Coup de coeur... Pierre Schoendoerffer...
Une voiture de l'Amirauté vient se ranger le long du bord.
Le commandant s'en va. C'est un spectre, mais il se tient très droit. Un peu de sang coule d'une coupure sur sa joue, dilué de pluie. La garde présente les armes. Tous les officiers sont là. Tout l'équipage, les permissionnaires et les autres en tenue de travail. Tous, immobiles, figés. Je ne savais pas que nous l'aimions tant - que nous le respections tant; un respect qui se reconnaît à la pâleur de ceux qui le regardent, aux larmes refoulées quand il nous regarde.
Il ne dira pas un mot. Et c'est très bien ainsi.
Il passe lentement, raide. Il salue la garde. Sa pince noire et luisante tremble un peu.
Sifflet du maître d'équipage.
Le commandant monte sur la coupée et s'arrête, tourné vers la poupe, vers le pavillon. De nouveau il salue d'un geste lent. Longtemps. Mince et droit.
Il franchit la coupée et monte dans la voiture - la portière claque. Il ne s'est pas retourné. Il n'a pas dit un mot.
Pierre Schoendoerffer - Le crabe-tambour
Ecoles : le casse-tête des tests salivaires pour les enfants...
Plus d’un mois après les engagements du ministère de l’Education à développer ce dispositif, des enseignants et directions d’écoles témoignent des difficultés que soulèvent les tests salivaires pour les enfants de maternelle et de classes élémentaires.
«Les tests, on les aura attendus trois semaines.» Marion* est directrice d’une grande école primaire en milieu semi-rural. En «deux ou trois jours», quinze cas d’élèves positifs ont été recensés. La classe concernée a été fermée. Mais le Covid-19, lui, n’a pas chômé. «Les frères et sœurs ont contaminé d’autres élèves. En une semaine, on est monté à trois classes fermées.» C’était à la mi-mars. Marion relance ses supérieurs pour obtenir un dépistage, «qui devait intervenir fin février» : «prochaine disponibilité, en avril», lui rétorque l’administration. Les élèves de cette école se feront donc tester à la veille des vacances de Pâques. «C’est inutile, c’est trop tard», lâche Marion.
Dépistage tardif, difficulté des tests pour les tout-petits, problèmes de communication avec les familles, retard des résultats… Un mois après l’engagement du ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, d’atteindre 300 000 tests salivaires «déployés» par semaine (et non 300 000 personnes testées, souligne le ministère) d’ici la mi-mars, les dépistages à l’école connaissent des couacs.
Lancés le 22 février d’abord en zone A, puis au retour des vacances dans les zones C et B, ces tests sont utilisés en priorité pour les plus jeunes, car moins intrusifs que ceux nasopharyngés. Mais pas exclusivement : collégiens, lycéens, étudiants, personnels soignants ou personnes en situation de handicap peuvent aussi être testés de cette manière. La semaine du 15 mars, 200 404 tests salivaires ont été réalisés pour les élèves et les personnels, sur un total de 320 285 tests proposés, avec un taux de 0,49% de tests positifs, d’après les données du ministère. Les testés de la semaine passée représentent donc un peu plus de 0,03% des 6,6 millions d’élèves du primaire, qui regroupe maternelles et élémentaires.
De la surveillance à l’urgence
Ces dépistages en école interviennent dans deux cadres : un panel fixe défini par le ministère de l’Education rassemble environ dix établissements par académie, soit 300 à l’échelle du pays, «pour affiner la connaissance épidémiologique du milieu scolaire». Ce panel est composé «d’écoles, de collèges et de lycées représentatifs de la diversité des territoires : REP + (réseaux d’éducation prioritaire renforcée), centre-ville, zone rurale, établissement privé…»
Mais le nerf de la guerre se trouve ailleurs : dans les écoles des zones prioritairement touchées. Le ministère a ajouté ainsi une seconde liste, actualisée régulièrement, d’écoles à tester. Quitte à s’adapter localement : depuis lundi, le rectorat de Paris allège la liste fixe d’écoles suivies pour se concentrer sur les trente établissements les plus âprement touchés par le coronavirus. «On quitte la surveillance pour être dans une réponse d’urgence», résume Anne Souyris, adjointe à la mairie de Paris, en charge de la santé publique.
