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Vivement l'Ecole!

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En plus des 1 100 postes supprimés, quelques 1 400 n’ont pas été pourvus au concours de professeur des écoles.

19 Septembre 2023 , Rédigé par Le Café Pédagogique Publié dans #Education

En plus des 1 100 postes supprimés, quelques 1 400 n’ont pas été pourvus au concours de professeur des écoles.

EXTRAIT

Premier degré : trois semaines après la rentrée des postes toujours vacants

Cela va faire trois semaines que quelques 6 millions d’écoliers du premier degré ont retrouvé le chemin de l’école. Pour autant, équipes pédagogiques et élèves essuient encore les plâtres de la gestion calamiteuse de cette rentrée. En plus des 1 100 postes supprimés, quelques 1 400 n’ont pas été pourvus au concours de professeur des écoles. Même le recrutement de contractuels ne fait pas le plein. Encore maintenant, certains postes restent vacants dans le premier degré mettant à mal un système déjà ankylosé.

 

En France, il y a plus de 44 000 écoles, quantifier les difficultés rencontrées par chaque équipe enseignante est laborieux nous dit Guislaine David, porte-parole de la FSU-SNUipp. « Mais les premières remontées font état de temps partiels non pourvus. Par exemple, dans le Val d’Oise, dans une école, deux enseignantes sont à temps partiel de droit et la directrice a une décharge de direction le jeudi. Aucune des professeures des écoles n’est remplacée les jours où elle n’est pas là et la directrice n’arrive pas à prendre sa journée de décharge ».

Pour garantir qu’il y a bien un enseignant devant chaque classe le lundi 4 septembre, les enseignants remplaçants ont été réquisitionnés affirme la responsable syndicale. « Cela signifie que dès la rentrée, certaines circonscriptions n’avaient même plus d’enseignants ou enseignantes pour assurer les remplacements. C’est un pansement sur une jambe de bois ». Concrètement en cas de congés maladie, de congé enfant malade ou encore de congés maternité, les enfants n’auront pas cours. Ils seront répartis dans les autres classes de l’école – quand il y en a, et ne bénéficieront pas des temps d’enseignement qui leur sont dus. Car en effet, lorsque Emmanuel Macron, Pap Ndiaye et aujourd’hui Gabriel Attal évoquent le remplacement de toutes les absences de courte durée, ils omettent d’évoquer la situation particulière de l’école primaire où les enfants sont accueillis coûte que coûte, passant parfois la journée eu sol lorsqu’il n’y a pas assez de tables et de chaises pour les accueillir dans les autres classes.

(...)

Lilia Ben Hamouda

Article complet à lire en cliquant ci-dessous

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"C’EST CLAIREMENT DU CHANTAGE": DES PROFS DÉNONCENT DES PRESSIONS POUR SIGNER LE PACTE ENSEIGNANT

18 Septembre 2023 , Rédigé par BFM/RMC Publié dans #Education

Relations professionnelles

Le pacte enseignant voulu par le gouvernement ne prend pas. Et des profs témoignent des techniques employées depuis la rentrée pour les forcer à signer.

Dans les écoles, les collèges et les lycées, le pacte enseignant ne prend pas. D'après une enquête récente de la SNPDEN, dans 30% des collèges et lycées, aucun pacte n'a été signé.

Alors, pour améliorer les chiffres de signature dans leurs établissements face à la pression des institutions, des enseignants de nombreuses académies, de Toulouse à Strasbourg en passant par Limoges et Rennes, racontent que leur chef d'établissement leur met la pression, voire utilise le chantage.

À la journée de pré-rentrée organisée dans son collège, Camille et ses collègues sont tombés des nues. On leur a annoncé que, cette année, “tous les projets de sortie seraient soumis à l’accord du chef d’établissement qui donnerait des avis défavorables si on n’a pas de solution pour être remplacé. Donc, c’est-à-dire des collègues qui signent le pacte”, indique-t-il. Une absurdité pour ce professeur d'histoire-géographie.

“Ça détruit les projets qui sont pourtant essentiels à la vie de l’établissement et à la mission qu’on a de former des citoyens. J’organise avec mes collègues des sorties à Oradour-sur-Glane, est-ce que le fait de ne pas être remplacé nécessite vraiment que j’annule ce projet?”

"ILS SE SONT RETROUVÉS AVEC UN MAUVAIS EMPLOI DU TEMPS"

Pression sur les sorties scolaires, mais aussi sur les emplois du temps. Comme près de Strasbourg, où les collègues de Christophe, qui avaient refusé de signer le pacte, ont été sanctionnés.

“Ils se sont retrouvés avec un emploi du temps avec plein de trous, enfin un mauvais emploi du temps. Il y a eu clairement un changement d’attitude du chef d’établissement”, explique-t-il.

Et ça marche dans l'autre sens, raconte Jérôme, professeur d'anglais. “Si vous signez le pacte, je vous promets d’arranger votre emploi du temps pour avoir telle ou telle demi-journée de libre. C’est clairement du chantage, n’ayons pas peur des mots”, assume-t-il.

Le ministère, lui, rappelle qu’il n’y a aucune consigne nationale qui motive ce genre de pression ou l’annulation de projet scolaire.

Margaux Boulte avec Guillaume Descours

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« 30 minutes d'activité physique » à l’école : un dispositif contre la sédentarité à questionner

18 Septembre 2023 , Rédigé par The Conversation Publié dans #Education, #Education Physique et Sportive

Les cours d'éducation physique et sportive consistent-ils seulement à faire  du sport ?

« 30 minutes d'activité physique » à l’école : un dispositif contre la sédentarité à questionner
Fanny Raingeaud, Université Gustave Eiffel et Cécile Collinet, Université Gustave Eiffel

Le gouvernement place la rentrée scolaire sous le signe de l’olympisme et du paralympisme. Cette année 2022-2023 serait « l’occasion de renforcer tous les dispositifs favorisant la pratique physique et sportive des élèves », parmi lesquels les « 30 minutes d’activité physique quotidienne » expérimentées à la rentrée 2020 puis généralisées à la rentrée 2022.

