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Vivement l'Ecole!

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Lycée : Les élèves de seconde vont-ils s’emparer de la nouvelle option maths en 1re ?

8 Juin 2022 , Rédigé par 20 Minutes Publié dans #Education, #Mathématiques

Lycée : Les élèves de seconde vont-ils s’emparer de la nouvelle option maths en 1re ?

Les maths qui avaient disparu du tronc commun au lycée, font leur retour dès la rentrée, mais sous forme d'option

- Emmanuel Macron a annoncé jeudi dernier, lors d’une visite à Marseille, le retour des mathématiques « en option », « non obligatoire », en classe de Première dès la rentrée prochaine.

- Une nouvelle qui tombe tardivement, alors que beaucoup d’élèves de seconde n’ont plus qu’une semaine de cours.

- Certains élèves ayant choisi la spécialité maths en 1re pourraient changer leurs plans et en prendre une autre, en s’inscrivant en option maths en parallèle. Ce qui pose question.

Une nouvelle qui prend les proviseurs et les lycéens de court. Emmanuel Macron a annoncé jeudi, lors d’une visite à Marseille, le retour des mathématiques « en option », « non obligatoire », en classe de 1re dès la rentrée prochaine. « Cet enseignement permettra aux non-spécialistes de consolider l’apprentissage et la maîtrise des notions fondamentales et de poursuivre le cas échéant avec l’option mathématiques complémentaires en terminale », a précisé le ministère de l’Education nationale, dans un communiqué.

Problème : cette information tombe alors que beaucoup de lycéens de seconde ont déjà eu leur conseil de classe et qu’ils ont souvent déjà rendu leur fiche dialogue dans laquelle ils ont déterminé quelles spécialités ils souhaitent prendre en 1re. Or, certains de ceux qui ont choisi la spécialité maths, mais n’ont pas un excellent niveau dans la matière, pourraient être tentés de changer leur fusil d’épaule : « Ils peuvent se dire que l’option maths leur suffira pour la suite et finalement choisir une autre spécialité dans lequel ils sont plus à l’aise », indique Eric Labastre, secrétaire générale de la FCPE.

Difficile de conseiller les élèves…

Certains proviseurs ont déjà envoyé un mail aux élèves afin d’inciter ceux inscrits en spécialité maths (réputée très exigeante) à réviser leur choix. Mais d’autres misent sur la prudence, à l’instar de Christelle Kaufmann, proviseure du lycée Louis Rascol à Albi et membre du SNPDEN : « C’est difficile de leur conseiller d’abandonner la spécialité maths au profit de l’option, car on ne connaît pas encore le programme de cette dernière qui ne sera publié que fin juin. On sait juste qu’elle abordera les statistiques, les probabilités et le traitement des données. On ne voudrait pas qu’ils se retrouvent bloqués par la suite dans le choix de leurs études supérieures ».

Selon Mélanie Guenais, vice-présidente du collectif des sociétés savantes et associations des professeurs et universitaires scientifiques : « Penser que l’option maths suffira pour se diriger vers la gestion, l’économie, les Staps, la filière santé, la psycho, voire même le droit est très risqué. Car dans ces filières, on privilégie davantage sur Parcoursup, les dossiers de candidats qui ont suivi la spécialité maths », indique-t-elle.

Quid de l’option maths complémentaires en Terminale ?

Autre interrogation : si l’option maths peut permettre d’accéder à l’option maths complémentaires en terminale, les élèves auront-ils le niveau pour suivre cette dernière ? Car à l’origine, cette option de terminale est destinée aux élèves qui abandonnent la spécialité maths en fin de 1re mais qui ont tout de même besoin de maîtriser quelques bases de mathématiques pour leur poursuite d’études. « Les élèves qui auront fait 1h30 d’option maths par semaine en 1re vont se retrouver avec des camarades qui en auront suivi 4h par semaine. Les groupes risquent d’être très hétérogènes », souligne Eric Labastre.

« Or, les maths nécessitent une pratique régulière. C’est comme cela qu’on acquiert des automatismes. Donc suivre 1h30 à par semaine dans des groupes qui seront peut-être composés de 40 élèves, cela risque d’être insuffisant pour y parvenir », souligne Mélanie Guenais. « Dans l’idéal, il faudrait que les lycées mettent en place des séances de remise à niveau en terminale pour que les élèves ayant juste suivi l’option maths puissent rattraper leurs camarades. Mais auront-ils les moyens de le faire ? », interroge Christelle Kaufmann.

Tous les lycées pourront-ils proposer l'option ?

Les lycées qui n’ont pas choisi la spécialité maths auront moins de questions à se poser. « Dans mon lycée, ils représentent 30 % des élèves de 1re. J’espère vraiment que beaucoup d’entre eux suivront l’option maths », confie Christelle Kaufmann. « Encore faut-il que l’information passe bien, puisque les élèves de seconde finissent les cours vendredi », ajoute Eric Labastre. « L’enjeu est surtout de savoir si les filles et les lycéens issus de milieux défavorisés inscrits dans d’autres spécialités, voudront suivre cette option. Car la réforme du bac a accru les inégalités en ce qui concerne l’accès aux mathématiques », ajoute Mélanie Guenais.

Last but not least. Reste à savoir si tous les établissements seront en capacité de proposer cet enseignement facultatif. « Il y a une telle pénurie de profs de maths, qu’il va falloir jouer sur les heures supplémentaires que les enseignants pourront prendre », souligne Eric Labastre. « Dans certains lycées, au aura très certainement recours aux contractuels pour assurer toutes les heures », ajoute Christelle Kaufmann.

Delphine Bancaud

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Mixité scolaire : que peuvent apporter les cours de récréation « non genrées » ?

8 Juin 2022 , Rédigé par The Conversation Publié dans #Education

Mixité scolaire : que peuvent apporter les cours de récréation « non genrées » ?
Mixité scolaire : que peuvent apporter les cours de récréation « non genrées » ?
La cour de récréation en tant qu'espace libre non régulé par les adultes (même s'ils le surveillent), pourrait constituer le lieu idéal pour apprendre à vivre ensemble de façon égalitaire. Shutterstock
Christine Gautier Chovelon, Université Côte d’Azur

Si la mixité scolaire représente un énorme progrès par rapport à une situation antérieure de ségrégation des sexes qui aboutissait à de plus grandes inégalités qu’aujourd’hui, son instauration n’a pas suffi seule à donner les mêmes chances aux filles et aux garçons. De nombreux travaux ont montré qu’il ne suffit pas de décréter la mixité (même si cela est nécessaire) pour que disparaisse la division sexuée des savoirs, des compétences et de l’orientation.

Bousculant les rapports sociaux de sexe, la mixité doit amener à construire un nouveau rapport de force entre les groupes en donnant une place à la coopération entre les filles et les garçons. De cette façon, une rupture avec la dissymétrie des statuts pourrait s’instaurer. Or, on constate aujourd’hui que la mixité scolaire conforte le concept social de domination masculine.