Problème, les capacités de dépistage des enfants peuvent être insuffisantes, même pour les établissements en tension. Comme à Poitiers (Vienne), dans des écoles du quartier populaire des Couronneries durement touchées par l’épidémie : «Après notre alerte début mars, il a fallu onze jours pour obtenir un test à l’école maternelle, treize pour l’élémentaire. Et encore, la campagne d’une autre école a été annulée. Ils n’avaient pas les moyens de maintenir les deux», souligne Gilles Tabourdeau, professeur des écoles et secrétaire départemental du syndicat d’enseignants SNUipp-FSU. «En attendant les tests, les enfants sont venus à l’école et le virus a circulé.»
Réussir à cracher
Pour le dépistage, chaque enfant doit présenter une autorisation familiale écrite, le test n’étant pas obligatoire. Un jour pas tout à fait comme les autres pour les tout-petits : les blouses blanches intégrales, les petits pots à remplir intimident les enfants, comme le confient plusieurs instituteurs. De plus, il faut pouvoir cracher, mais encore faut-il savoir le faire à trois ans, rappelle David*, directeur d’une école maternelle à Paris. «Sur environ 70 enfants testés chez moi, une dizaine n’a pas réussi.» Les enfants trop jeunes ou handicapés doivent normalement bénéficier d’un prélèvement par pipette, comme l’annonce le site du ministère de l’Education. Mais cette alternative n’a pas été proposée aux élèves de David.
Le prélèvement salivaire est réalisé par le laboratoire à l’école, en présence d’un membre de l’Education nationale, et «doit être analysé dans les vingt-quatre heures suivant le prélèvement», indique aussi le site du ministère. «Si le test est positif, le laboratoire prévient les parents de l’élève et l’agence régionale de santé (ARS). L’ARS transmet ensuite au personnel médical de l’Education nationale», nous ont confirmé leurs équipes. Quelque soit le résultat, les parents ne sont pas obligés de tenir au courant la direction de l’école, qui reste pour la plupart du temps dans le flou.
Dans les faits, le délai des vingt-quatre heures n’est pas toujours tenu : dans une même école, les résultats peuvent être reçu en une journée comme sous quarante-huit heures. Dans un autre établissement, cela peut aller jusqu’à soixante-douze heures. Certaines n’obtiennent pas de résultats du tout en cas de négativité ou de mauvaise saisie des informations de contact. «On pensait naïvement que les parents recevraient un simple texto de résultat», explique Nicolas*, enseignant en Auvergne-Rhône-Alpes. Mais parfois, ils doivent appeler un numéro, «ce qui peut être compliqué pour certaines familles maîtrisant mal le français». L’équipe pédagogique a donc appelé le laboratoire, en se faisant passer pour les parents.
«Ne touche à rien, fais ton cartable et sors !»
Dans l’intervalle qui sépare les tests des résultats, rien n’empêche les élèves de revenir en classe. Y compris les malades qui s’ignorent, les asymptomatiques, ce qui peut aggraver la circulation du virus. Seulement dans le cas d’un retour d’un isolement, un test négatif est exigé en école élémentaire, et non en maternelle.
Dans l’école parisienne dirigée par David, deux enfants positifs sont ainsi revenus sur les bancs. Même chose chez Nicolas. Un CM1 s’est rendu en classe lundi, trois jours après les tests salivaires. En pleine matinée, la porte de la classe s’ouvre : «Ne touche à rien, fais ton cartable, et sors !» La mère, qui élève seule le garçon, passe le chercher. Elle venait de recevoir ses résultats.
Depuis lundi, chaque classe des 19 départements concernés par les mesures accrues de restrictions doit être fermée si un seul cas de contamination y est identifié. Sans pour autant clore les écoles. «Comment fait-on quand les enseignants Covid avérés ou cas contacts ne sont pas remplacés ?» tonne Guislaine David, cosecrétaire générale et porte-parole du SNUipp-FSU. Pour elle, avec ou sans test, «certaines familles doivent faire garder l’enfant pour aller travailler. Par praticité… ou par manque de moyens. Et le gouvernement ne fait rien pour favoriser la garde d’enfants. Les entreprises non plus».
*Les prénoms ont été modifiés.