La mesure se veut emblématique du projet « héritage social », adossé à l’accueil des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) à Paris en 2024 consistant à faire de l’évènement un tremplin pour répondre à des problématiques sociales. Que pouvons-nous attendre de ces « 30 minutes d’activité physique quotidienne » qui ont vocation à être développées dans toutes les écoles élémentaires ?

Notre article s’appuie sur un travail de thèse en cours lors duquel nous avons rencontré une quarantaine d’acteurs impliqués dans le déploiement du dispositif : des professeurs des écoles chargés de le mettre en œuvre aux décideurs olympiques et politiques l’ayant initié, en passant par une majorité d’acteurs intermédiaires des services décentralisés de l’Éducation nationale.

Lutter contre la sédentarité

La mesure des « 30 minutes d’activité physique quotidienne », portée à la fois par le comité d’organisation des jeux olympiques et paralympiques et le ministère de l’Éducation nationale et des Sports, a pour ambition de faire bouger les élèves en proie à une sédentarité croissante. La demande est de faire réaliser aux élèves un minimum de 30 minutes d’activité physique quotidienne les jours où ils n’ont pas de cours d’Éducation physique et sportive (EPS).

Le dispositif se distingue de la discipline scolaire qui vise des apprentissages concrets en termes de compétences motrices, méthodologiques et sociales. Cependant, cette dernière a toujours inclus dans ses finalités la santé des élèves. Elle est programmée 3 heures par semaine mais une majorité des enseignants fait face à de trop nombreuses difficultés, notamment en termes de formation, pour pouvoir l’enseigner à hauteur des attentes institutionnelles.

Les « 30 minutes d’activité physique quotidienne » peuvent se concrétiser sous la forme de pauses actives entre des cours « théoriques », de séances d’apprentissage en mouvement, ou encore d’une incitation à l’activité physique sur les temps de récréation : une grande marge de liberté est laissée aux enseignants quant aux modalités de mise en œuvre.

L’Organisation mondiale de la santé fixe le seuil d’activité physique d’intensité modérée à soutenue, préconisé pour les enfants de 5 à 17 ans, à 1 heure par jour. L’ambition présentée au travers du choix des « 30 minutes » pour l’école est de souligner la responsabilité partagée entre le système scolaire et les familles face au problème public et, dans une logique de continuité éducative, d’inciter les parents à se poser la question de la sédentarité de leurs enfants et à œuvrer pour la réalisation de la demi-heure restante.

L’héritage de Paris 2024 « en jeu »

Le dispositif est considéré par le COJOP comme l’un des plus emblématiques de l’héritage des jeux. L’objectif de mise à l’activité de la population française est un vrai défi quand une majorité des travaux de recherche montrent que l’influence de l’accueil d’un grand évènement sur celle-ci s’avère non significative. Cependant, la promotion d’un dispositif concernant toutes les écoles d’un pays dans le cadre de l’accueil d’un méga-événement est inédite.

Présentation du dispositif 30 minutes d’activité physique par jour à l’école sur le site du ministère de l’Éducation nationale.

Plusieurs outils sont développés pour accompagner les enseignantes et enseignants dans la mise en œuvre des « 30 minutes d’activité physique quotidienne ». Le site web Génération 2024 recense un ensemble de fiches ressources allant des fiches pédagogiques conçues par les groupes de travail académiques, aux « poses sport et attitudes » des mascottes des Jeux, en passant par le hiit de Mc Fly et Carlito. « L’équipe de France des 30APQ » est constituée de sportifs et sportives de haut niveau s’engageant à se déplacer dans des classes pour évoquer les bénéfices d’une pratique sportive quotidienne pour le bien-être physique et mental.

Enfin, un kit de matériel sportif (chasubles, ballons, etc.), conçu en partenariat avec Décathlon, devrait être livré à toutes les écoles avant la fin de l’année scolaire. Un certain nombre d’établissements, s’étant déclarés engagés sur le dispositif lors de son expérimentation, en sont déjà dotés. Ce soutien, positivement reçu par les établissements qui ont parfois du mal à se doter en matériel sportif, soulève d’ores et déjà quelques problématiques logistiques.

Le fait que ces outils fassent appel à des sportifs ou aux célébrités de la jeune génération renvoie à des stratégies de communication. À travers cette volonté de démontrer le pouvoir de transformation sociale des Jeux, c’est la question de la légitimité de leur accueil qui est en jeu, sachant que l’évènement n’est pas sans provoquer des contestations citoyennes.

L’enjeu est d’autant plus fort pour les territoires au cœur de l’aventure Paris 2024. Ainsi, sous l’impulsion donnée par les acteurs intermédiaires : recteur, inspecteur académique et conseillers pédagogiques, nous pouvons observer un engouement particulier pour le dispositif dans l’académie de Créteil, qui est un de nos terrains d’étude. Celui-ci prend par exemple la forme de sessions de formation continue à destination des professeurs des écoles portant spécifiquement sur le dispositif.

Un « mille-feuille » de dispositifs scolaires

Si les acteurs éducatifs rencontrés dans nos enquêtes reconnaissent qu’il faut prendre en compte les problèmes de sédentarité, beaucoup questionnent la solution proposée. La critique principale porte sur l’accumulation des attentes institutionnelles. En effet, les « 30 minutes d’activité physique quotidienne » viennent compléter un « mille-feuille » de dispositifs : « Savoir nager », « Aisance aquatique », « Savoir rouler à vélo », les « éducation à » – éducation artistique et culturelle, développement durable – pour n’en citer que quelques-uns.

30 minutes d’activité physique à l’école (Le Mag de la Santé, 2022).