Les filles doivent être discrètes, ne parler qu’à bon escient, demander la parole sans chercher à briller aux dépens des autres ; alors que les garçons se mettent en avant, prennent la parole spontanément, cherchent à attirer l’attention et à « s’affirmer ».

Cela renvoie les filles à une contrainte de féminité qu’implique une position d’infériorité, tout comme les garçons sont renvoyés à une contrainte de virilité et à une position de supériorité et de dominance, pas toujours compatibles avec un rapport positif à l’école, d’où les échecs scolaires. On retrouve dans les travaux publiés, deux portraits stéréotypés des garçons et des filles largement influencés par la socialisation de la famille et par l’école.

Réinventer les dynamiques

« Il y a donc une illusion de croire que les femmes pourront changer leur condition sociale et professionnelle par un simple changement d’orientation scolaire », note Nicole Mosconi, professeure en sciences de l’éducation. C’est l’ensemble des rapports sociaux entre les sexes qu’il faudrait transformer, tant dans le domaine professionnel (avec une réelle mixité des emplois) que dans le domaine familial. On pourrait dire que la mixité socialise également les deux sexes à un égal apprentissage de leurs positions sociales inégales et à travers la transmission des savoirs, s’opère une socialisation différenciée.

Dans son dernier rapport 2022 portant sur les perceptions et vécus de l’égalité chez les jeunes générations, le Haut conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes souligne une conscience plus aiguë des stéréotypes, des inégalités persistantes et confirme le fait que l’école renforce le plus les comportements sexués en favorisant l’internalisation des normes, à travers notamment les manuels scolaires et les supports pédagogiques qui échouent à fournir une représentation réaliste : seuls 9,8 % des textes présentés ont été rédigés par des femmes.

L’adoption d’un plan national d’orientation professionnelle s’avère nécessaire pour orienter les jeunes filles vers les métiers techniques, du numérique, et d’avenir. Face à ces inégalités, il en résulte que cette génération est en manque d’éducation à la vie relationnelle et se sent désarmée face à différentes violences sexistes et sexuelles. Comment faire ?

Plus nombreuses que les hommes dans l’enseignement supérieur, les femmes sont moins nombreuses à choisir les sciences. Image by mohamed Hassan /Pixabay, CC BY

L’enjeu social de la mixité se trouve dans la capacité des institutions à se réinventer et dans la capacité des individus à porter un regard neuf. On pourrait inscrire la mixité dans un mouvement permanent et la qualifier de processus innovant dans la mesure où elle détruit les règles sociales de la domination masculine et amène l’école à développer la posture d’adulte émancipateur favorisant la promotion d’interactions sociales constructives, le respect et la considération de la parole de chacun.

En donnant une place à la coopération entre les femmes et les hommes, la mixité ouvre et enrichit les modes de sociabilité, elle défait les positions acquises pour donner un autre sens au monde. La mixité pourrait constituer un espace-temps particulier où peut se jouer, malgré l’asymétrie des statuts, une réciprocité formatrice entre les filles et les garçons. Pour cela, il nous faut mettre en place un travail pédagogique et réorganiser les espaces, notamment celui de la cour de récréation permettant de regarder de quelle façon la mixité peut encourager la création de ce nouvel espace social relationnel dans une dimension d’ouverture et de décloisonnement dans la relation entre les filles et les garçons.

Transformer les pratiques

La cour de récréation en tant qu’espace libre non régulé par les adultes (même s’ils le surveillent), pourrait constituer le lieu idéal pour apprendre à vivre ensemble de façon égalitaire. Mais dans les faits, c’est aussi le lieu où s’exerce la domination masculine. Les jeux bon enfant de maternelle, où fille et garçon s’amusent à se poursuivre, se muent souvent en primaire en jeux de domination physique. Embêter les filles, les bousculer « pour rire » se pratique depuis des décennies. Mais parfois, l’agression à connotation sexuelle n’est pas loin : jupes des filles soulevées, puis au collège, remarques désobligeantes à propos d’un tee-shirt trop court. Le manque de respect vis-à-vis des filles et de leur intimité devient une habitude ; y compris chez les lycéens.

Édith Maruéjoulos, géographe du genre, a observé que bien que la cour de récréation d’une école primaire soit mixte, les relations l’étaient peu. « En général, les garçons ont l’espace central avec le terrain de football, le terrain de basket, ou des jeux qui demandent de l’expression, c’est-à-dire de courir, de prendre de la place… et les filles, sans s’en rendre compte, vont se mettre sur les espaces qu’on leur laisse ».

La récré : mixité dans la cour de récréation (Le blob, l’extra-média, 2018).

Avoir moins de place pour jouer, ne pas pouvoir jouer à ce que l’on veut parce qu’on est une fille, ou un garçon pas assez conforme, c’est l’expérience de l’injustice et l’installation d’inégalités durables. Cette inégale répartition de l’espace crée des conflits entre les garçons eux-mêmes. C’est l’espace où il faut être alors quand vous ne pouvez pas y entrer… La cour de récréation est donc un espace hiérarchisé.

Les études de Marie Monnart ont montré ô combien il était important de prendre en compte la dimension géographique des placements et des stratégies de déplacement pour éclairer les implications sociales. Dans cet espace récréatif se joue une occupation hiérarchisée à partir de quelques places choisies. Comprendre le rôle joué par la ressource spatiale dans les processus d’intégration et d’exclusion au sein des groupes de pairs permet d’apprendre aux enfants à partager l’espace dès l’école, à commencer par ce micro-espace public qu’est la cour de récréation et à le considérer comme un espace mixte coopératif.

Suite en 2014, au rapport du commissariat à la prospective et en 2017 à l’étude du Haut conseil à l’égalité entre les hommes et les femmes, des collectivités locales ont mené des expérimentations sur les cours d’école non genrées. Le travail sur l’égalité filles-garçons dans les cours de récré bénéficie en premier lieu aux filles mais, au-delà, à tous les enfants qui aimeraient jouer aux billes ou lire…

Agen : la géographie du genre, qu’est-ce que c’est ?

En 2018, la ville de Trappes dans les Yvelines a rénové ses 36 cours en tenant compte des questions liées au genre. En 2020, il semblerait que les choses se soient accélérées, tant la presse s’est fait l’écho d’initiatives pour « dégenrer » les cours, selon le terme utilisé par le maire de Grenoble. Le bitume qui couvrait 5 000 mètres carrés a été partiellement cassé, pour laisser la place à des pelouses, de la prairie, du sable, des graviers, des copeaux de bois, un potager… Il s’est agi de varier la qualité des espaces pour créer des ambiances différentes ; favoriser les pratiques culturelles (des « murs d’expression ») ; prévoir des sièges pour les lecteurs… En mettant sans cesse la mixité en valeur, des idées ont été proposées telles que des récréations sans ballons avec des jeux de société, coopératifs (kapla, yo-yo) et aussi des jeux sans technicité.