Miren Garaicoechea
/https%3A%2F%2Fwww.liberation.fr%2Fresizer%2FRYL0dImYXvKxZIWZBIJnxQ9Tdo0%3D%2F1200x630%2Fcloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com%2Fliberation%2FBWJ55XQCPBE7HPKYYFHKCEXNOA.jpg)
Ecoles : le casse-tête des tests salivaires pour les enfants
Plus d'un mois après les engagements du Ministère de l'Education, des enseignants et directions d'écoles témoignent des difficultés que soulèvent les tests salivaires pour les enfants de mate...
La fermeture de établissements scolaires, une première historique? - Par Claude Lelièvre
Comme l'Histoire a tendance à bégayer ces temps-ci, je pense que Le Monde me pardonnera de reproduire ici un an après ma tribune du 16 mars 2020 sur le sujet ( in extenso, en espérant qu'il y a prescription). Alea jacta est!
Coronavirus : « La fermeture générale des établissements scolaires est une première historique »
TRIBUNE
Claude Lelièvre
Historien, spécialiste de l'éducation
Grippe « espagnole », « asiatique », Mai 68, « H1N1 », etc. : la fermeture de l’ensemble des établissements scolaires et universitaires, si elle a pu être mise en débat, « n’a pas d’antécédent historique », explique l’historien de l’éducation Claude Lelièvre dans une tribune au « Monde ».
Publié le 16 mars 2020
La fermeture de l’ensemble des établissements scolaires et universitaires qui vient d’être décidée au plus haut sommet de l’Etat est indiscutablement une première. Elle n’a pas d’antécédent historique. Le mouvement de Mai 68 a bien entraîné la fermeture de fait de nombreux établissements ; mais cela n’a été nullement une décision du pouvoir exécutif et une mise en œuvre générale. Il en a été de même durant les deux guerres mondiales du XXe siècle, même si, ici ou là, pour des raisons variées, et en temps ou espaces limités, il y a eu des fermetures de certains établissements scolaires ou universitaires.
Il en a été de même pour les grandes épidémies, notamment grippales, du XXe siècle, même lorsqu’elles ont pu conduire à un nombre de décès fort élevé. Par exemple, pour la « grippe espagnole » vers la fin de la Grande Guerre, sans doute plusieurs centaines de milliers de morts en France et une grande opacité due à la censure dans un pays en guerre, ou bien encore pour la « grippe asiatique » de 1957, plus de 100 000 morts en France. « Un Français sur cinq a la grippe ; les hôpitaux sont surchargés ; les médecins doivent travailler jour et nuit ; la majorité des victimes sont des adolescents », titrait, au mois d’octobre de cette année-là, Le Journal du dimanche.
Fin septembre, dans Le Figaro, un conseiller municipal parisien du nom de Peretti avait bien suggéré de « renvoyer à une date ultérieure la rentrée scolaire, l’école étant un foyer de contamination par excellence ». Sans succès. Dans Le Figaro du 9 octobre, le professeur Etienne Chabrol lui avait répondu que « la riposte par les antibiotiques nous trouve mieux armés qu’à l’époque de la grippe espagnole ». On ne doute pas alors que les antibiotiques puissent être très efficaces contre les surinfections bactériennes, complications classiques de la grippe.
Vaccination de masse
Un demi-siècle plus tard, ce ne sont plus les antibiotiques qui sont mis en avant pour rassurer la population et éviter les mesures exceptionnelles, mais la vaccination. Dès l’été 2009, lors de l’épisode de l’épidémie H1N1, le gouvernement français fait savoir qu’il opte pour une campagne de vaccination de masse et fait le forcing. Cela n’est pas suivi par les Français avec beaucoup d’empressement. Finalement, selon le Haut Conseil de la santé publique, il y aurait eu près de 6 millions de personnes vaccinées et entre 12 et 18 millions d’immunisées contre le virus (la majorité l’ayant été par infection)
Le pouvoir de fermer des classes ou établissements scolaires est dévolu aux préfets. Si l’on en juge par l’intervention de Patrick Zylberman, professeur à l’Ecole des hautes études en santé publique, en 2009, à l’audition publique du Sénat sur « La gestion des pandémies : H1N1, et si c’était à refaire ? », cela n’a pas été jugé convaincant : « Le 15 août 2009, le ministre de l’éducation nationale, Luc Chatel, a prôné la fermeture des classes dès que trois cas sont recensés parmi les élèves et le personnel en moins d’une semaine, expliquait alors le spécialiste. La mesure a été très prisée des préfets : le 18 novembre, 168 classes et 116 établissements sont fermés. Mais, curieusement, la France a envisagé de fermer des classes au moment où les Etats-Unis et le Royaume-Uni y ont renoncé, déçus par le peu de résultat de cette mesure. »
Pour ce qui concerne le coronavirus, il ne pouvait être question de s’appuyer sur une vaccination, faute de vaccin ad hoc. D’où des mesures de confinement, de « quatorzaines », de fermetures d’établissements scolaires plus ou moins ciblées spatialement afin de retarder la progression de l’épidémie. Avec in fine la décision sans précédent qui vient d’être prise.
