement de spécialité « numérique et sciences informatiques » (NSI) en première et en terminale. Un enseignement qui compte 82 % de garçons. « L’informatique reflète ce qui se passe pour toutes les filières scientifiques. Elle agit comme une lentille grossissante révélant des inégalités de genre en matière d’orientation », note Amandine Berton-Schmitt, directrice du centre Hubertine-Auclert, alors que les débats sur la place des mathématiques au lycée – et le nombre de filles dans cette discipline – ont créé la polémique ces derniers mois.
Premier constat : depuis vingt ans, les choix d’orientation n’ont guère évolué. Bien que les élèves « adhèrent massivement à un discours défendant l’égalité entre les filles et les garçons », ils demeurent marqués par des représentations genrées des métiers qu’ils remettent peu en cause. « L’accompagnement à l’orientation effectué par le lycée ne va pas modifier des choix perçus comme naturels », remarque Gaëlle Perrin, chargée de mission éducation à l’égalité au centre Hubertine-Auclert. Les élèves qui développent des projets d’orientation en décalage avec des choix « traditionnels » relèvent de l’exception.
Seulement 2,5 % des filles contre 15 % des garçons s’orientent ainsi en fin de seconde vers l’enseignement de spécialité NSI. Pourtant, si les filles sont sous-représentées dans ces filières, elles expriment les mêmes raisons que les garçons pour y accéder, comme la pratique des jeux vidéo ou la présence dans leur entourage de figures initiatrices.
(...)
« Parce qu’elles ne sont pas suffisamment outillées ni pour percevoir les dynamiques genrées dans les classes ni pour penser des actions en faveur de l’égalité filles-garçons, les équipes éducatives ne peuvent pas enrayer la production de ces inégalités, voire participent à les renforcer », affirment les auteurs de l’étude, alors même que l’égalité entre les filles et les garçons fait partie des priorités de l’éducation nationale. Parmi les recommandations avancées par le centre Hubertine-Auclert pour remédier à ces phénomènes, la formation des enseignants, et de leur hiérarchie, fait partie des éléments-clés. Pour Amandine Berton-Schmitt, « il faut permettre à tous les personnels de l’éducation nationale d’intégrer davantage cette grille de lecture ».
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