Travailler sur l’égalité nécessite d’accompagner la transformation des pratiques en s’intégrant dans une réflexion plus globale sur la mixité. Cela passe par une démarche collective associant élèves et adultes, que cela soit en classe par le travail de l’équipe enseignante sur l’égalité filles-garçons (littérature jeunesse, débats…) mais aussi dans les cours de récréation. Il est incohérent de laisser les garçons faire ce qu’ils veulent dans la cour, et une fois qu’ils sont en classe, de leur imposer des règles. L’implication de tous les acteurs autour du projet d’école est indispensable ainsi que la restructuration de l’espace et un accompagnement formatif sur les stéréotypes sexistes et les représentations partagées de l’égalité.The Conversation

Christine Gautier Chovelon, Enseignante chercheure en sciences de l'éducation et de la formation - Affiliée au laboratoire de recherche LINE, Université Côte d’Azur

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Orthographe : la dictée ne suffit pas à évaluer le niveau des élèves

7 Juin 2022 , Rédigé par The Conversation Publié dans #Education, #Orthographe, #Pédagogie

Orthographe : la dictée ne suffit pas à évaluer le niveau des élèves
Orthographe : la dictée ne suffit pas à évaluer le niveau des élèves
Fanny Rinck, Université Grenoble Alpes (UGA)

« C’est une hécatombe », « c’est innommable », « je m’insurge », « ça m’attriste », « c’est épouvantable », « c’est une désolation », « c’est abominable ». Mais de quel « fléau » les personnes interrogées par Agnès Millet, Vincent Lucci et Jacqueline Billiez dans les années 1990 se plaignaient-elles donc par ces mots ? L’orthographe. Dans leur enquête, les trois chercheurs ont prêté l’oreille aux discours tenus à ce sujet par des utilisateurs ordinaires, enseignants, secrétaires, professionnels du livre, et des élèves du CM2 à la terminale.

Les fautes, la baisse du niveau, les réformes, autant de sujets sensibles en France et, selon les conclusions de l’enquête, de débats passionnels. La presse les affectionne, et chacun se situe dans une relation complexe, faite d’attachement et d’agacement, de certitudes et d’insécurité. Internet fourmille de trucs, astuces, conseils, outils et techniques pour améliorer son niveau et les applis se multiplient. Apprendre des listes de mots ? Faire des dictées sans relâche ? Connaître les règles ? Les solutions exigent d’abord de cerner le problème.

L’étude de Danièle Manesse et Danièle Cogis, publiée dans les années 2000, a conforté l’idée que le niveau baisse : menée auprès de quelques 3000 élèves de CM2, elle relève que

« l’écart entre les résultats des élèves de 1987 et ceux de 2005 est en moyenne de deux niveaux scolaires. Les élèves de cinquième de 2005 font le même nombre de fautes que les élèves de CM2 il y a vingt ans. Les élèves de troisième de 2005, le même nombre d’erreurs que les élèves de cinquième de 1987 ».

En 1987, 50 % des élèves faisaient moins de six fautes. Ils ne sont plus que 22 % en 2005. Le même texte d’une dizaine de lignes a de nouveau été dicté à des élèves de CM2 en 2015. Les élèves ont fait en moyenne 17,8 erreurs en 2015, contre 14,3 en 2007 et 10,6 en 1987. La baisse du niveau se répartit de manière large et ne concerne pas seulement certains élèves ; l’écart entre les plus forts et les plus faibles s’est creusé lui aussi. C’est l’orthographe grammaticale qui est principalement en jeu : entre sujet et verbe, par exemple pour le -nt, à la 3e personne du pluriel, les marques de nombre sur le nom et l’adjectif, le participe passé.

Complexité grammaticale

Les difficultés orthographiques perdurent jusqu’à un niveau avancé et deux types de facteurs explicatifs se dégagent : la complexité intrinsèque du système orthographique du français et l’enseignement de ce système. L’orthographe du français est une des moins transparentes. Notre écriture est alphabétique, c’est-à-dire qu’elle code du son, mais elle est loin de fonctionner sur le principe d’une lettre pour un son et d’un son pour une lettre.

L’écriture manuscrite n’est pas une simple habitude culturelle, c’est aussi un outil clé d’apprentissage de la lecture. Shutterstock

À cet égard, l’orthographe de l’anglais est plus complexe encore (par exemple, le son [i] peut s’écrire de plusieurs manières et les lettres ough se prononcent différemment selon les mots). Elle est plus simple sur les marques grammaticales (genre, nombre, personne verbale…), peu fréquentes en anglais et souvent audibles. En français, les difficultés se concentrent sur les lettres muettes, notamment les finales : il chante et ils chantent se prononcent de manière identique, mais à l’écrit on a un double marquage du pluriel, sur le pronom personnel il et sur la finale verbale. Mangez pourrait s’écrire mengez, manjez, mangé, manger, etc., ce serait correct au niveau phonétique, mais pas au niveau orthographique.

L’orthographe du français demande des compétences grammaticales pointues, ces règles qu’on sait parfois réciter sans pour autant y avoir recours : « le participe passé conjugué avec l’auxiliaire avoir s’accorde avec le complément d’objet direct (COD) quand il est placé avant le verbe ». Même à l’oral, dans les contextes où cet accord serait audible, il est fréquent qu’il ne soit pas réalisé. Exemple : « La tête qu’il a fait ! » et non « La tête qu’il a faite ». Et c’est le cas y compris chez des locuteurs qui contrôlent leur parole, à la radio ou en conférence.

La dictée est une manière d’évaluer où en sont les élèves, mais le problème suivant se pose : les compétences testées dans la dictée correspondent-elles aux compétences orthographiques réellement mobilisées lorsqu’on produit un texte ? Savoir orthographier est un savoir procédural, c’est-à-dire que les savoirs déclaratifs (ou théoriques) jouent un rôle, mais ne suffisent pas. D’autant que les élèves intériorisent des pseudo-règles à la source d’erreurs : il faut un e au féminin donc j’ai jouée « ée », car je suis une fille.

Productions d’élèves

Pour étudier les compétences orthographiques dans des situations réelles de production écrite, il importe donc de partir de textes rédigés par les élèves plutôt que de dictées. C’est dans cet esprit qu’a été constitué le corpus qui sert de base au projet ANR E-Calm. En comparant plusieurs versions des textes des élèves, on peut voir aussi ce qu’ils sont amenés à corriger, ou ce sur quoi de nouvelles erreurs interviennent.

Enfin, ce corpus s’assortit d’entretiens avec les scripteurs autour de leurs textes afin de mieux cerner comment ils procèdent, une question décisive étant celle du contrôle exercé en cours de production : soit le scripteur fait face à une gestion difficile du processus d’écriture mais pourrait réussir à identifier et corriger une erreur, soit il ne parvient pas à en faire l’analyse.