Le président de la République a réaffirmé, lors de son allocution, fonder cette décision historique sur les avis de scientifiques. Les scientifiques, sur le cas moins grave de la grippe saisonnière, estimaient, dans une longue mise au point datée du 31 mars 2015, sur « l’efficacité de la fermeture des écoles comme mesure de la lutte contre la grippe » ; que celles-ci « demeurent peu concluantes. […] Les chercheurs soulignent le manque de données empiriques solides qui permettraient des comparaisons entre les communautés ayant opté pour la fermeture d’écoles et d’autres qui ne l’ont pas fait ».
Des familles coéducatrices ?
Quoi que l’on puisse penser de l’opportunité de cette décision sans précédent et de sa date, elle est prise et ne sera pas réévaluée avant pas mal de temps : pas avant les vacances de printemps, a déclaré le ministre de l’éducation nationale (suggérant, par ailleurs, que cela pourrait être bien après ; « jusqu’à nouvel ordre »).
Le risque d’inégalité renforcée selon les familles (déjà très présent en France si l’on en juge par les évaluations PISA selon les milieux socioculturels) devrait donc être un souci de premier plan lors de la mise en place des dispositifs d’« école à la maison ».
Si cette fermeture des établissements d’enseignement dure plus longtemps qu’on l’imagine, comme il est probable, les familles (surtout certaines d’entre elles, en général de milieux socioculturels favorisés) vont prendre de fait une place plus importante voire inédite dans les processus scolaires de par, entre autres, la nécessité qu’elles ont de suivre de près l’enseignement à distance délivré à leur enfant. Historiquement, l’école de la République s’est construite en laissant les parents d’élèves dans une position marginale. Durant toute une période, cela ne va plus être le cas. Et si cela dure longtemps, il ne sera plus question de revenir purement et simplement à la situation précédente. Si la famille a « fait école », elle pourra dire qu’elle peut continuer à « faire école » et être effectivement coéducatrice dans l’école.
Claude Lelièvre
/https%3A%2F%2Fwww.mediapart.fr%2Fimages%2Fsocial%2F800%2Fclub.png)
La fermeture de établissements scolaires, une première historique?
Comme l'Histoire a tendance à bégayer ces temps-ci, je pense que Le Monde me pardonnera de reproduire ici un an après ma tribune du 16 mars 2020 sur le sujet ( in extenso, en espérant qu'il y a...
Covid dans les écoles : Jean-Michel Blanquer visé par une plainte
Le collectif des Stylos rouges a déposé plainte devant la Cour de justice de la République pour «mise en danger de la vie d’autrui» contre le ministre de l’Education nationale. Il l’accuse de «ne pas protéger les personnels en contact avec les enfants» qui «répandent le virus» dans les établissements scolaires.
Et un de plus ! Après l’ex-ministre de la Santé Agnès Buzyn, l’ex-premier ministre Edouard Philippe ou Olivier Véran, c’est au tour de Jean-Michel Blanquer, le ministre de l’Education nationale, d’être visé par une plainte devant la Cour de justice de la République (CJR) pour sa gestion de la crise sanitaire. La haute cour est en effet la seule juridiction compétente pour juger des actes commis par les ministres dans l’exercice de leurs fonctions. Or, face à ce qu’ils dénoncent comme un «déni total de la réalité» de la hausse des contaminations dans les établissements scolaires, des enseignants et personnels de l’éducation ont décidé d’ester en justice.