« Quand tout est priorité, plus rien n’est priorité », témoigne un conseiller pédagogique. Les injonctions plurielles auxquelles font alors face les enseignants ne sont pas étrangères au mal-être au travail qui touche cette profession. Par ailleurs, ces dernières années, les moyens humains et en formation pour accompagner l’enseignement de l’EPS ont été revus à la baisse, avec notamment la disparition provisoire de la formation continue en EPS du fait de la focale « maths-français » attendue sous le mandat de Jean Michel Blanquer.

Le Syndicat national de l’éducation physique (SNEP) questionne la création d’une nouvelle mesure qui prévaut sur la revalorisation de la discipline scolaire. Le déploiement du dispositif est en partie freiné par ces paradoxes qu’observent les conseillers pédagogiques départementaux en EPS. En charge de diffuser la commande ministérielle dans les écoles de leur département, certains investissent plus ou moins de temps pour son déploiement en fonction de leurs convictions relatives aux « 30 minutes d’activité physique quotidienne ».

Le choix du format du dispositif peut également être questionné à l’aune des études scientifiques. En effet, dans une méta-analyse portant sur 24 types d’interventions en école primaire à l’international, les chercheurs et chercheuses montrent qu’en moyenne cela ne participe pas à augmenter significativement le niveau d’activité physique des élèves. Lorsque des effets sont lisibles en termes de limitation de la sédentarité, ceux-ci restent minimes. Les préconisations s’orientent alors vers des interventions solidement conçues avec un suivi rigoureux dans le temps.

Interroger les transformations de comportements qu’impliquent les « 30 minutes d’activité physique quotidienne » est nécessaire. Cette procédure était inexistante lors de la phase d’expérimentation. Une plate-forme recensait alors les écoles déclarant s’engager dans le dispositif, les résultats peu concluants ont servi de base pour communiquer sur les retombées du dispositif. L’année à venir sera aussi celle du déploiement de procédures dévaluation du dispositif qui manquaient rigoureusement jusqu’à aujourd’hui.The Conversation

Fanny Raingeaud, Doctorante sociologie/STAPS, Université Gustave Eiffel et Cécile Collinet, Professeure de sociologie du sport, Université Gustave Eiffel

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Suicide d’un ado harcelé  à Poissy: la «défaillance» du rectorat pointée

18 Septembre 2023 , Rédigé par Libération Publié dans #Education

Suicide d’un ado harcelé  à Poissy: la «défaillance» du rectorat pointée

La lettre de l’académie de Versailles remise aux parents du jeune Nicolas avant qu’il ne se donne la mort le 5 septembre, et qui a fait «honte» à Gabriel Attal, pose la question de la responsabilité de l’institution, critiquée pour son manque «d’empathie».

Une lettre du rectorat de Versailles synonyme de «honte» pour le ministre de l’Education, Gabriel Attal. Un courrier «choquant»«une défaillance», pour la cheffe du gouvernement, Elisabeth Borne. Le 5 septembre, Nicolas, 15 ans, est retrouvé pendu dans sa chambre, alors qu’il avait alerté ces derniers mois sur une situation de harcèlement qu’il subissait dans le cadre scolaire. Au cours de l’année scolaire précédente, ses parents avaient dénoncé cette situation auprès de la direction du lycée professionnel des métiers Adrienne-Bolland à Poissy (Yvelines) où il était scolarisé et du rectorat de Versailles. Plutôt que du soutien, ils ont reçu une réponse du service juridique de ce dernier, jugeant les propos des parents de Nicolas «inacceptables» et les menaçant de poursuites judiciaires pour dénonciation calomnieuse.

Ces échanges de courriers, diffusés par la chaîne BFM TV, permettent de retracer le conflit avec l’administration sur la gestion du harcèlement subi par l’adolescent. «Mettez-vous à la place des parents de Nicolas qui ont écrit à l’institution […] et qui ont reçu ce type de réponse», a réagi Gabriel Attal, lors d’une prise de parole sur le perron de son ministère samedi. Une enquête administrative «pour déterminer toutes les responsabilités» des autorités scolaires doit être rendue d’ici une quinzaine de jours. «J’en tirerai toutes les conclusions, y compris en matière de sanctions», a-t-il ajouté. En parallèle, une enquête judiciaire a été ouverte par le parquet de Versailles, qui appelle à rester «très prudent» sur le lien qu’il pourrait exister entre ce suicide, intervenu alors qu’il venait de changer d’établissement, et le harcèlement scolaire dénoncé par Nicolas et sa famille.

«Incompréhensible»

C’est à l’issue d’un rendez-vous avec la direction de l’établissement le 10 mars qu’un courrier est envoyé par les parents de Nicolas, le 18 avril. Dans cette lettre, ils rappellent la «détresse» de leur fils et dénoncent «l’immobilisme» de l’équipe de l’établissement. Dans la même lettre, les parents informent également qu’«une main courante a été déposée au commissariat de Poissy» et qu’une plainte sera prochainement déposée. Ils concluent : «Il est incompréhensible que vous puissiez laisser un adolescent subir une telle violence verbale et psychologique sans réagir.»