Une autre question importante est de savoir quelles zones de l’orthographe le texte de la dictée permet de tester. En général, le niveau de difficulté reste largement intuitif (longueur du texte, mots jugés difficiles, etc.). Les concours de dictée cumulent les subtilités (un lexique rare, des temps verbaux peu usités). À l’école, on comptabilise les points en moins, mais sur quoi, au juste ? On rassemble, pêle-mêle, des problèmes de doubles lettres, d’accords, de conjugaisons, etc.

Une dictée finit souvent par tester l’orthographe en général et non des problèmes bien ciblés, sélectionnés par rapport au niveau des élèves et par rapport aux caractéristiques de la langue écrite. Les chercheurs en didactique de l’orthographe montrent l’importance d’identifier des compétences exigibles, c’est-à-dire les besoins effectifs des scripteurs et ce qu’il faut attendre d’eux dans le cadre d’un apprentissage progressif, étape par étape.

Objectifs ciblés

Pour enseigner l’orthographe de manière efficace, l’idée défendue aujourd’hui est donc de cibler les objectifs, de travailler les procédures et l’explicitation du raisonnement qui permet de mener à bien ces procédures. Plutôt que « il faut accorder en genre et en nombre », on travaille de manière distincte le marquage du nombre dans le groupe nominal (déterminant, nom, adjectif) et on aborde à part le marquage du genre (beaucoup d’adjectifs ne varient pas en genre).

Les élèves ayant un faible niveau en orthographe, mais déjà un certain nombre de bases, profitent des dictées guidées pour les consolider. Shutterstock

On observe des énoncés pour inférer comment ça fonctionne, on écrit au quotidien en discutant des choix effectués pour mettre en évidence comment on s’y prend. C’est le cas du dispositif Twictée, qui permet de travailler selon ces principes : les élèves coopèrent et négocient leurs choix orthographiques à travers des messages à rédiger, tout en se familiarisant aux codes des réseaux sociaux.

L’apprentissage de l’orthographe est long et le reconnaître est important pour permettre aux élèves de s’approprier cette compétence plutôt que de cultiver le sentiment que leur propre langue leur échappera toujours. Actuellement, les universités mettent en place des formations à l’écriture, sous l’impulsion notamment du projet ANR UOH Ecri+. D’abord, il faut rappeler que l’orthographe ne suffit pas et que produire des textes maîtrisés, c’est savoir gérer leur cohérence, écrire à partir de sources, argumenter.

Concernant l’orthographe, il faut s’interroger sur les dispositifs en usage : est-il pertinent de reproduire ce qui a été fait auparavant sous prétexte que – mais aussi alors que – ça n’a pas fonctionné ? La réflexion doit se porter sur ce dont on a réellement et prioritairement besoin pour écrire correctement, et sur la manière dont les scripteurs s’y prennent quand ils sont en situation d’écrire.The Conversation

Fanny Rinck, Maîtresse de conférences en Sciences du langage, Université Grenoble Alpes (UGA)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Comment le lycée participe à « l’impression d’incompétence » des filles en informatique

7 Juin 2022 , Rédigé par Le Monde Publié dans #Education

Sexiste, l'informatique ? – InternetActu

EXTRAITS

Dans l’étude « Les freins à l’accès des filles aux filières informatiques et numériques », le centre pour l’égalité femmes-hommes Hubertine-Auclert souligne le rôle du lycée dans la production des stéréotypes de genre.

Le lycée « n’est pas un espace neutre », il « produit des inégalités entre les filles et les garçons, notamment sur l’orientation ». C’est la conclusion de l’étude « Les freins à l’accès des filles aux filières informatiques et numériques » menée par le centre Hubertine-Auclert. Ce centre francilien pour l’égalité femmes-hommes, associé à la région Ile-de-France, a mené pendant trois ans une enquête de terrain auprès de cinq lycées franciliens et y a réalisé plus de trois cents entretiens auprès d’élèves, de la seconde à la terminale.

L’enquête a plus particulièrement suivi celles et ceux qui ont choisi l’option « informatique et création numérique » en seconde et l’enseignement de spécialité « numérique et sciences informatiques » (NSI) en première et en terminale. Un enseignement qui compte 82 % de garçons. « L’informatique reflète ce qui se passe pour toutes les filières scientifiques. Elle agit comme une lentille grossissante révélant des inégalités de genre en matière d’orientation », note Amandine Berton-Schmitt, directrice du centre Hubertine-Auclert, alors que les débats sur la place des mathématiques au lycée – et le nombre de filles dans cette discipline – ont créé la polémique ces derniers mois.

Premier constat : depuis vingt ans, les choix d’orientation n’ont guère évolué. Bien que les élèves « adhèrent massivement à un discours défendant l’égalité entre les filles et les garçons », ils demeurent marqués par des représentations genrées des métiers qu’ils remettent peu en cause. « L’accompagnement à l’orientation effectué par le lycée ne va pas modifier des choix perçus comme naturels », remarque Gaëlle Perrin, chargée de mission éducation à l’égalité au centre Hubertine-Auclert. Les élèves qui développent des projets d’orientation en décalage avec des choix « traditionnels » relèvent de l’exception.

Seulement 2,5 % des filles contre 15 % des garçons s’orientent ainsi en fin de seconde vers l’enseignement de spécialité NSI. Pourtant, si les filles sont sous-représentées dans ces filières, elles expriment les mêmes raisons que les garçons pour y accéder, comme la pratique des jeux vidéo ou la présence dans leur entourage de figures initiatrices.

(...)

« Parce qu’elles ne sont pas suffisamment outillées ni pour percevoir les dynamiques genrées dans les classes ni pour penser des actions en faveur de l’égalité filles-garçons, les équipes éducatives ne peuvent pas enrayer la production de ces inégalités, voire participent à les renforcer », affirment les auteurs de l’étude, alors même que l’égalité entre les filles et les garçons fait partie des priorités de l’éducation nationale. Parmi les recommandations avancées par le centre Hubertine-Auclert pour remédier à ces phénomènes, la formation des enseignants, et de leur hiérarchie, fait partie des éléments-clés. Pour Amandine Berton-Schmitt, « il faut permettre à tous les personnels de l’éducation nationale d’intégrer davantage cette grille de lecture ».

Sylvie Lecherbonnier

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Le dégel du point d’indice, ou l’art d’offrir ce qui est dû - Vidéo

7 Juin 2022 , Rédigé par France Info Publié dans #Education, #Economie

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Blanquer «enchantillé»: «Il n’y a eu aucune violence mise à part l’aspersion de crème chantilly sur sa casquette»

7 Juin 2022 , Rédigé par Liberation Publié dans #Education

01Topinfo - Revue de presse: chantilly

Christophe et Olivier, enseignants au collège à Montargis, assurent ne pas avoir anticipé l’aspersion de crème sur l’ancien ministre de l’Education nationale. Auprès de «Libé», ils assurent vouloirs dénoncer son «parachutage» dans le Loiret et la politique menée lorsqu’il officiait rue de Grenelle.

