Un amour, une émeute, un poème - Un fragment du bonheur au travers de 28 voix adolescentes
Entre les mains d'Estée Sébastien Berlendis
Qu'est-ce que la vie heureuse ? Les élèves de la classe de philosophie de Sébastien Berlendis livrent un souvenir d'un événement qui s’est invité dans leur existence au point de la bouleverser. Le philosophe Alain Badiou séquence trois événements : un amour, une émeute, un poème...
Une Expérience signée Sébastien Berlendis, réalisée par Jean-Philippe Navarre
Sébastien Berlendis est professeur de philosophie dans un lycée de la banlieue lyonnaise. Avec ses élèves de terminale, ils partagent un cours consacré à la notion de bonheur. Ils sont avec le philosophe Alain Badiou qui entend redéfinir la vie heureuse ou le bonheur réel comme il le dit. Pour Alain Badiou, le bonheur réel est très éloigné des satisfactions ordinaires et confortables, très éloigné d’une vie placée sous le seul angle du calcul. Le bonheur est, selon lui, tributaire de rencontres hasardeuses, de rencontres qui font événement. Et elles font événement car elles nous déroutent, nous font sortir du cours ordinaire des choses, ou du train du monde. Pour illustrer son propos, Alain Badiou retient trois événements, trois rencontres : "un amour, une émeute, un poème".
Les élèves sont marqués par ces trois mots, et Sébastien Berlendis a alors très vite le désir de leur demander quel événement -amoureux, politique, social ou artistique- s’est invité dans leur existence au point de la bouleverser.
Ce documentaire fait entendre leur parole souvent enregistrée à la lisière de la forêt qui borde le lycée. Il y est question d’émeutes au sens propre du terme, de bouleversements plus intimes et souvent amoureux. Billie Eilish côtoiera Le grand bleu, Robert Frank les Fragments d’un discours amoureux. On entendra les beaux noms de Stella Plage, de Belle-Ile-en-Mer, du piano et du chant grégorien. 28 voix, 28 fragments dessineront un portrait sensible de l’adolescence.
Générique
Avec les élèves de la classe de terminale : Aleksandre Barras, Zoée Vanneuville, Nicolas Lefebvre, Baptiste Payerne, Jules Souvignet, Lou Carrel, Matisse Guillot, Alice Merlin, Juliette Martin, Irmine Cadieu, Myriam Couallier, Constance Bret, Léna Schaditzki, Christophe Parmentier, Zion Borius, Antoine Vandemarlière, Estée Subtil, Hugo Martayan, Théo Buisson, Lukas Ruffenach, Gabriel Séverin, Malo Badoil, Ylan Foret, Antoine Cilas, Jean-Baptiste Vrel, Méva Andriamandroso, Mathieu Gonzalez et Emma Mantoux
Cette Expérience n’aurait pu exister sans les mots et l'engagement de ses élèves
Mixage : Julie Garraud
Réalisation : Jean-Philippe Navarre
Une création sonore de Sébastien Berlendis
Remerciements
Un grand merci à David Godard et Marie-Hélène Dionnet, ainsi qu'à Alain Badiou et Martin Duru.
Merci également à chacun des élèves de terminale.
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Un amour, une émeute, un poème - Un fragment du bonheur au travers de 28 voix adolescentes
Qu'est-ce que la vie heureuse ? Les élèves de la classe de philosophie de Sébastien Berlendis livrent un souvenir d'un événement qui s'est invité dans leur existence au point de la bouleverse...
Cher-e-s ami-e-s...
C'est la fin des vacances et je reprends la route demain pour retrouver la Normandie...
Le blog reprendra la sienne à partir de lundi.
D'ici-là portez-vous bien !
CC
Coup de coeur... Nathaniel Hawthorne...
Dans la lumière du petit matin, Aylmer ouvrait les yeux sur le visage de sa femme et y voyait le symbole de l'imperfection. Le soir, lorsqu'ils s’asseyaient devant la cheminée, son regard se posait furtivement sur sa joue et contemplait, dans la clarté vacillante des flammes, la main spectrale où s'inscrivait le signe de la mortalité là où il aurait aimé trouver un objet d'adoration. Georgiana prit l'habitude de tressaillir sous son regard. Il suffisait d'un coup d’œil sur l'expression étrange de son visage pour que le rose de ses joues se transforme en une pâleur cadavérique, sur laquelle la main rouge ressortait d'autant plus intensément, tel un bas-relief en rubis sur le plus blanc des marbres.