Dans une longue réponse, deux jours plus tard, le proviseur de l’établissement liste les actions mises en place par l’établissement, notamment des entretiens réalisés avec les deux élèves désignés comme harceleurs. «L’établissement continuera à suivre et à traiter cette situation pour que la scolarité de votre fils se déroule au mieux et qu’il puisse s’épanouir», assure le responsable du lycée. Le courrier du rectorat de Versailles arrive deux semaines plus tard, le 4 mai : «Vous avez remis en cause les fonctions et menacé de dépôt de plainte le personnel de direction du lycée […]. Vous avez reproché à ce dernier sa passivité face à un supposé harcèlement.» Soit, une démarche que «réprouve de la façon la plus vive» le rectorat, pour qui «le professionnalisme et l’intégrité [des personnels de l’Education nationale] n’avaient pas à être remis en cause»

«Absence d’empathie»

Plusieurs responsables associatifs contactés par Libération s’insurgent également contre cette réponse du rectorat révélée samedi. Pour Hugo Martinez, ancienne victime de harcèlement scolaire et désormais responsable d’une association de lutte contre ce phénomène, la lettre du rectorat de Versaille est «l’image même de d’une absence de réponse» et constitue une «forme d’intimidation» des parents. «C’est très frappant de voir que la réponse de l’administration face à la souffrance, c’est une absence d’empathie. Rien dans le courrier du rectorat ne donne du crédit à la parole de la personne en souffrance», dénonce Arnaud Fabre, professeur de lettres dans un collège de Maisons-Alfort (Val-de-Marne), et membre du mouvement des Stylos rouges. «Il n’y a aucun espace de parole, aucun pôle thérapeutique, pour lutter contre la violence de ce fléau, l’institution est défaillante», estime pour sa part, Catherine Jacquet, vice-présidente de l’association Marion la main tendue.

«J’ai fait de la lutte contre le harcèlement la priorité absolue» mais «nous ne sommes toujours pas à la hauteur», a reconnu Gabriel Attal, lors de sa prise de parole, alors que 700 000 élèves sont en moyenne harcelés chaque année. Le ministre de l’Education doit réunir ce lundi «l’ensemble des rectrices et des recteurs, pour un audit dans l’ensemble des rectorats sur toutes les situations de harcèlement signalées aux rectorats sur l’année passée», avant l’annonce d’un plan interministériel prévu le 25 septembre.

par Ismaël Halissat et Juliette Deborde

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En maths, les évaluations de primaire favorisent-elles les inégalités de genre ?

15 Septembre 2023 , Rédigé par The Conversation Publié dans #Education, #Mathématiques

En maths, les évaluations de primaire favorisent-elles les inégalités de genre ?
En maths, les évaluations de primaire favorisent-elles les inégalités de genre ?
Nathalie Sayac, Université de Rouen Normandie

Les ministres de l’Éducation nationale se succèdent, mais les évaluations nationales en mathématiques et en Français réalisées en début d’année à différents niveaux de scolarité (CP, CE1, sixième, seconde, 1e année de CAP) se poursuivent. En 2023, elles se déroulent du 11 au 22 septembre et sont même étendues, pour cette rentrée scolaire, à de nouveaux niveaux (CM1, 4e).

Les enjeux restent les mêmes : fournir aux enseignants des repères des acquis de leurs élèves, doter les « pilotes » de proximité d’indicateurs leur permettant d’établir un diagnostic local et d’adapter leur politique éducative et, enfin, disposer d’indicateurs permettant de mesurer, au niveau national, les performances du système éducatif (évolutions temporelles et comparaisons internationales).

Ces évaluations font l’objet de Notes de synthèse publiées par la DEPP, qui mettent en avant les résultats spécifiques de chaque année, mais aussi leur évolution dans le temps. Le CSEN (Conseil Scientifique de l’Éducation Nationale) produit également des analyses de ces évaluations et propose des pistes de remédiation et des recommandations. Ces résultats sont également médiatisés et génèrent souvent, le temps de leur publication, des débats sur les chaines de télévision ou sur les radios.

Entre septembre et janvier, des écarts entre les résultats des filles et des garçons

Concernant les évaluations de début d’école élémentaire (CP et CE1), un triste constat est établi depuis quelques années : les résultats des filles en mathématiques à la mi-CP (janvier) s’écartent négativement de ceux des garçons alors même que, quelques mois auparavant, ceux de l’évaluation d’entrée au CP (septembre) ne révélaient aucun écart. Ces écarts se poursuivent, de manière encore plus marquée, au début du CE1.

Ce constat récurrent est surprenant car de nombreux travaux (CEDRE, TIMSS) ayant mis en évidence des écarts de performance en mathématiques entre filles et garçons les ont plutôt situés à la fin de l’école élémentaire, qu’au début (seule l’étude Elfe a dernièrement révélé des écarts de performance en mathématiques au CP).

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Ce qui interpelle, c’est qu’entre le début de CP (septembre), où aucun écart de résultats entre les filles et les garçons n’est constaté et la mi-CP (janvier), où des écarts apparaissent, seulement quatre mois se sont écoulés. Comment est-il possible qu’en seulement quatre mois de fréquentation d’école élémentaire, les filles aient de moins bonnes performances en mathématiques que les garçons ?

Quelles peuvent être les causes de ces écarts constatés à chaque cohorte d’élèves entrant à l’école élémentaire depuis 2018 ? Et quelles peuvent être les conséquences de leur large diffusion auprès des élèves, des parents et des enseignants car, comme s’interrogeait déjà Charles Hadji en 2020 sur The Conversation, « dans quelle mesure ces évaluations de début d’année peuvent être bénéfiques, pour qui, et de quel point de vue » ?

Pression évaluative et stéréotypes de genre

Pour comprendre ce triste constat, on ne peut se contenter de l’appréhender de manière simpliste car il résulte d’une conjonction de facteurs qui interagissent entre eux à un moment scolaire très spécifique : l’entrée à la « grande école ». Pour le CSEN « c’est bien la scolarisation, et non l’âge, qui cause cet écart », mais qu’y a-t-il derrière cette « scolarisation » et doit-on incriminer une seule cause ?

Plusieurs pistes peuvent être avancées pour comprendre ce décrochage précoce des filles. D’abord, les filles intègreraient plus rapidement que les garçons les codes scolaires de la « grande école » avec cette pression évaluative qui est caractéristique de l’école française. Plus sensibles à cette pression à partir de l’évaluation de mi-CP, elles réussiraient donc moins bien. Cette pression pourrait être plus forte à la mi-CP et au CE1 qu’au début du CP où les enseignants, conscients d’accueillir des « petits de maternelle », seraient plus attentifs à créer un climat d’évaluation non anxiogène.