Entre les fraises, les tomates et les cerises, ils ont vu rouge en apercevant leur ancien ministre. Alors qu’ils étaient en train de remplir leurs paniers sur le marché de Montargis, dans la matinée du samedi 4 juin, Christophe et Olivier, professeurs d’art plastique et de technologie au collège, 51 et 57 ans, ont aspergé Jean-Michel Blanquer de crème chantilly. L’ex-ministre de l’Education menait campagne pour la majorité présidentielle dans la 4e circonscription du Loiret.

Les deux enseignants, qui affirment n’avoir pas prémédité leur geste, sont désormais poursuivis pour «violence en réunion n’ayant pas entraîné d’incapacité totale de travail», selon le parquet de Montargis. Les deux mis en cause passeront le 4 juillet devant le procureur pour une audience de comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, une procédure qui permet de juger rapidement les auteurs d’une infraction ayant reconnu les faits. Olivier et Christophe ont expliqué leur geste à Libération.

Pourquoi avoir aspergé de crème chantilly Jean-Michel Blanquer ?

En achetant nos fraises samedi matin, nous avons repensé aux mots de Sibeth Ndiaye [au sujet de la polémique des instituteurs qui pourraient aller aider les agriculteurs] alors qu’elle était porte-parole du gouvernement, pendant le premier confinement : «Nous n’entendons pas demander à un enseignant qui aujourd’hui ne travaille pas, compte tenu de la fermeture des écoles, de traverser toute la France pour aller récolter des fraises gariguettes.» En oubliant l’école à distance, en oubliant que nous restions pour surveiller les enfants de soignants, de policiers, d’employés des supermarchés…

On ne savait pas que Jean-Michel Blanquer serait là, on n’avait pas prémédité notre geste. Mais quand on a vu que ses équipes étaient présentes, on s’est dit que c’était le moment de perpétuer la tradition ancienne d’entartage pour montrer notre désaccord avec la politique menée lorsqu’il était ministre et son parachutage aux législatives dans le Loiret. Pour ne pas le blesser, on a privilégié la chantilly, qui permettait de ne pas avoir de contact physique. On ne l’a pas insulté contrairement à ce qui a été rapporté, il n’y a eu aucune violence mise à part l’aspersion de crème sur sa casquette.

Comment s’est passée votre arrestation ?

On a immédiatement été arrêtés, un de nous par des militants LREM, l’autre par un policier en civil qui l’a ceinturé. On s’y attendait. En revanche, on a été plus surpris par la suite. La réponse judiciaire a été immédiate et forte. Deux voitures de polices sont arrivées et nous ont emmenés au commissariat où nous sommes restés en garde à vue sept ou huit heures, ce qui nous paraît un peu excessif. Jean-Michel Blanquer a déposé plainte. On nous a interrogés deux fois. Après avoir reconnu les faits, on nous a indiqué qu’on était poursuivis pour avoir «volontairement commis des violences avec cette circonstance [aggravante] que les faits ont été commis en réunion».

Juliette Delage

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"Jeter de la chantilly sur quelqu’un n’a jamais fait de mal, sauf à l’égo", se défendent les deux professeurs qui ont aspergé de crème Jean-Michel Blanquer à Montargis

7 Juin 2022 , Rédigé par France 3 - Centre Val de Loire Publié dans #Education

Recette de Chantilly

Les deux enseignants qui ont aspergé l’ancien ministre de l’Education nationale de crème chantilly ce samedi 4 juin à Montargis dénoncent la disproportion des poursuites à leur encontre. Ils expliquent leur action à travers un compte Twitter.

"Ca nous est venu comme une envie d’acheter des fraises", plaisantent les deux enseignants, amis de longue date. La boutade n’en est pas vraiment une puisqu’elle renvoie à une phrase prononcée par Sibeth Ndiaye le 25 mars 2020. En plein premier confinement et alors que les établissements scolaires sont fermés depuis moins de 10 jours, l'ancienne porte-parole du gouvernement a tenté de justifier un appel à volontaires pour venir en aide aux agriculteurs privés de main d’œuvre : "Nous n’entendons pas demander à un enseignant, qui aujourd’hui ne travaille pas compte tenu de la fermeture des écoles, de traverser toute la France pour aller récolter des fraises", avait-elle alors lâché.

 

La phrase avait provoqué la colère des enseignants qui s’étaient émus que la porte-parole ignore la mission de continuité pédagogique mise en place par son gouvernement, à savoir la poursuite des enseignements à distance, l'envoi et la correction de devoirs, le suivi des élèves et même l'accueil des enfants de personnels soignants.

Alors, comme "un clin d’œil" à cette formule maladroite, Christophe explique que "comme c’est la période des fraises et qu’il y avait le marché de Montargis, on s’est dit que ce serait sympa d’y ajouter de la chantilly."

"On n’a proféré aucune insulte. On est restés très éloignés."

Les deux collègues voient arriver leur ancien ministre de tutelle et candidat aux législatives qui vient faire campagne dans les allées du marché. Dans les vidéos partagées sur les réseaux sociaux, on voit alors Christophe et Olivier asperger Jean-Michel Blanquer de crème blanche sucrée avant de scander pour l’un "La députation est une chose sérieuse ! " et pour l’autre "Education en déroute, Jean-Michel Blanqueroute !""L’objectif, ce n’était pas d’avoir un contact physique avec lui, mais plutôt de faire "une projection". On n’a proféré aucune insulte. On est restés très éloignés et quelques flocons de chantilly sont arrivés sur sa casquette."

 

Christophe dit avoir ensuite été ceinturé par un homme qui lui apprendra plus tard qu’il est policier en civil. "Je lui ai dit que c’était une blague, qu’il n’y avait rien du tout." Olivier a été lui pris à partie par 6 ou 7 personnes, visiblement des militants du candidat qui le bloquent dans le renfoncement de l’entrée d’une banque : "On a échangé avec eux et là, il y avait une agressivité de leur part, des tutoiements. Olivier a eu sa chemise déchirée." 

Plus tard, tous deux sont emmenés au commissariat : "Les policiers ont été très gentils. Ils nous ont dit d’attendre là, que ça n’irait pas très loin. Mais on a appris que monsieur Blanquer avait décidé de porter plainte. » L’audition se transforme alors en garde à vue. Arrivés vers midi, les deux enseignants n’en sortiront qu’à 21h, soit 8 heures plus tard avec une convocation à comparaître devant le tribunal judiciaire de Montargis.

Dénoncer le parachutage de Jean-Michel Blanquer et les difficultés dans l’éducation nationale.