Nathaniel Hawthorne - Wakefield
Troubles de l'apprentissage : quand des enseignants se moquent sur les réseaux sociaux des élèves en difficulté
Des signalements ont été transmis au ministère de l’Éducation nationale à l’encontre d’un petit noyau d’enseignants très actifs sur les réseaux sociaux, a appris franceinfo. Sous couvert d’humour et le plus souvent sous pseudo, ces profs suivis par des milliers d’abonnés se moquent régulièrement d’élèves dyslexiques ou atteints de troubles cognitifs au nom de leur refus de l’école inclusive.
Emmanuel Macron évoquait, mercredi 26 avril, "une révolution silencieuse de l'inclusion à l'école" lors de la 6e Conférence nationale du handicap. Cette politique a permis de scolariser "430 000 élèves" selon le chef de l'État, mais elle fait l'objet d'une forte contestation d'une partie du monde enseignant, en particulier sur Twitter.
Les élèves "DYS" principalement ciblés
Fin février, après une série de tweets visant des élèves en difficulté, Géraldine Chavrier décide de saisir le secrétariat d'État chargé des personnes handicapées. Depuis plusieurs mois, cette juriste et maman d'une fille diagnostiquée TDAH, trouble déficit de l'attention, sans hyperactivité est choquée par de violents tweets visant les élèves en difficulté.
Cible principale de ces tweets, les "DYS" (dyslexiques, dysphasiques, etc.) qui ont des difficultés à lire, orthographier, calculer, s'orienter ou parler. Après quelques recherches, elle comprend que l'un des principaux auteurs de ces tweets n'est autre qu'un enseignant sous pseudo qui, selon nos informations, est professeur de français d'un collège public du Calvados. "Je suis tombé sur deux tweets d'un enseignant qui se moquait des enfants TDH et de l'alcoolisme supposé de leurs mères, raconte Géraldine Chavrier. J'ai fouillé davantage et j'ai été stupéfaite de tomber sur un nombre considérable de messages concernant les DYS, les TDHA et leurs parents."
"Ce sont des messages sur le ton de l'humour, mais souvent tournés vers l'humiliation de l'enfant ou du parent. Je trouve ça légitime de débattre de l'école inclusive mais, là, ça va plus loin. C'est pourquoi j'ai fait un signalement."
Géraldine Chavrier
à franceinfo
Interrogé par franceinfo, le ministère de l'Éducation nationale confirme avoir été saisi. Une inspection académique a été déclenchée localement. Elle a débouché sur "un rappel formel de l'enseignant à ses obligations" sans prononcer de sanctions.

Dans l'historique en ligne, ou effacé, du compte Twitter de cet enseignant ouvert en août 2012, les élèves en difficulté sont l'objet depuis 2018 et jusqu'à récemment de fréquentes moqueries "likées" par un grand nombre d'enseignants. Les parents d'élèves DYS ou TDAH sont également présentés par ce professeur comme des personnes qui prétextent ou exagèrent le handicap de leurs enfants pour justifier des difficultés d'élocution ou d'orthographe. Ainsi, dans un tweet toujours en ligne "liké" 563 fois, on peut lire : "Je viens de finir mon étude sur les élèves TDAH. De manière très surprenante, 90 % de ces enfants ont des parents qui ont oublié de les éduquer".

Sur un autre tweet, l'enseignant scénarise sa classe et dit : "Aujourd'hui, projection de la dictée d'un élève DYS. Que les parents se rassurent : j'avais précisé aux élèves normaux qu'ils pouvaient détourner le regard".

Un rejet des politiques dites "inclusives"
Mais le cas de ce professeur de français hostile aux élèves "DYS" ne semble pas isolé. Depuis plusieurs années, un petit noyau d'enseignants très politisés pratiquent sur Twitter un humour frondeur, référencé et très transgressif pour faire passer leur vision de l'éducation. Le plus souvent sous pseudo, ces professeurs suivis par des milliers d'abonnés critiquent régulièrement ce qui se rapporte aux politiques inclusives et n'hésitent pas à dénigrer leurs contradicteurs, enseignants ou personnels de l'éducation, qu'ils surnomment les "pédagogistes".