Par ailleurs, la nature et le protocole de passation sont à questionner dans la mesure où certains exercices proposés dans ces évaluations pourraient également contribuer à angoisser davantage certains élèves du fait de leur caractère inédit à l’école primaire (par exemple, une série de 15 calculs à effectuer en 7 minutes).

Autre piste à considérer : la question de la construction de l’identité genrée des élèves doit également être considérée car, même si elle est d’une grande variabilité selon les élèves et les contextes sociaux et familiaux, on sait que très tôt (vers 2-3 ans), les enfants sont capables de s’identifier en tant que fille ou garçon et que vers 6-7 ans, ils/elles seraient en mesure de reconnaitre le caractère immuable de l’appartenance à un groupe de sexe.

On pourrait donc penser que les filles, conscientes d’appartenir à un groupe qui subit le stéréotype prégnant de prédominance masculine en mathématique, seraient sous la « menace du stéréotype » qui en découle et pourraient ainsi sous-performer aux évaluations de mathématiques à partir de la mi-CP où elles ont toutes au moins 6 ans.

Une troisième piste est enfin à envisager. Dans les années 90, les travaux de Nicole Mosconi et ceux de Marie Duru-Bellat ont montré que les différences de performance entre les filles et les garçons en mathématiques ne pouvaient s’expliquer sans prendre en compte ce qui se passait dans les classes, et notamment la façon dont les enseignants y faisaient vivre les mathématiques. On pourrait donc également supposer que les pratiques des enseignants de CP et de CE1, empreintes inconsciemment de stéréotypes sexués, contribueraient à rendre les filles moins sûres d’elles en mathématiques et donc à les faire moins bien réussir, dès quelques mois d’école élémentaire.

Les effets de communication des résultats des évaluations

Pour tenter d’enrayer ce décrochage précoce des filles, il convient également, au-delà des pistes de compréhension évoquées ci-dessus, de s’intéresser à la communication qui en est faite.

Alors que les constats de prédominance masculine en mathématiques ne font, scientifiquement, pas l’unanimité (une méta-analyse américaine portant sur 242 études publiées entre 1990 et 2007, et concernant 1 286 350 individus a montré que les filles et les garçons avaient des performances similaires en mathématiques), une communication excessive de l’institution scolaire et des médias pourrait s’avérer encore plus préjudiciable à la réussite des filles en mathématiques en posant comme un fait avéré et prouvé que les filles réussiraient moins bien en mathématiques que les garçons dès le plus jeune âge et donc fatalement pour toute leur scolarité.

Un cercle vicieux fatalement défavorable aux filles en mathématiques se développerait alors : plus le stéréotype de suprématie des garçons en mathématiques serait conforté par des résultats à des évaluations standardisées en mathématiques, plus il engendrerait des comportements de menace du stéréotype de la part des filles et des attitudes ou pratiques inégalitaires de la part des enseignants, parents et institutionnels et in fine, aboutirait à des résultats encore plus différenciés entre les filles et les garçons en mathématiques.

Or, les évaluations standardisées ne sont que des photographies des connaissances des élèves prises à un instant T, sous un angle µ. Il serait dommageable, voire fatal, pour la réussite de tous les élèves, de les prendre pour un reflet exact de leurs connaissances.The Conversation

Nathalie Sayac, Professeure des universités en didactique des mathématiques, directrice de l’Inspe de Normandie Rouen-Le Havre, Université de Rouen Normandie

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Harcèlement à l'école : le ministre de l'Éducation veut soumettre tous les élèves à un questionnaire

14 Septembre 2023 , Rédigé par France Inter Publié dans #Education

Harcèlement à l'école : le ministre de l'Éducation veut soumettre tous les élèves à un questionnaire

Invité d'un débat sur M6 mardi soir, Gabriel Attal a dit travailler à la mise en place d'un questionnaire pour tous les élèves, afin de repérer rapidement ceux qui subissent et ceux qui causent du harcèlement dans leur établissement. Il souhaite aussi une meilleure formation des adultes.

Alors qu'un plan de lutte interministériel contre le harcèlement scolaire doit être présenté fin septembre, le ministre de l'Éducation a dressé quelques pistes lors d'une soirée spéciale suivie d'un débat sur M6. Il estime notamment qu'il faut permettre aux élèves de déterminer et de signaler s'ils sont victimes de harcèlement.

"On doit être beaucoup plus capable de détecter des signaux faibles. Je voudrais qu'on arrive à mettre en place un système où l'ensemble des élèves s'auto-évaluent sur la question de savoir s'ils sont harcelés ou pas", a-t-il expliqué. Principal outil de cette politique, une "forme de questionnaire d'auto-évaluation qui pourrait être proposé à tous les élèves", élaboré avec des experts dans le domaine.

Il milite également pour "une forme d’électrochoc collectif", avec une "réaction plus rapide" et des «sanctions beaucoup plus claires" contre les harceleurs. "Il vaut mieux une sanction légère plus tôt, qu'une sanction grave qui arrive trop tard", estime-t-il. Depuis la rentrée, il est notamment possible de transférer un élève responsable de harcèlement scolaire dans une autre école, pour épargner ce changement à la victime.

Former les représentants de parents d'élèves

Gabriel Attal souhaite aussi que les adultes soient mieux formés à la détection de ces situations potentiellement dramatiques, notamment les représentants de parents d'élèves qui pourraient bénéficier "d'une formation plus importante sur ces questions""Ils sont les interlocuteurs d'autres parents, des familles. Les former à ces questions fait sens", précise l'entourage du ministre à l'AFP.

Engagée par son prédécesseur Pap N'Diaye suite à plusieurs épisodes tragiques (dont le suicide de plusieurs adolescents depuis le début de l'année, y compris un garçon de 15 ans dès la semaine de la rentrée), la lutte contre le harcèlement scolaire est présenté comme une priorité par le ministère de l'Éducation.