Ce qui a convaincu ces enseignants de chahuter l’ancien ministre, c’est le parachutage de ce dernier sur leur territoire. "Il ambitionne d’être le représentant de notre circonscription, il est au courant des difficultés que rencontrent les enseignants, mais il ne connait absolument pas le territoire qu’il convoite", explique Christophe. Agés de 51 et 57 ans, lui et Olivier enseignent depuis 20 ans dans le secondaire en REP, réseau d’éducation prioritaire. "Le but de cette action, c’est de parler de l’éducation nationale. On ne balance pas de la chantilly sur un ex-ministre juste parce qu’on veut faire une blague potache. On trouve ça indécent de se présenter avec le bilan qu’il a," justifie Olivier.

"On nous reproche d’attenter à la démocratie. On nous explique  que la démocratie, c’est des arguments. Nous on essaie de démontrer que la démocratie ce n’est pas le problème des élèves. L’éducation n’a rien fait pour eux. On ne crée pas des démocrates, on crée des bombes". Olivier, enseignant en REP

"ProfsChantillyonneurs" : un compte Twitter pour expliquer et dénoncer la démesure

Christophe et Olivier ne s’attendaient ni à un dépôt de plainte, ni à un tel retentissement médiatique pour une action qu’ils estiment non-violente. "Jeter de la chantilly sur quelqu’un n’a jamais fait de mal, sauf à l’égo", réplique Christophe. Alors pour répondre à leurs détracteurs, donner leur version des faits et expliquer leurs motivations, ils ont créé ce lundi 6 juin un compte twitter. Baptisé "ProfsChantillyonneurs", la page compte déjà presque 1500 abonnés en une journée.

Ils y ont d’abord partagé quelques "mèmes", ces détournements humoristiques qui deviennent viraux, pour dénoncer "la démesure des poursuites" à leur encontre. "Des gens se sont amusés de l’image et c’est vrai que quand on voit notre pauvre projection de chantilly avec ceux qui se sont fait gazer gare de l’est ou au Stade de France, c’est intéressant de voir la disproportion." explique Christophe.

 

Mais comme ils le disent, le but de ce compte c'est aussi "d’expliquer qu’on n’est pas juste deux rigolos, même si le parachutage de monsieur Blanquer dans le Loiret a un côté clownesque." Alors dans une première vidéo, ils mettent en parallèle les accusations dont ils font l’objet avec la violence dont serait victime le système scolaire : "La violence, c’est 12% d’élèves qui arrivent en 6eme et ne sont pas capables de lire ou de comprendre un texte", dénonce en premier lieu la vidéo avant de poursuivre sur le décrochage scolaire, le manque de débouchés, le harcèlement scolaire, les agressions des enseignants, le manque de personnel, l’embauche de personnel non-formé … "Violente la chantilly ?" concluent-ils, "l’éducation nationale est en chute libre, mais monsieur Blanquer a, lui, son parachute pour les législatives à Montargis."


Christophe et Olivier ont reconnu les faits devant les enquêteurs. Ils comparaîtront le 4 juillet prochain devant le tribunal judiciaire de Montargis au cours d’une audience sur reconnaissance préalable de culpabilité, aussi appelée plaider-coupable. Poursuivis pour violences en réunion n’ayant pas entraîné d’incapacité de travail, il encourent jusqu’à 3 ans d’emprisonnement.

Amélie Rigodanzo

https://france3-regions.francetvinfo.fr/centre-val-de-loire/loiret/montargis/jeter-de-la-chantilly-sur-quelqu-un-n-a-jamais-fait-de-mal-sauf-a-l-ego-se-defendent-les-deux-professeurs-qui-ont-asperge-jean-michel-blanquer-de-creme-a-montargis-2556052.html

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Macron et "l'inévitable" privatisation de l'Ecole

6 Juin 2022 , Rédigé par Le Cafe Pedagogique Publié dans #Education

Macron et "l'inévitable" privatisation de l'Ecole

EXTRAITS

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Liberté, flexibilité

Liberté, flexibilité : E Macron a répété ces mots à propos de l'Ecole le 2 juin à Marseille. "Quand je dis on inverse la pyramide... c'est ça la révolution culturelle. Le mot a été prononcé au début de notre table ronde, c'est une révolution culturelle", répète-il le 2 juin. Il parle aussi de "réorganisation nationale". Des propos qui auraient pu faire réagir son ministre. Mais tout le monde a pu constater le 2 juin que le vrai ministre habite l'Elysée...

Que sait-on de cette révolution culturelle ? E Macron veut "généraliser" l'expérimentation marseillaise. Il la définit ainsi. D'abord plus de liberté : "des enseignants qui soient plus libres... des chefs d'établissements qui sont plus libres de proposer, d'innover... La possibilité pour les directrices et directeurs d'établissement (sic) de s'assurer qu'on partage un projet qu'il porte et où il y a aussi plus de liberté qu'on va essayer de donner aux enseignants".

Le nouveau pacte

Ce projet est lié au "nouveau pacte" pour les enseignants pour lequel il fixe l'échéance de la rentrée 2023. A coté d'une augmentation (non définie) pour tous les enseignants, E Macron parle d'une revalorisation en lien avec l'acceptation du nouveau pacte. Lui-même rapproche ce pacte de l'expérimentation marseillaise. A Marseille les 40 000€ attribués aux écoles de l'expérimentation comprennent une partie de rémunération des personnels sous forme d'heures supplémentaires pour suivre le projet et de décharges de direction. C'est lié à l'autonomie pédagogique de l'école et à la nouvelle convention qui la lie à l'expérimentation.

C'est clairement ce système qui constitue pour E Macron la "révolution culturelle" annoncée. Là où existe aujourd'hui une éducation nationale avec des règles nationales, le président souhaite multiplier les contrats liant chaque école à l'Etat et à son environnement local.

Cette évolution dépasse largement la question du "nouveau pacte". Dans le cadre de ce "pacte", les nouveaux enseignants titulaires et les enseignants qui y rentreront accepteront la séparation entre le concours et l'obtention d'un poste. Comme pour les maitres titulaires du privé actuellement ils devront trouver un établissement ou une école et se soumettre à l'autorité du chef d'établissement.  C'est à ce propos qu'E Macron parle de "flexibilité", un pricipe présenté comme une vertu. A vrai dire ils devront s'y soumettre davantage que dans le privé. Car dans le privé, le chef d'établissement a déjà fort à faire avec la gestion de son établissement. Ils accepteront aussi la fin d'une rémunération identique. Chaque contrat local pourrait avoir ses servitudes et ses rémunérations même si des repères nationaux existent.

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Quels freins ?