Membres du collectif des Stylos rouges, né en décembre 2018 dans le sillage de la crise des gilets jaunes, ces profs reprochent à leur ministre de «ne pas protéger les personnels en contact avec les enfants» qui «répandent le virus» du Covid-19. Jean-Michel Blanquer «nous a dit qu’on n’était plus en danger à la maison qu’à l’école, qu’il n’y avait pas de cas dans les écoles, a minoré les chiffres… Alors que les établissements scolaires explosent», déplore mardi auprès de l’AFP Nicolas Glière, porte-parole des plaignants pour «mise en danger de la vie d’autrui».
«Les écoles sont des clusters»
Ce professeur de français dans un collège parisien accuse par ailleurs le ministre de l’Education d’avoir ignoré les alertes des enseignants sur les contaminations dans les établissements. «On n’a pas été entendu, on est mis en danger, des gens sont tombés gravement malades, rien n’a été fait : la plainte est une nécessité», poursuit Nicolas Glière qui, au nom des milliers de Stylos rouges revendiqués, exige pour une durée de quelques semaines la fermeture des écoles, collèges et lycées dans la vingtaine de départements les plus touchés et donc soumis depuis le 20 mars à des «mesures de freinage» de l’épidémie.
Depuis lundi, en vertu du nouveau protocole sanitaire dans ces territoires (Paris, la Seine-Saint-Denis, le Rhône ou l’Aube), un seul cas de Covid dans une classe entraîne désormais sa fermeture, contre trois cas auparavant. Ce qui oblige les parents d’élèves à s’en remettre à la débrouille. «Les enfants répandent le virus et les écoles sont des clusters, c’est acté. On aurait voulu que les écoles ne ferment pas, mais maintenant on n’a pas le choix», martèle l’enseignant francilien. Ailleurs, il réclame le passage en demi-groupes ailleurs pour protéger personnels d’éducation et familles.
Libération et AFP
/https%3A%2F%2Fwww.liberation.fr%2Fresizer%2FwRewEOKxKhC1-aeXxGGDYR2pX1s%3D%2F1200x630%2Fcloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com%2Fliberation%2FBVFAWJDJNJH3XL24KFY4PPIDC4.jpg)
Covid dans les écoles : Jean-Michel Blanquer visé par une plainte
Né pendant la crise des gilets jaunes, le collectif des " Stylos rouges" a déposé plainte devant la Cour de Justice de la République pour "mise en danger de la vie d'autrui" contre le ministre ...
Covid-19 : dans les écoles, de plus en plus de fermetures de classes et des contaminations sous-estimées
Depuis plus de trois semaines, le nombre de classes et d'écoles fermées ne cesse de croître. Alors qu'un nouveau protocole sanitaire a été publié, la situation semble de plus en plus tendue.
La situation des écoles face au Covid-19 sera-t-elle tenable encore longtemps ? Alors que le gouvernement reste catégoriquement opposé à la fermeture généralisée des écoles, le nombre de classes fermées ne cesse de croître, tout comme les contaminations des enfants. Les chiffres publiés par le ministère de l’Education nationale témoignent d’une nette accélération ces dernières semaines. Et la situation pourrait en réalité être bien pire, affirment les syndicats enseignants, qui pointent du doigt les grands écarts entre les chiffres de leur ministère de tutelle et ceux des autorités sanitaires.
D'après les derniers chiffres publiés par l'Education nationale, le nombre de classes fermées bondit littéralement d'une semaine à l'autre. Vendredi 26 mars, le ministère en dénombrait 3 256, soit 1 238 de plus qu'une semaine avant et une hausse de plus de 60%. L'académie de Créteil, dont dépendent les départements de Seine-Saint-Denis, de Seine-et-Marne et du Val-de-Marne, est de loin la plus touchée, avec 536 fermetures. Et l'académie de Lyon enregistre la plus forte hausse, avec 177 classes fermées contre 24 la semaine précédente, soit une augmentation de près de 640%.
Cette dynamique pourrait continuer de s'accélérer dans les prochains jours, à la faveur des nouvelles mesures annoncées le 26 mars par le ministère de l'Education nationale. Désormais, dans les 19 départements sous "mesures de freinage fortes", les classes doivent être fermées dès le premier cas de Covid-19 découvert. De quoi faire grimper le nombre de fermetures de classes, qui devrait être connu en fin de semaine.