Rédaction numérique de France Inter

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Qui veut encore être enseignant ?

14 Septembre 2023 , Rédigé par France Culture Publié dans #Education

Qui veut encore être enseignant ?

Les enseignants manquent à l'appel : cette rentrée, comme celle de 2022, est marquée par un grand nombre de postes à pourvoir dans l'enseignement. Comment expliquer cette désaffection ? Entre conditions matérielles et considération sociale, retour sur une profession qui attire de moins en moins.

Avec

Géraldine Farges Sociologue, maîtresse de conférences en sciences de l'éducation et de la formation à l'Université de Bourgogne Franche-Comté

A écouter en cliquant ci-dessous

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Quand devenir enseignant, c’est accepter un déclassement social

13 Septembre 2023 , Rédigé par The Conversation Publié dans #Education

Quand devenir enseignant, c’est accepter un déclassement social
Quand devenir enseignant, c’est accepter un déclassement social
Frédérique Giraud, Université Paris Cité

Peut-on encore rêver de devenir enseignant en 2023 ? Alors que les pénuries de candidats dans le second degré sont un refrain de la rentrée depuis plusieurs années, le primaire, sauf en région parisienne, semble moins touché. Les masters de l’enseignement, de l’éducation et de la formation (MEEF) remplissent leurs filières et, au-delà de jeunes ayant toujours rêvé de devenir professeur des écoles, accueillent aussi des professionnels en reconversion.

Parfois même deviennent enseignants, après avoir occupé un autre emploi, des personnes ayant connu des emplois bien plus rémunérateurs, comme le montrent les travaux de la recherche sur les carrières atypiques. Devenir enseignant peut revenir dans certains cas à accepter un déclassement social.

Arrêtons-nous sur les choix de ces enseignants qui arrivent tardivement dans le métier. Quelles sont les conditions qui les permettent ? Comment ces enseignants reconvertis qui occupaient des postes à responsabilité vivent-ils leur nouvelle condition professionnelle ? À travers ces questions, il s’agit également d’éclairer certaines modalités de l’engagement dans l’Éducation nationale.

Le sentiment de « passer à côté » de sa vie

Prenons le cas de Romain, qui illustre bien la situation de ces très bons élèves dont l’orientation n’a pas été vraiment réfléchie : « On me disait que je pourrais faire une prépa, puis une école. […] L’idée, c’était qu’ingénieur, c’était mieux que prof. Et, de fait, c’était mieux payé ». Arrivé à un poste de directeur commercial dans une entreprise de produits pétrochimiques, il perçoit un « salaire fantastique ». « Mais je me disais : “À part le salaire, est-ce que j’ai toujours envie de rester là ?”, raconte-t-il ».

Même discours du côté de Ludovic, devenu enseignant après 15 ans comme directeur dans une entreprise pharmaceutique :

« Je réussissais bien à l’école, j’avais un profil plutôt scientifique, j’ai fait des classes prépas, puis une école d’ingénieur. C’était quelque chose d’assez logique, je me suis jamais posé le temps de ce que vraiment j’avais envie de faire. »

L’un comme l’autre a été rattrapé par le sentiment de « passer à côté de leur vie », comme nous le dira Ludovic et c’est après avoir fait leurs preuves dans un premier métier que l’enseignement est apparu comme une reconversion possible. Tentés par cette voie pendant leurs études, ils ne s’étaient pas autorisés à y aller, trouvant ce métier trop peu valorisé et rémunéré.

Aujourd’hui enseignante en CM2 dans une école en REP, après 18 ans comme contrôleuse technique dans le bâtiment, où elle dirigeait une équipe de cinq hommes, Christelle reconnaît que l’enseignement « était déjà une option » quand elle était jeune, mais que ses parents et profs lui avaient dit de « ne pas s’arrêter à ça ».

Ainsi, chez tous nos enquêtés, le métier d’enseignant n’apparait pas comme une voie d’orientation suffisamment légitime en sortant du lycée, parce qu’ils sont très bons élèves, soit qu’ils se sentent ainsi investis familialement de la charge de réaliser des études universitaires lorsqu’ils sont le ou la seule de la fratrie à faire des études supérieures, soit qu’ils s’inscrivent dans une fratrie où faire des études est la norme.

Mais, au moment de faire les comptes de leur engagement dans leur premier métier, la condition enseignante est réévaluée au regard des contraintes ressenties jusqu’alors. Myriam évoque la volonté de rompre avec « la course éperdue au chiffre d’affaires » : « j’ai bossé en tant qu’ingénieure pendant 20 ans et puis au bout d’un moment, l’aspect humain de ma personnalité est venu me rappeler que c’était sympa de faire des calculs et des choses techniques mais que j’avais besoin de trouver une relation à l’autre, d’échanger des choses ».

Perte de salaire mais niveau d’études reconnu

Chez nos enquêtés, l’une des conditions de possibilité à l’engagement dans une carrière enseignante est le fait d’avoir préalablement réussi professionnellement dans une première carrière, d’avoir en quelque sorte déjà fait leurs preuves. Bénédicte l’affirme assez explicitement :

« Quelque part, je suis contente d’avoir pu avoir dire qu’un jour, j’ai gagné mieux ma vie que mon compagnon. C’est quelque chose qui était important pour moi, et je pense que si j’avais pas vécu ça, j’aurais pas pu faire ce choix de devenir enseignante, ça m’aurait manqué en tant que femme, de prouver que je vaux mieux qu’un homme, enfin en tant que valeur monétaire salariale ! »

Fabrice, ingénieur biomédical dans une grosse entreprise avant sa reconversion, assume :

« Grosso modo, j’avais plus rien à prouver dans mon domaine et je voulais un boulot qui me permette de concilier la vie professionnelle et vie familiale – c’est ça la vraie raison. »

Si cette reconversion est le résultat d’une quête de sens et de valeurs, ce métier offre aussi un certain nombre de caractéristiques soutenant la reconversion. La perte de salaire peut être justifiée pour soi, mais aussi revendiquée pour les autres au nom de valeurs décroissantes à l’instar de Romain, qui revendique « des convictions par rapport à l’écologie, l’environnement et même la décroissance. A quoi ça sert d’avoir une voiture à 50 000 euros si j’ai une voiture à 3 000 euros qui fait parfaitement l’affaire ? », remarque-t-il.