La Revue de Sèvres soulignait deux freins à cette "inévitable " privatisation. D'abord les mauvais résultats scolaires. Le nouveau système tente de  camoufler avec des batteries de tests. Mais ils sont bien là. Dans la mise en concurrence généralisée des écoles, les écarts se creusent. Partout l'application des nouvelles règles entrainent une crise du recrutement et la généralisation de l'auxiliariat. Et les perdants sont les élèves des milieux populaires. En Angleterre les écoles privées n'hésitent pas à fermer là où les écoles ne sont pas rentables, laissant à la rue les enfants des quartiers. En Suède, là ou le nouveau management est allé le plus loin, les résultats ont été si catastrophiques que même l'OCDE a recommandé un aménagement du système.

L'autre frein à cette "révolution culturelle" va bientôt être mesuré. Xavier Pons le citait dans la Revue de Sèvres. "Les Français sont pour le libre choix de l'Ecole... Mais une fois mis devant le choix ils se posent des questions". (...)

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F Jarraud

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La non-communication de Pap Ndiaye : pourquoi le ministre de l'Éducation nationale ne parle-t-il pas ?

6 Juin 2022 , Rédigé par France Info Publié dans #Education

Qui est Pap Ndiaye, nouveau ministre et cauchemar de l'extrême droite en  France ? -

Il est la grande surprise du gouvernement Borne, Pap Ndiaye est déjà critiqué, très observé et suivi par les médias. Mais  le successeur de Jean-Michel Blanquer a choisi de retarder sa communication. Pourquoi ?

Il est la surprise du gouvernement Borne. Peu connu du grand public, Pap Ndiaye a immédiatement été vilipendé par l'extreme-droite, décrit par les médias comme étant l'antithèse de Jean-Michel Blanquer, sa parole était donc très attendue, mais... il n'a pour le moment communiqué qu'une fois, le jour de la passation de pouvoirs rue de Grenelle.

Avec un message clair et qui a posé ses premières intentions. Et pour faire de son hommage à Samuel Paty le marqueur de sa mission au ministère de l'Education Nationale, Pap Ndiaye s'est rendu, pour son premier déplacement, au collège de Conflans-Sainte-Honorine, où le professeur d'histoire-géographie enseignait. Mais le ministre l'a fait sans caméra et ce n'est que le lendemain que la presse a relayé sa visite.

franceinfo : qu'est-ce que ces débuts disent de la communication qu'a choisie Pap Ndiaye

Gaspard Gantzer : Pap NDiaye sait qu'il est attendu au tournant car son nom avait peu circulé avant qu'il n'arrive rue de Grenelle. Il a donc voulu marquer son entrée en politique, en laissant son empreinte rapidement. Et son empreinte c'est celle d'un historien, celle d'un professeur d'histoire qui est attaché à l'histoire, à la mémoire et aux symboles. C'est pour cela qu'il a voulu tout de suite se mettre dans les pas, non pas de ses prédécesseurs, mais d'un de ses collègues qui a perdu la vie malheureusement dans le cadre d'un attentat terroriste.

Sa nomination au ministère de l'Éducation nationale est-elle aussi un coup de com' ?

Incontestablement parce que le premier gouvernement d'Elisabeth Borne est un gouvernement de continuité et, un peu comme Emmanuel Macron avait choisi la figure de Nicolas Hulot en 2017 et un peu plus tard celle d'Eric Dupond-Moretti, il a voulu attirer l'attention avec ce ministre peu connu du grand public mais très impliqué dans le milieu académique. Pap Ndiaye est très impliqué dans la lutte contre les discriminations et qui, par son parcours, son origine, marque les esprits.

Son deuxième déplacement officiel s'est donc déroulé jeudi aux côtés du chef de l'Etat à Marseille, pour lancer l'école du futur, mais c'est finalement Emmanuel Macron qui parlé à sa place, ou du moins "sous le contrôle de monsieur le ministre". Est-ce quelque chose de normal ?

Oui, et on aurait pu attendre très longtemps la prise de parole de Pap Ndiaye, car, quand un président se déplace les ministres sont d'abord et avant tout là pour faire de la figuration. On a coutume de dire que sous la Ve République, le président s'occupe de tout, y compris de la couleur des rideaux et de changer les ampoules à l'Elysée. Dans les déplacements ministériels et présidentiels c'est donc très difficile pour un ministre d'exister, et notamment quand celui-ci a peu d'expérience politique. On peut toujours dire un mot en passant mais la star du jour, dans un tel déplacement, c'est le président et rien que le président.

Sait-on quand la première prise de parole de Pap Ndiaye aura lieu ?

Pas encore je crois, mais comme beaucoup de nouveaux ministres - je pense aussi à Rima Abdul-Malak à la Culture -, ils redoutent cette première prise de parole dans les médias car ils savent qu'ils sont attendus au tournant. Donc ils s'entraînent, certains font du media-training... En tous cas, ils calibrent leurs messages et ils attendent de passer leur épreuve du feu.

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Ghettos scolaires, violences policières : un sociologue prend la défense des « mauvais Français »

5 Juin 2022 , Rédigé par Lobs Publié dans #Education

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Si tant de jeunes se détournent des urnes, boudent la démocratie, c’est avant tout que l’Etat les maltraite, montre Sebastian Roché dans son nouveau livre.

Il se défend d’être un militant. Ses conclusions, assure Sebastian Roché, plaisent parfois à la gauche, parfois à la droite. Ses questions, en revanche, font toujours partie de celles qui fâchent. Le chercheur s’est fait connaître pour son expertise sur celles, ô combien politiques, de la mesure des actes de délinquance, de l’efficacité de la police ou encore de la vidéosurveillance. Sociologue et politologue, il s’est également intéressé aux relations entre police et population et au traitement des minorités. Depuis une dizaine d’années, à la faveur de grandes enquêtes européennes ou internationales sur la jeunesse, il conduit des sondages sur des sujets ultrasensibles. Des gros plans, très fouillés et d’une grande robustesse statistique, sur, par exemple, le sentiment religieux des collégiens et son lien avec le crédit qu’ils accordent à la science et aux connaissances scolaires ou avec leur foi en la laïcité républicaine, mais aussi sur ce qui conditionne leur sentiment d’être français ou l’importance qu’ils accordent au vote.

Dans son nouveau livre, « la Nation inachevée. La jeunesse face à l’école et à la police »il a trempé sa plume dans le vitriol, exaspéré, comme nombre d’universitaires, par le mépris que manifestent la plupart des politiques vis-à-vis de leurs travaux.

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Véronique Radié

EXTRAIT

La prééminence du cadre politique des États-nations s’est imposée à travers l’Histoire. Il a façonné le sentiment d’une identité collective nouvelle, il est devenu le cadre de la lutte pour la reconnaissance des droits. Cette appartenance nationale est ancrée dans divers mécanismes culturels, dont l’école est le plus visible, de solidarité par l’État-providence, et d’inclusion politique par le droit de vote, le rôle des partis et syndicats. L’État est le cadre des conflits. Le Front populaire et les grandes grèves de mai et juin 36, l’idéal humaniste de la Libération, le mouvement de Mai 68 ont transformé des conflits en droits et en acquis sociaux, en protection sociale et congés payés. Tel était tout au moins le schéma classique de compréhension de l’inclusion nationale. Aujourd’hui, cette identité est, à en croire certains responsables politiques, menacée par le fait d’agiter des drapeaux étrangers lors d’un mariage, de porter un voile ou de ne pas manger de viande de porc à la cantine. Comment expliquer une telle sensibilité identitaire ? La question plus profonde qui taraude la société française est de savoir si l’État peut continuer à fabriquer la nation. Mais qu’est-ce que recouvre l’inscription dans le collectif de la nation au juste ? C’est le point de départ de notre travail.