La liste du nombre d'établissements entièrement fermés pourrait elle aussi s'allonger. Vendredi, le ministère en dénombrait 148, contre 80 une semaine auparavant, soit une hausse de 85%. Ces fermetures concernent jusqu'à présent surtout les écoles (116). Dans le secondaire, seuls 22 collèges et 10 lycées étaient à l'arrêt le 26 mars.
Mais pour les syndicats, ces chiffres officiels seraient très éloignés de la réalité. "Certains établissements sont déclarés comme ouverts alors qu'ils fonctionnent sans enseignants", affirme Guislaine David, porte-parole du Snuipp, le syndicat majoritaire des professeurs des écoles. Les enseignants pointent aussi du doigt le nombre de contaminations rapporté par le ministère de l'Education nationale, qui est très en deçà des résultats publiés par les autorités sanitaires.
Ainsi, le 26 mars, l'Education nationale comptait 21 183 cas positifs parmi les élèves de la maternelle au lycée, sur une semaine, alors que Santé publique France, l'organisme chargé de la surveillance de l'épidémie, déclare plus de 57 000 nouvelles contaminations pour les moins de 20 ans. Dont plus de 80% ont moins de 18 ans, d'après le bulletin épidémiologique du 25 mars.
En réalité, les chiffres publiés par l'Education nationale sont basés sur du déclaratif. "Le ministère ne recense que le nombre de cas rapportés par les parents aux directions des établissements scolaires. Sauf que rien n'oblige les familles à déclarer que leurs enfants sont contaminés", explique Guislaine David. Un vrai problème pour les syndicats, qui affirment qu'un grand nombre de parents n'alertent pas les écoles en cas de test positif. "Il arrive régulièrement que des enfants racontent à leur professeur que papa et maman sont malades. Ils ont le Covid", assure Guislaine David. Les chefs d'établissement n'ont pas non plus de droit de regard sur les résultats des tests réalisés dans les écoles. "Là encore, seuls les parents y ont accès et ils n'ont pas l'obligation d'informer les directions en cas de test positif", précise la responsable syndicale.
Guislaine David dénonce une situation de plus en plus intenable. "Les écoles fonctionnent aujourd'hui en mode dégradé. De plus en plus d'enseignants sont déclarés cas contacts et ne sont pas remplacés. Résultat, on a des classes surchargées dans lesquelles les enfants sont massés. Tout le contraire de ce que nous demande le protocole sanitaire. Ce n'est plus possible de fonctionner comme ça."
Brice Le Borgne - Mathieu Lehot
Coup de coeur... Daniel Defoe...
Il n’y a rien de si absurde, de si extravagant ni de si ridicule, qu’un homme qui a la tête échauffée tout ensemble par le vin et par un mauvais penchant de son désir ; il est possédé à la fois par deux démons, et ne peut pas plus se gouverner par raison qu’un moulin ne saurait moudre sans eau ; le vice foule aux pieds tout ce qui était bon en lui ; oui et ses sens mêmes sont obscurcis par sa propre rage, et il agit en absurde à ses propres yeux : ainsi il continuera de boire, étant déjà ivre ; il ramassera une fille commune, sans se soucier de ce qu’elle est ni demander qui elle est : saine ou pourrie, propre ou sale, laide ou jolie, vieille ou jeune ; si aveuglé qu’il ne saurait distinguer. Un tel homme est pire qu’un lunatique ; poussé par sa tête ridicule, il ne sait pas plus ce qu’il fait que ne le savait mon misérable quand je lui tirai de la poche sa montre et sa bourse d’or.
Ce sont là les hommes dont Salomon dit :
" - Ils marchent comme le bœuf à l’abattoir, jusqu’à ce que le fer leur perce le foie. "
Daniel Defoe - Moll Flanders
Covid-19 : en Ile-de-France, l’éducation nationale se prépare à une explosion du nombre de classes fermées
EXTRAITS
Le nouveau protocole sanitaire prévoit la fermeture d’une classe dès qu’un seul cas positif au Covid-19 est confirmé. Sur le terrain, on déplore une mesure trop tardive, qui complique grandement la vie des établissements.
« C’est mécanique », disent les enseignants. Le tour de vis donné au protocole sanitaire, qui impose, depuis lundi 29 mars dans les dix-neuf départements reconfinés, la fermeture d’une classe dès qu’un cas positif au Covid-19 y est détecté, ne peut qu’augmenter le nombre de fermetures. En Ile-de-France, elles ont déjà flambé : 160 classes ont été recensées comme fermées à Paris lors du dernier bilan hebdomadaire, communiqué vendredi 26 mars, 315 dans l’académie de Versailles et 536 dans celle de Créteil.