Un inspecteur de l'éducation nationale qui souhaite garder l'anonymat, a fait l'objet de violentes attaques sur les réseaux sociaux. Il dit avoir alerté sa hiérarchie, et même saisi la justice administrative et pénale. Sa dernière plainte pour harcèlement en ligne date de janvier 2022. Elle concerne quatre enseignants dont l'un d'eux, enseignant dans le Bas-Rhin, est visé par le récent signalement au sujet des élèves DYS. Dans la plainte consultée par franceinfo, l'inspecteur explique que "depuis la fin 2018, une poignée d'enseignants déversent sur les réseaux sociaux, principalement Twitter, des contenus et se focalisent sur toutes mes publications pour me diffamer et divulguer des informations privées sur le réseau comme à mon employeur. Ils m'insultent par exemple de 'con', 'connard', 'sombre merde', etc."
"C'est une meute de professeurs bien connus sur les réseaux sociaux. J'ai reçu des lettres anonymes, dont trois à mon domicile, qui reprennent les tweets de ce groupe. Tout cela a eu un impact sur ma famille."
Plainte de l'inspecteur
Selon nos informations, la mère d'un autre enfant TDHA a porté plainte en 2022 devant le tribunal judiciaire de Créteil contre deux enseignants pour des raisons similaires. Géraldine Chavrier explique avoir également fait l'objet d'une forme de pression numérique et d'insultes sur les réseaux sociaux de la part de ce petit groupe d'enseignants. Interrogé par franceinfo, la direction des ressources humaines du ministère déclare "ne pas avoir connaissance de phénomène de bandes virtuelles et d'un réseau constitué d'enseignants à l'origine de tels agissements". Elle rappelle aussi que les enseignants sont en théorie astreints à un devoir de réserve et à une discrétion professionnelle.
Un groupe auto-surnommé "les consternants"
Plusieurs journalistes ont par le passé déjà documenté l'activité de profs "haters" sur les réseaux sociaux, dont Slate ou le Nouvel Obs. Mais c'est le journaliste Julien Pouyet du quotidien Nord Littoral qui a le plus enquêté sur ce groupe en particulier auto-surnommé "les consternants". Son article, intitulé "Harcèlement: des enseignants dénoncent une Ligue du Lol dans l'Éducation nationale", lui a valu une plainte pour diffamation de la part de l'un de ces enseignants. Plainte finalement classée sans suite. Le journaliste estime lui aussi avoir subi une forme de harcèlement en ligne suite à la publication de ses articles.
En toile de fond de ces tweets parfois au vitriol de cette minorité d'enseignants, le rejet par une partie de la communauté éducative de l'école inclusive et des différents programmes de l'Éducation nationale pour ouvrir les classes ordinaires aux élèves handicapés. Dans les tweets visés par ces signalements, les différents programmes d'aménagements d'accompagnement des élèves handicapés (PAP, PPS, etc.) ou le travail des auxiliaires de vie scolaire (AVS) sont régulièrement dénigrés sous le hashtag "#ecoleinclusive" ou "#sauvonslesDYS".
"Ces propos heurtent beaucoup de professionnels de l'éducation, des élèves et des parents d'élèves concernés par les enjeux de l'inclusion à l'école, mais ils ne sont pas révélateurs de la majorité du milieu enseignant", insiste Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale du syndicat Sgen-CFDT Éducation. La syndicaliste reconnaît que le débat est tendu entre professeurs sur le sujet : "Ce que nous constatons, c'est que l'école inclusive dans les conditions dans lesquelles elle est mise en œuvre depuis quelques années par l'Éducation nationale amène beaucoup de collègues à éprouver de la souffrance au travail. Ça se ressent dans les registres santé et sécurité au travail. On le lit aussi à longueur de rapports des médiateurs et médiatrices de l'Éducation nationale."
Stéphane Pair
Enseignement privé et ségrégation scolaire
EXTRAIT
Les établissements d’enseignement privé contribuent fortement à la ségrégation scolaire, qui varie considérablement d’une localité à une autre. Lutter en faveur de la mixité implique de s’adapter aux particularités locales.