Devenir enseignant revient certes à diviser son salaire par deux ou trois mais ne conduit pas à perdre son niveau d’études. Comme l’explique Romain, « ce qui a facilité cette reconversion, je pense, c’est aussi qu’il faut bac +5 pour être professeur d’école ». Même s’il gagne moins qu’en tant qu’ingénieur, son bac +5 reste reconnu ». Notons que les récentes déclarations du président Macron voulant des concours enseignants recrutant à bac+3 vont à rebours des motivations affichées ici.

Pour autant, les récits de nos enquêtés montrent que leur reconversion ne va pas de soi pour leur entourage. « C’était inimaginable, c’était une folie » : c’est en ces termes que Romain décrit la réception par ses collègues de l’annonce de sa reconversion. Cette « folie » a trait notamment à la pente volontairement descendante de sa carrière, « alors même que du côté des patrons, tous les voyants étaient verts » puisqu’ils voulaient lui proposer de prendre en charge un nouveau secteur géographique en plus de ceux déjà gérés.

Justifier sa reconversion auprès de son entourage

Pour réhabiliter leur choix de ce métier, ces enseignants doivent démontrer qu’ils n’y viennent pas pour de mauvaises raisons. Il leur faut justifier un choix qui apparait comme improbable et, en conséquence, relativement incompris voire perçu avec méfiance. Comme l’explique Christelle : « j’ai divisé mon salaire par trois à peu près. Il y a une forme d’incompréhension : pourquoi est-ce qu’elle est venue ? Qu’est-ce qu’elle vient chercher dans l’éducation ? Pour qui elle se prend ? » Nombreux sont nos enquêtés à avoir rapporté de telles remises en question.

Une première parade consiste à romancer sa vocation pour l’enseignement. La faire remonter à l’enfance, mettre en scène les expériences de formation accumulées pendant ses études, voire même au sein de son premier métier. Manière de justifier qu’on vient à l’enseignement avec un peu d’expérience et surtout une solide appétence.

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Nos enquêtés n’hésitent pas également à valoriser toutes leurs autres expériences professionnelles comme des outils au service de leur pédagogie. Sabine a « dû remettre les pendules à l’heure » de sa propre mère qui avait « un peu de mal à digérer car elle m’avait payé des études à Paris, et je fais complètement autre chose… je lui ai dit que ce que j’avais appris n’était pas perdu, que je l’utilisais tous les jours et ne serais pas la même enseignante si je n’avais pas fait ce que j’ai fait comme études ! »

Nos enquêtés font de leur entrée tardive dans le métier une plus-value qui les distingue des autres enseignants. En promouvant leurs expériences tirées de l’entreprise en classe, nos enquêtés interrogent la définition du métier. Bénédicte a dit à ses filles de ne pas devenir professeurs des écoles à 22 ans » : « Vous devez aller voir ailleurs d’abord, ce n’est pas bon de ne jamais sortir de l’école ».

La valorisation des enseignants ayant eu d’autres expériences apparait comme un moyen de valoriser leur parcours de reconversion pour en faire un facteur de légitimité. Le fait d’être parent est aussi utilisé comme un faire-valoir. Ils aspirent ainsi à la reconnaissance qu’ils ne sont pas « partis de rien », comme le note Coralie : « Le fait d’avoir des expériences humaines différentes, c’est aussi une richesse par rapport aux relations avec des parents parfois » qui peut être revendiquée auprès des enfants.The Conversation

Frédérique Giraud, Maîtresse de conférences en sociologie, Université Paris Cité

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Puy du fou : les médias d’extrême droite en croisade contre «Complément d’enquête»

13 Septembre 2023 , Rédigé par Libération Publié dans #Education, #Histoire, #Médias

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Le dernier numéro de l’émission d’investigation de France 2, qui se penchait sur les secrets du parc à thème, a provoqué dans les jours qui ont suivi une levée de boucliers des médias Bolloré dans le sillage d’une plainte de Philippe de Villiers.

Oyez, oyez ! Il faut sauver le joyau de la couronne réactionnaire. Ces derniers jours, toute l’extrême droite médiatique s’est unie dans un valeureux combat, une héroïque campagne de défense du Puy du fou, objet d’un récent numéro de Complément d’enquête concocté par ces vils journalistes gauchistes de France 2. CNews, Europe 1, le JDD, mais aussi le Figaro ou la revue Front populaire de Michel Onfray… tous les mousquetaires du conservatisme, qui mènent la bataille culturelle réactionnaire sur les plateaux télé depuis une bonne décennie, sont venus au secours du parc à thème vendéen et de son fondateur Philippe de Villiers. Un véritable contre-feu, qui rappelle les campagnes de riposte au printemps contre les ministres Rima Abdul Malak et Pap Ndiaye, après qu’ils ont critiqué les chaînes de télé de Vincent Bolloré, CNews et C8. Parmi les points soulevés par le Complément d’enquête diffusé jeudi et contestés par ses opposants : un recours au bénévolat jugé abusif avec des soupçons de travail dissimulé, l’expansion du parc dévorant les terres agricoles alentour, ou le combat culturel contre-révolutionnaire qui anime le Puy du fou depuis ses débuts.