Pour disposer de nouveaux chiffres, il faudra « sans doute » attendre jusqu’à mercredi et le conseil de défense convoqué par le chef de l’Etat à cette échéance, souffle-t-on dans les rectorats. Mais de Paris à la Seine-Saint-Denis, en passant par le Val-de-Marne, les syndicats d’enseignants ne sont guère optimistes.
Ils sont d’ailleurs nombreux à avoir déposé une « alerte sociale ». « A ce stade, il y a peu d’écoles, sur les 608 que compte le département, où il n’y a pas de cas Covid », rapporte Clément Peyrottes, porte-parole du SE-UNSA pour le Val-de-Marne. « Sur la journée de lundi, on a déjà 113 classes fermées, sans avoir eu toutes les remontées. Si on ferme une classe pour chaque cas, vous pouvez compter plus de 600 classes fermées d’ici à mercredi. »
Le même raisonnement tient ailleurs en Ile-de-France, en particulier en Seine-Saint-Denis, département durement touché par l’épidémie. Là, des équipes ont déjà exercé leur droit de retrait, constatant que la nouvelle règle « un cas, une fermeture » ne répond pas à pas toutes leurs difficultés. Dans certains établissements, on parle de se mettre en grève – même si les syndicats ne relèvent, à ce stade, pas de « mouvement massif ».
(...)
« Au rythme où l’on va, les écoles finiront par se vider d’elles-mêmes, ne serait-ce que parce que les remplaçants ne sont pas suffisants », fait valoir Hervé Lalle. Ce directeur d’une école maternelle n’accueille plus, depuis le 24 mars, que trois classes sur cinq : une petite et une moyenne sections ont fermé après qu’un enfant dépisté positif au Covid-19 y a été déclaré dans chacune.
(...)
Dans le premier degré, la nouvelle règle « un cas, une fermeture » semble à peu près claire. « Mais en collège, on a des groupes de langues où les élèves sont mélangés, prévient une enseignante d’Aubervilliers. La moitié de mon groupe peut être évincée et pas l’autre, ça n’a aucun sens ! » La réforme du lycée, qui a bouleversé la composition des classes, complexifie aussi la donne. « La notion de classe n’a plus guère de sens, explique Redouane Mhamdi, porte-parole des proviseurs du SNPDEN-UNSA. Les élèves sont mélangés en spécialité, en langues, en EPS… »
(...)
Mattea Battaglia et Violaine Morin
Covid-19 : à l’école, quatre scénarios à étudier
La question de la fermetures des écoles pour endiguer l’épidémie ne cesse de se poser dans le corps enseignant et chez les parents d’élèves, alors que le ministère de l’Education semble se satisfaire de sa stratégie : une classe fermée pour un cas détecté. D’autres voies sont-elles possibles pour mettre tout le monde d’accord ?
Vu la courbe des contaminations et les prévisions des services de réanimation, difficile de ne pas se poser la question : faut-il garder les écoles ouvertes ? N’est-ce pas le dernier levier pour (tenter de) freiner une épidémie qui semble, par endroits, hors de contrôle ? Vendredi, 3 256 classes étaient fermées (soit 0,6% du total), contre 2 018 la semaine précédente. Pas de nouveau recensement officiel depuis. Libération passe en revue quatre scénarios possibles, plus ou moins radicaux… et plus ou moins efficaces.
Scénario 1 : fermeture généralisée des établissements scolaires
Ce serait un retour vers un confinement strict, comme en mars 2020, quand écoles, collèges, lycées et universités ont fermé leurs portes. Une situation inédite dans l’histoire de notre pays. Cette hypothèse, que nombre d’épidémiologistes demandent depuis plusieurs semaines, est – à cette heure – toujours écartée par Emmanuel Macron. Le Président en fait une fierté nationale, au cœur de sa stratégie. Si sur le plan sanitaire la fermeture des écoles se justifie dans les départements en alerte rouge, politiquement, c’est une autre histoire. Pour sauver la face, le gouvernement a tout de même une autre option (qui revient au même) : avancer, voire rallonger, les vacances scolaires. Dans le calendrier initial, la zone A (notamment l’académie de Lyon) attaque en principe les congés samedi 10 avril. Dans moins de deux semaines, donc. Le syndicat majoritaire des enseignants du primaire (Snuipp-FSU) y est favorable : «Aujourd’hui, ce n’est plus tenable dans les endroits où l’épidémie flambe. On fait croire que les professeurs malades sont remplacés, c’est faux. On est forcé de répartir les élèves dans les autres classes… Le virus circule encore plus vite.»