L’enseignement privé et la ségrégation scolaire
L’enseignement privé est régulièrement mis en cause dans le débat sur la ségrégation scolaire. Financé à hauteur de 73% sur fonds publics pour les établissements sous contrat, il échappe à la sectorisation scolaire et plus largement à des objectifs de mixité. Ce secteur de l’éducation est donc en mesure de « choisir » ses élèves sur des critères qui mêlent des dimensions sociales, scolaires, morales et religieuses, et selon des procédures très diverses et parfois opaques.
Si de façon générale sa composition sociale diffère significativement de celle du secteur public, avec une nette sur-représentation des classes supérieures, sa position relative dans l’espace scolaire local varie selon les contextes. Le profil très favorisé et homogène d’un grand nombre d’établissements privés dans les plus grandes villes (c’est-à-dire avec une grande majorité d’élèves issus des classes supérieures et moyennes-supérieures), et tout particulièrement dans la région parisienne, se distingue de celui nettement plus mixte et relativement similaire aux autres établissements publics locaux dans certaines régions et dans des plus petites villes (c’est-à-dire avec un mélange de toutes les catégories sociales sans véritable sur-représentation de l’une d’entre elles).
Contre une vision homogène et nationale du profil des collèges publics et privés et de leur contribution respective à la ségrégation scolaire, nous proposons ici une lecture à différentes échelles territoriales, entre les unités urbaines, entre les espaces les plus ruraux et les plus urbanisés, entre les académies, entre départements au sein d’une même académie, et à une échelle encore plus locale au sein d’un même espace urbain. Cette analyse fait ressortir l’hétérogénéité des contextes. La publication des indices moyens de position sociale des collèges, enrichie récemment des écarts-types qui permettent de caractériser l’homogénéité ou l’hétérogénéité interne des établissements, nous aide à dresser un tableau plus précis de la situation aux différentes échelles indiquées précédemment. Par ailleurs, d’autres données sur le profil social des collèges permettent de compléter l’analyse par le calcul de l’indice d’entropie. Par ses propriétés de décomposition, cet indice permet de calculer sur la totalité de la ségrégation scolaire (100%), la part (le pourcentage) qui s’explique par la différence de composition sociale entre collèges publics (la ségrégation au sein du public), celle qui s’explique par la différence de composition sociale entre collèges privés (la ségrégation au sein du privé), et enfin la part qui s’explique par la différence de composition sociale entre le public et le privé.
Cette hétérogénéité constitue un obstacle à la mise en place d’une mesure nationale, par exemple celle définissant un taux de boursiers minimum, visant à impliquer davantage l’enseignement privé dans la lutte contre la ségrégation scolaire. Elle devrait conduire plutôt à une vision décentralisée des actions à mener, parfois à une échelle très locale, comme celle des bassins scolaires qui peuvent regrouper plusieurs communes dans les espaces urbains denses. Si l’urgence de celles-ci s’impose dans beaucoup de grandes agglomérations, elles n’ont pas lieu de se mettre en place ou n’apparaissent pas prioritaires dans des espaces ruraux ou des petites villes, au risque de créer des tensions et des mobilisations contre-productives à l’objectif de déségrégation.
L’enjeu d’une politique de déségrégation scolaire ambitieuse est donc simultanément de s’appuyer sur des grands principes en faveur de la mixité, et d’être capable de les décliner et de les rendre opérationnels au plus près des spécificités locales. En effet, non seulement les dimensions les plus structurantes de la ségrégation scolaire et ses évolutions ne sont pas identiques dans toutes les principales unités urbaines, mais le changement de focale, du niveau le plus global au plus local, fait également ressortir de forts contrastes.
(...)
Marco Oberti
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Enseignement privé et ségrégation scolaire
Les établissements d'enseignement privé contribuent fortement à la ségrégation scolaire, qui varie considérablement d'une localité à une autre. Lutter en faveur de la mixité implique de s'...