 

Repartons des analyses du sociologue Max Weber pour qui « le concept de nation nous renvoie constamment à la relation avec la puissance politique1 ». C’est élémentaire, mais essentiel. Dans ce livre, nous saisirons la nation dans cette connexion des individus à deux collectifs nationaux : « se sentir français », un attachement au pays, d’une part, et désirer avoir « la nationalité française » qui fait écho à l’inscription explicite dans le cadre légal défini par l’État, d’autre part. Ensuite, ajoute Weber, « la nation est le projet de l’État », ce qui le transcende. C’est la réciproque de la première relation. Le concept d’État renvoie constamment à la nation, pourrait-on écrire en symétrisant son propos. En permanence, l’État veut à la fois façonner et exprimer la nation. C’est pourquoi nous appréhenderons la question de la nation non pas uniquement sous l’angle des deux collectifs cités, mais aussi sous celui de la relation aux normes et principes du régime (le vote, la laïcité) ou à la figure de l’État (le président). Le projet national de l’État n’a rien de dissimulé, au contraire, et les exemples abondent pour l’illustrer. Le président Nicolas Sarkozy, défait au second tour de l’élection présidentielle de mai 2012, conclut son discours d’adieu : « Vous êtes la France éternelle, je vous aime, merci, merci. » Le président Emmanuel Macron explique le sens du sacrifice du colonel de gendarmerie à Trèbes en mars 2018 : « Il dit comme aucun autre ce qu’est la France, ce qu’elle ne doit jamais cesser d’être et qu’elle ne cessera jamais d’être tant que des femmes et des hommes décideront de la servir avec le courage, le sens de l’honneur, l’amour de la patrie que vous avez démontrés. » Le culte des morts et la promesse d’immortalité illustrent l’affinité du culte de la nation avec celui de la religion. Un candidat écologiste explique, un peu moins d’un an avant l’échéance, ses intentions pour 2022 : « Je suis candidat à l’élection présidentielle. Parce que j’aime la France et que je veux la servir. » Anne Hidalgo se lance dans la campagne avec son livre Une femme française. Le représentant de l’État célèbre la nation. La nation est un être collectif à caractère surnaturel, immortel, que tout chef de gouvernement ou tout aspirant à la fonction doit honorer.

Les hommes politiques peuvent défier ou mépriser les Français. Plusieurs épisodes récents sont dans toutes les mémoires. C’est Macron qui lance, bravache, « venez me chercher », ou, condescendant, « je traverse la rue et je vous trouve un travail ». Mais jamais la nation ne souffrirait un tel mépris dans leur bouche. La nation française, mise en mots par ceux qui la dirigent ou en ont l’intention, oblige à l’amour et au désintéressement, aucun sacrifice n’est trop grand pour la servir. Elle est une forme symbolique supérieure. La nation s’incarne dans les dirigeants qui, à leur tour, la célèbrent, dans une boucle sans fin. Cette forme s’impose à eux. Ces échanges symboliques ne sont pas une façade, ils sont la manifestation la plus directe de l’existence de cadres mentaux collectifs, l’aboutissement de la construction d’une relation entre le pouvoir et le peuple.

 

L’État moderne fonde sa légitimité sur la nation. La nation est le nom du peuple politique. L’idée que le pouvoir procède de la nation a été conceptualisée lors de la Révolution, mais lui est antérieure. L’historien David Bell explique comment Louis XVI, sous la pression d’un mécontentement croissant, avait commencé à invoquer le concept de nation comme une source de sa légitimité2, et prétendait « je ne fais qu’un avec la nation », être indissociable de l’idée de nation. Le 17 juin 1789, les députés du tiers état, réunis à Versailles par le roi, se constituent d’eux-mêmes, sur la motion de l’abbé Sieyès, le grand penseur de la souveraineté en cette période, en « Assemblée nationale ». Unilatéralement, elle retire au roi la possibilité d’incarner la nation. Considérant qu’ils représentent « les quatre-vingt-seize centièmes au moins de la nation », sans le clergé ou la noblesse, les députés du tiers état s’approprient la nation. L’assemblée est légitime parce que le peuple se retrouve dans le projet qu’elle incarne. Deux propositions essentielles sont résumées ici : l’État trouve son sens dans la nation, et la nation existe si le peuple s’y reconnaît. Avec l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 qui veut que « Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation », nous avons une définition de ce qu’est une nation politique : un principe de souveraineté, et la manifestation de la « volonté générale ». Mais, pour que la nation ne soit pas qu’un principe juridique, il faut absolument qu’elle existe dans le cœur des citoyens, qu’ils développent une identité nationale vécue subjectivement, c’est-à-dire émotionnellement, dans leur esprit et dans leur chair.

 

Pourtant, la nation comme identité n’attire les sciences sociales que depuis peu. L’historienne Anne-Marie Thiesse rappelle que l’expression « identité nationale » n’existait pas en France avant les années 1980 et qu’on a commencé à s’y intéresser avec l’émergence de la question de l’identité sociale des groupes humains, que ce soit sous l’influence des psychologues sociaux comme Henri Tajfel ou de sociologues comme Erving Goffman3. Cela ne veut pas dire que le sentiment national n’existait pas avant, et n’a pas une histoire. Il remonte à l’affirmation au XIXe siècle d’États qui défendent la promotion d’une culture comme moyen d’unifier la nation, au point que la nationalisation des identités est un des phénomènes politiques les plus marquants et les plus partagés des deux siècles qui se sont écoulés. La culture politique devient d’abord et avant tout nationale. C’est cet aspect identitaire qui nous intéresse ici : comment l’attachement national se réalise-t-il ? Et particulièrement chez les jeunes ?

 

Explorer par voie d’enquête le rapport des jeunes à la nation ne dispense pas d’une mise en perspective conceptuelle. Je dirais même plus, la multiplication des petits sondages qui produisent des pourcentages sur une base quotidienne, mais sans vouloir s’ancrer dans les notions qui nous servent à comprendre la nation et la démocratie, est plus trompeuse qu’autre chose. Penser la figure de la nation dans les démocraties suppose de mobiliser et définir trois concepts : la nation, l’État, le « peuple d’État ».

 

« La Nation inachevée. La jeunesse face à l’école et la police », de Sebastian Roché, Grasset, 400 pages, 22,50 euros.

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