Scénario 2 : continuer à fermer, classe par classe
C’est le scénario actuel, qui a la particularité de ne rassurer ou de ne satisfaire personne. Exception faite du gouvernement peut-être. Jeudi dernier, le Premier ministre annonçait un protocole sanitaire renforcé dans les 19 départements confinés. Avec, pour principal changement, la fermeture des classes dès le premier cas de Covid confirmé. Et non plus à partir de trois cas, ce qui reste la règle pour les autres départements. Selon les retours du terrain, les messages de fermeture de classes tombent comme à Gravelotte dans les boîtes mail des parents. Même s’il n’est pas possible d’avoir de vue d’ensemble : le ministère ne communique pas de chiffres pour l’instant. «Certains établissements sont dans une situation très critique, les classes ferment les unes après les autres, alerte Sophie Vénétitay, secrétaire générale adjointe du Snes-FSU. Dans ces cas-là, je ne comprends pas : arrêtons de tergiverser et fermons l’établissement en entier une semaine. Pourquoi jouer la montre si ce n’est pour l’affichage des chiffres ?» Elle réclame aussi davantage de tests massifs dans les établissements, regrettant qu’ils soient encore trop peu acceptés par les élèves. «Aujourd’hui, la stratégie «tester, isoler, tracer» ne fonctionne pas.»
Scénario 3 : classe à mi-temps, pour tous
Pour l’instant, seuls les lycées des départements confinés sont tenus de fonctionner en «demi-jauge». Avec une ambiguïté derrière ce terme : la moitié de l’effectif s’entend à l’échelle de l’établissement, et non de chaque classe. Du coup, certaines classes, notamment les prépas, fonctionnent à effectif complet, comme avant. «Il faut imposer des demi-groupes partout, et étendre le principe aux collèges des 19 départements, réclame Sophie Vénétitay, du Snes. C’est une mesure évidente, urgente, si on veut éviter de tout fermer. Chaque jour compte.» A appliquer aussi dans les écoles maternelles et primaires ? C’est un scénario crédible, qui fait d’ailleurs partie des plans élaborés par le ministère au cœur de l’été dernier. Un premier test grandeur nature avait d’ailleurs été effectué, à la sortie du confinement en mai dernier, de façon improvisée. «Le seul problème, c’est qu’on est toujours dans la même improvisation, se désole Guislaine David, secrétaire générale du SNUipp-FSU. On aurait dû préparer les élèves, leurs parents, que chacun sache comment s’y prendre. Mais le ministère était tellement dans le déni que nous n’avons pas pris ce temps d’anticipation.»
Scénario 4 : accélérer la campagne de vaccination pour tous les profs ?
Pas gagné. Guislaine David, du Snuipp, est à deux doigts du rire nerveux : «Encore faudrait-il qu’il y ait les doses… Et en avoir fait une priorité dès le mois de janvier.» Le corps enseignant représente plus de 800 000 agents, auxquels s’ajoutent le bataillon de professeurs contractuels et le personnel qui intervient auprès des élèves (Atsem, personnel du périscolaire, AESH, agents d’entretien…). Quand bien même tous seraient vaccinés dans les prochaines semaines, cela ne résoudrait pas la circulation du virus d’élève à élève.
Marie Piquemal
/https%3A%2F%2Fwww.liberation.fr%2Fresizer%2FSCXyUv03A1PY5w54YqBMwshx2RA%3D%2F1200x630%2Fcloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com%2Fliberation%2FJNZXFKGGGRGWXPXF3UVLFXGQAQ.jpg)
Covid-19 : à l'école, quatre scénarios à étudier
Vu la courbe des contaminations et les prévisions des services de réanimation, difficile de ne pas se poser la question : faut-il garder les écoles ouvertes ? N'est-ce pas le dernier levier ...