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Comment le gel du point et la politique de primes neutralisent la progression de carrière des enseignants
EXTRAIT
Dans un contexte de crise d’attractivité du métier d’enseignant et de tensions sur les remplacements de professeurs absents, le Gouvernement a annoncé le 20 avril 2023 l’augmentation de certaines primes destinées à améliorer le salaire des enseignants. Le pouvoir d’achat des professeurs a commencé à diminuer dès le début des années 1980. Leur traitement net réel a ainsi baissé d’environ 20% entre 1981 et 2004 [1]. Ce recul s’est poursuivi depuis lors, tandis qu’il a augmenté en moyenne de 11 % en moyenne dans les pays de l’OCDE entre 2005 et 2019 [2].
De fait, les mesures salariales destinées aux professeurs des collèges et des lycées depuis 2008 n’ont pas enrayé la baisse de leur pouvoir d'achat due à sous-indexation du point d’indice de la fonction publique déterminant l’essentiel de leur traitement. Les études menées jusqu’alors ayant principalement analysé l’évolution de la rémunération des enseignants pour un niveau donné (en “photographie”), elles ne permettent pas d’appréhender l’évolution de la rémunération des enseignant.e.s tout au long de leur carrière (en “panel”), ni de rendre visibles les interactions entre la progression des professeurs au sein de leur grille salariale d’une part, l’évolution restrictive du point d’indice d’autre part, et la mise en place ponctuelle de primes.
La présente étude reconstitue donc les traitements individuels perçus mois après mois par Sophie, Nadia et Maxime, professeurs de l’enseignement secondaire, depuis leur entrée en fonction, respectivement en 2000, 2008 et 2016. Ces trois carrières-types permettent l’étude des trajectoires professionnelles d’enseignants agrégés ou certifiés, ayant connu des vitesses de progression de carrière différentes et cumulant de 8 à 23 années d’ancienneté. Elles permettent de suivre l’évolution du pouvoir d’achat individuel à mesure que les professeurs avancent dans leur carrière et d’estimer pour chacun la perte de traitement causée par la sous-indexation du point d’indice et les gains apportés par les mesures salariales.
Cette étude permet ainsi, au-delà de l’analyse globale des grilles indiciaires, de porter un regard inédit sur la politique de rémunération et de valorisation de l’expérience des enseignants tout au long de leurs carrières. Les principales conclusions sont les suivantes :
(...)
Source : Collectif Nos services publics
Suite et fin à lire en cliquant ci-dessous
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Monter un escalator qui descend
Dans un contexte de crise d'attractivité du métier d'enseignant et de tensions sur les remplacements de professeurs absents, le Gouvernement a annoncé le 20 avril 2023 l'augmentation de certaine...
Revalorisation des enseignants : «70% verront leur pouvoir d’achat diminuer cette année»
Selon une étude détaillée du collectif Nos services publics, le pouvoir d’achat des professeurs ne fait que baisser depuis vingt ans, les primes étant loin de compenser le gel du point d’indice et l’inflation. Les hausses de rémunération promises pour septembre n’y changeront rien, ou presque.
Aux éléments de communication du gouvernement, ils opposent les chiffres. Fruit d’un an et demi de travail, le collectif Nos services publics a présenté ce jeudi 27 avril une étude détaillée sur l’évolution de la rémunération des enseignants du second degré ces vingt dernières années. Données et graphiques sont clairs : les profs perdent continuellement du pouvoir d’achat et, à quelques nuances près, la revalorisation prévue en septembre n’y changera rien. Pour résumer les choses, le collectif d’agents publics compare l’évolution de carrière des professeurs au fait de «monter un escalator qui descend».
Afin d’étayer leur propos, ils ont défini trois profils type : Sophie, agrégée, entrée dans le métier en 2000 ; Nadia, certifiée, entrée en 2008 ; et Maxime, certifié, entré en 2016. Pour chacun, ils ont rapporté les rémunérations à l’indice des prix à la consommation, aboutissant à leur pouvoir d’achat réel. Résultat, depuis le début de leur carrière, Sophie, Nadia et Maxime ont respectivement perdu 70 622 euros, 41 601 euros et 17 576 euros.