Première à dégainer : Eugénie Bastié, certainement détentrice d’un pass annuel au «Puyduf», s’est livrée dans le Figaro jeudi matin à un panégyrique de la création de Philippe de Villiers. Le Complément d’enquête n’a alors même pas encore été diffusé, et il n’est mentionné que de manière évasive dans l’article (par des «reportages à charge» qui n’affecteraient nullement Philippe de Villiers), histoire de ne pas lui faire trop de publicité : on semble bien avoir affaire à un écran de fumée pour détourner l’attention de l’enquête de France 2. Le plan com était d’ailleurs savamment rodé : le Puy du fou venait justement de publier quelques jours auparavant un communiqué de presse vantant des chiffres de fréquentation record (2,5 millions de visiteurs), avant même la fin de sa saison, censée se terminer en novembre. Alors dans le Figaro, Eugénie Bastié n’a plus qu’à réciter la légende maintes fois contée du parc, ses bénévoles, sa «secrète alchimie entre tradition et modernité», la «magie des lieux» qui en feraient un «anti-Disney», le parc préféré des méchants wokes déconstructionnistes.

«Petits docteurs guillotins»

Vendredi, la journaliste a aussi éhontément recyclé son article dans une chronique sur Europe 1, jugeant cette fois le travail de Complément d’enquête «particulièrement malhonnête et venimeux». Son compère Mathieu Bock-Côté a tenu à peu près les mêmes propos, dans sa chronique du FigaroVox mais aussi sur CNews : «Complément d’enquête ne cherchait pas la vérité mais cherchait le scandale.»

Autre fantassin lancé contre l’émission de France 2 : Pascal Praud. Dès vendredi, son Heure des pros sur CNews accueillait Nicolas de Villiers, fils de Philippe de Villiers et président du Puy du fou, pour une demi-heure de SAV du parc vendéen, «un triomphe français». «Ça va s’arrêter un jour ?» s’emporte Praud après avoir diffusé la bande-annonce de Complément d’enquête. Le présentateur n’a visiblement pas regardé l’émission, mais qu’importe, il faut taper, en plus c’est «payé avec l’argent du contribuable», argument imparable. Une heure plus tard, Pascal Praud prolonge sur Europe 1 pour une quinzaine de minutes l’interview du fils de Villiers (pratique, ça fait des économies de programmation). Celui-ci répétera les mêmes éléments de langage sur le bénévolat, un «défaut» hérité des débuts du parc mais qui «irrigue l’esprit même de la maison Puy du fou». L’animateur, lui, conspue les «petits docteurs Guillotin» du service public, une formule là aussi recyclée puisqu’on la retrouve aussi le dimanche dans son impayable édito à la fin du JDD. Est visé le journalisme d’investigation qui aurait «une ambition, une volonté : faire tomber des têtes, attaquer les puissants, mettre à bas le système». La terreur, quasiment le stalinisme.

Le Journal du dimanche s’est en tout cas donné de la peine pour venir au secours du Puy du fou. Que le nouveau directeur de la communication du parc, Bastien Lejeune, soit le frère du nouveau directeur de la rédaction du JDD, Geoffroy Lejeune, comme nous l’apprend un article de Charlotte d’Ornellas, n’y est sans doute pas pour rien. «Cas d’école d’une manipulation médiatique», titre le journal sur deux pages, illustré d’une magnifique… capture d’écran de Complément d’enquête sur la plateforme France.tv – le JDD fait dans le low-cost niveau icono, on le savait depuis le premier numéro. Dans son article, Charlotte d’Ornellas tente de démonter point par point l’émission de France 2, tandis que l’avocat pilier de CNews Gilles-William Goldnadel annonce que son client Philippe de Villiers poursuit en justice la chaîne pour un «déni négationniste» du «génocide vendéen». Bon courage à lui, le consensus des grands historiens de la Révolution française (Lebrun et Vovelle entre autres) ayant totalement démonté la construction réactionnaire de Secher et Chaunu depuis le mitan des années 80.

Deux visions du journalisme s’affrontent

Enfin, c’est Michel Onfray qui se fend aussi d’une tribune dans cette double page du JDD. Le «philosophe le plus populaire de France», dixit l’hebdomadaire, «se porte candidat pour être bénévole» au Puy du fou, «cette machine à pulvériser les passions tristes de la gauche culturelle». Sa propre publication, la revue Front populaire, a pris sa part dans la riposte avec un édito du cofondateur Stéphane Simon. Autre titre d’extrême droite à faire de la retape pour le Puy du fou, «Boulevard Voltaire», qui voit dans le numéro de Complément d’enquête un «procès creux et bas de plafond». La campagne pourrait bien ne pas s’arrêter là. Sur CNews ce lundi, Cyril Hanouna a annoncé préparer une émission d’enquête sur… Complément d’enquête (et qui s’appellerait Enquête de complément, le bingo est rempli). Avec l’ancien présentateur du programme de France 2 aux manettes, Jacques Cardoze, une recrue récente de TPMP. Une autre méthode de défense puisque Hanouna fera en effet lui aussi l’objet d’un numéro de Complément d’enquête, censé être diffusé avant la fin de l’année.

Que signifie cette contre-offensive des médias d’extrême droite ? Au-delà de la défense rudimentaire d’un des joyaux de la couronne du combat culturel réactionnaire, on peut y observer, comme le souligne France Inter, deux visions du journalisme qui s’affrontent : celle du journalisme de pur commentaire contre le journalisme d’investigation, qui demande du temps et qui est souvent «matière à emmerdements». Vincent Bolloré l’avait bien compris, lui qui avait décidé d’arrêter le journalisme d’investigation dès sa prise de pouvoir sur Canal +, avec la fin de Spécial Investigation en 2016, pour ne pas froisser ses partenaires commerciaux. Mais, en créant autant de bruit médiatique autour de ce Complément d’enquête, la presse réac pourrait bien lui avoir fait une publicité inattendue, un pur effet Streisand. Lundi, le numéro de l’émission sur le Puy du fou était ainsi le cinquième programme le plus regardé sur la plateforme France.tv.

Adrien Franque

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