Les enseignants voient leur carrière évoluer naturellement : à mesure que les années passent, ils changent d’échelon, ce qui leur octroie davantage de points d’indice. Mais ledit point d’indice, qui vaut aujourd’hui 4,85 euros brut, a été sous-indexé par rapport à l’inflation au début des années 2000, avant d’être gelé à partir de 2010. La dernière revalorisation, l’été passé, de 3,5%, est loin d’avoir permis d’inverser la tendance, avec une inflation à 6%. Ainsi, indique Arnaud Bontemps, co-porte-parole du collectif Nos services publics, «les changements d’échelons servent à rattraper la perte de pouvoir d’achat depuis le dernier échelon».
Gagner autant à 38 ans qu’à 25 ans
La preuve avec les trois profils types. Sophie, l’agrégée et la plus ancienne dans le métier, avait en 2015 un pouvoir d’achat équivalent à celui dont elle disposait dix ans plus tôt. Cette année, il est inférieur à celui de 2016, car «l’inflation a annulé 40% des gains liés au passage au huitième échelon en 2016 et la quasi-totalité des gains liés au passage au neuvième échelon en 2020», précise l’étude. Du côté de Nadia, «pour son 38e anniversaire, en mars, [son] traitement réel est égal à celui qu’elle gagnait à 25 ans, lorsqu’elle avait bénéficié de la prime d’entrée dans le métier». Maxime, lui, a vu son pouvoir d’achat baisser par rapport à ses débuts, en 2017, et stagner depuis 2018.
Pour «compenser» la stagnation de la valeur du point d’indice, les gouvernements misent sur des primes. Outre le fait qu’elles n’entrent pas en compte dans le calcul de la retraite, ces primes concernent davantage les enseignants en début de carrière et peuvent être dégressives en fonction de l’expérience, comme c’est le cas avec la prime d’attractivité, également appelée «prime Grenelle». Leur montant étant forfaitaire, «leur valeur réelle diminue avec l’inflation», note Arnaud Bontemps.
Le collectif Nos services publics a simulé la rémunération des trois profils types si leurs salaires avaient suivi l’inflation, en enlevant les primes : Sophie, l’agrégée et plus ancienne dans le métier, gagnerait 3 176 euros contre 2 665 euros aujourd’hui, soit 511 euros mensuels supplémentaires. C’est près de 350 euros de moins pour Nadia, la certifiée qui exerce depuis quinze ans, et plus de 250 euros de moins pour Maxime, le certifié arrivé il y a sept ans. «De facto et depuis 2000, la totalité des mesures salariales prises à l’endroit des enseignants a consisté, non pas en une revalorisation, mais en une limitation de la chute de leur pouvoir d’achat», résume l’étude.
Une hausse du pouvoir d’achat à durée limitée
Qu’en est-il, alors, de la revalorisation prévue pour septembre, qui sera comprise entre 100 et 230 euros net mensuels pour tous les enseignants et davantage pour ceux acceptant des «missions» supplémentaires – en prime, et non en salaire, encore une fois ? Sophie et Nadia, les plus anciennes, y perdront : elles auront toujours moins de pouvoir d’achat qu’en 2020, 2021, 2022 et janvier 2023. Maxime, lui, fera partie des «gagnants», le gouvernement assumant de revaloriser davantage les débuts de carrière : il passera de 1 756 euros à 1 890 euros.
Problème : au regard des prévisions d’inflation, «son pouvoir d’achat ne va s’améliorer que pendant un an, un an et demi maximum», souligne Mehdi Djebbari, du collectif Nos services publics. En effet, cette hausse de rémunération tiendra en partie à une augmentation de la prime d’attractivité, laquelle décroît avec l’ancienneté, jusqu’à disparaître complètement. Arnaud Bontemps résume les choses ainsi : «Malgré les mesures annoncées pour septembre, 70% des enseignants du secondaire verront leur pouvoir d’achat diminuer sur l’année 2023 et les autres 30% connaîtront des revalorisations ponctuelles qui auront le risque de renforcer l’effet d’aplatissement [des carrières].» Pour l’effort historique tant promis, on repassera.
Elsa Maudet
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Revalorisation des enseignants : "70% verront leur pouvoir d'achat diminuer cette année"
Selon une étude détaillée du collectif Nos services publics, le pouvoir d'achat des professeurs ne fait que baisser depuis vingt ans. Les hausses de rémunération promises pour septembre n'y ...
Coup de coeur... Walter Benjamin...
Jetant un regard rétrospectif sur sa vie, il se pourrait qu’un homme se rende compte que presque toutes les relations approfondies qu’il a connues avaient trait à des personnes dont tout le monde admettait le « caractère destructeur ». Un jour, par hasard peut-être, il ferait cette découverte, et plus le choc qu’elle lui causerait serait violent, plus il aurait de chances de parvenir à dresser un portrait du caractère destructeur.
Le caractère destructeur ne connaît qu’un seul mot d’ordre : faire de la place ; qu’une seule activité : déblayer. Son besoin d’air frais et d’espace libre est plus fort que toute haine.
Le caractère destructeur est jeune et enjoué. Détruire en effet nous rajeunit, parce que nous effaçons par là les traces de notre âge, et nous réjouit, parce que déblayer signifie pour le destructeur résoudre parfaitement son propre état, voire en extraire la racine carrée. À plus forte raison, on parvient à une telle image apollinienne du destructeur lorsqu’on s’aperçoit à quel point le monde se trouve simplifié dès lors qu’on le considère comme digne de destruction. Tout ce qui existe se trouve ainsi harmonieusement entouré d’un immense ruban. C’est là une vue qui procure au caractère destructeur un spectacle de la plus profonde harmonie.
Le caractère destructeur est toujours d’attaque. Indirectement du moins, c’est la nature qui lui prescrit son rythme ; car il doit la devancer. Faute de quoi, elle se chargera elle-même de la destruction.
Le caractère destructeur n’a aucune idée en tête. Ses besoins sont réduits ; avant tout, il n’a nul besoin de savoir ce qui se substituera à ce qui a été détruit. D’abord, un instant au moins, l’espace vide, la place où l’objet se trouvait, où la victime vivait. On trouvera bien quelqu’un qui en aura besoin sans chercher à l’occuper.
Le caractère destructeur fait son travail et n’évite que la création. De même que le créateur cherche la solitude, le destructeur doit continuellement s’entourer de gens, témoins de son efficacité.
Le caractère destructeur est un signal. De même qu’un repère trigonométrique est exposé à tout vent, il est exposé à tous les racontars. Vouloir l’en protéger n’a pas de sens.
Le caractère destructeur ne souhaite nullement être compris. À ses yeux, tout effort allant dans ce sens est superficiel. Le malentendu ne peut l’atteindre. Au contraire, il le provoque, comme l’ont provoqué les oracles, ces institutions destructrices établies par l’État. Le phénomène le plus petit-bourgeois qui soit, le commérage, ne surgit que parce que les gens ne souhaitent pas être mal compris. Le caractère destructeur accepte le malentendu ; il n’encourage pas le commérage.
Le caractère destructeur est l’ennemi de l’homme en étui. Ce dernier cherche le confort, dont la coquille est la quintessence. L’intérieur de la coquille est la trace tapissée de velours qu’il a imprimée sur le monde. Le caractère destructeur efface même les traces de la destruction.
Le caractère destructeur rejoint le front des traditionnalistes. Certains transmettent les choses en les rendant intangibles et en les conservant ; d’autres transmettent les situations en les rendant maniables et en les liquidant. Ce sont ces derniers que l’on appelle les destructeurs.
Le caractère destructeur possède la conscience de l’homme historique, son impulsion fondamentale est une méfiance insurmontable à l’égard du cours des choses, et l’empressement à constater à chaque instant que tout peut mal tourner. De ce fait, le caractère destructeur est la fiabilité même.
Aux yeux du caractère destructeur rien n’est durable. C’est pour cette raison précisément qu’il voit partout des chemins. Là où d’autres butent sur des murs ou des montagnes, il voit encore un chemin. Mais comme il en voit partout, il lui faut partout les déblayer. Pas toujours par la force brutale, parfois par une force plus noble. Voyant partout des chemins, il est lui-même toujours à la croisée des chemins. Aucun instant ne peut connaître le suivant. Il démolit ce qui existe, non pour l’amour des décombres, mais pour l’amour du chemin qui les traverse.
Le caractère destructeur n’a pas le sentiment que la vie vaut d’être vécue, mais que le suicide ne vaut pas la peine d’être commis.
Walter Benjamin - Publication initiale dans le Frankfurter Zeitung du 20 novembre 1931 (Traduction Rainer Rochlitz)