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Vivement l'Ecole!

Rentrée 2019 : «N’allons pas trop vite» sur les apprentissages en maternelle...

3 Juin 2019 , Rédigé par Le Parisien Publié dans #Education

Rentrée 2019 : «N’allons pas trop vite» sur les apprentissages en maternelle...

 

Maryse Chrétien, présidente de l’Association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publiques (Ageem) réagit à la nouvelle circulaire, qui renforce l’apprentissage du calcul et du français avant le CP.

Alors que la traditionnelle « circulaire de rentrée » met l’accent sur les 3-6 ans, nous avons interrogé Maryse Chrétien, professeure en petite section et directrice d’école depuis vingt-cinq ans en Haute-Marne. Elle dirige depuis septembre l’Association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publiques (Ageem).

La circulaire de rentrée cadre très précisément, pour la première fois, l’enseignement en maternelle. Cela va-t-il changer la manière de faire classe ?

MARYSE CHRÉTIEN. Je crois que les professeurs s’en serviront avec bon sens, en prenant ce qui est utile dans leur pratique, avec toute l’autonomie dont ils disposent. On n’enseigne pas de la même manière, par exemple, avec 15, 25, ou 32 enfants. Et on peut adapter les recommandations. L’enseignement régulier et structuré des nombres demandé dans la circulaire peut très bien se faire autour d’un jeu de petits chevaux ou d’un loto.

La circulaire ne fait mention que des apprentissages du français et des mathématiques. Le regrettez-vous ?

C’est un choix du ministre de mettre la focale sur ces aspects mais on passe aussi énormément de temps, en maternelle, dans des activités artistiques et de découverte du monde. On continuera de le faire, car c’est aussi à l’occasion de ces ateliers que les enfants acquièrent du vocabulaire et se familiarisent avec les nombres.

La maternelle française n’est plus un modèle pour les autres pays du monde. Que faudrait-il faire, à votre avis, pour lui redonner son aura ?

Proposer de vrais parcours de formation solides pour les professeurs. Dans les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espé), les étudiants reçoivent au maximum 20 heures de cours sur la maternelle. C’est bien trop peu. Comprendre le développement de l’enfant demande un vrai apprentissage.

Jugez-vous utile de fixer des objectifs de réussite en langage et en mathématiques ?

Il est important d’avoir des repères annuels mais ils ne doivent pas devenir une épée de Damoclès au-dessus de la tête des élèves. La maternelle sert à donner les clés de la lecture, pas à apprendre à lire comme au CP. Des parents ont déjà intégré la pression des objectifs et voudraient que leurs enfants sachent lire en fin de grande section. Mais ce n’est pas ainsi que cela fonctionne. N’allons pas trop vite.

Pourquoi ne pas essayer d’aller plus vite dans les apprentissages ?

Parce que le rôle de la maternelle est d’abord d’accueillir l’enfant et de l’aider à devenir progressivement un élève, pour le mettre en capacité d’apprendre au CP. La maternelle a évidemment un rôle à jouer dans la prévention de l’échec scolaire, mais on ne peut pas décréter que tous les enfants doivent connaître les syllabes et savoir les associer en fin de maternelle. Cette école doit rester un lieu de sérénité, où l’évaluation est toujours positive : on dit à l’élève ce qu’il sait, et on l’encourage pour apprendre davantage.

Christel Brigaudeau

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Serge Reggiani... "Les loups sont entrès dans Paris"...

2 Juin 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Musique

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Coup de coeur... Michel Serres...

2 Juin 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Philosophie

EXTRAITS

Le but de l'instruction est la fin de l'instruction, c'est-à-dire l'invention. L'invention est le seul acte intellectuel vrai, la seule action d'intelligence. Le reste ? Copie, tricherie, reproduction, paresse, convention, bataille, sommeil. Seule éveille la découverte. L'invention seule prouve qu'on pense vraiment la chose qu'on pense, quelle que soit la chose. Je pense donc j'invente, j'invente donc je pense : seule preuve qu'un savant travaille ou qu'un écrivain écrit.

(...)

Il faut fréquenter les bibliothèques, certes ; il convient, assurément, de se faire savant. Étudiez, travaillez, il en restera toujours quelque chose. Et après ? Pour qu'il existe un après, je veux dire quelque avenir qui dépasse la copie, sortez de la bibliothèque pour courir au grand air ; si vous demeurez dedans, vous n'écrirez jamais que des livres faits de livres. Ce savoir, excellent, concourt à l'instruction, mais celle-ci a pour but autre chose qu'elle-même. Dehors, vous courrez une autre chance.

(...)

On croit volontiers que la langue analysée par la grammaire et la philosophie vaut la langue vive inventée par l'écriture. Non. Le grammairien, le professeur, le philosophe n'écrivent pas assez pour savoir. Avez-vous remarqué, dans les classes, les écoles et les amphithéâtres, l'absence d'exercice vrai ? L'examinateur ou juge n'exige jamais poème, nouvelle, roman ni comédie, jamais de méditation, mais toujours de la critique ou de l'histoire, copie de copies. Pourquoi ? Parce qu'il ne saurait pas rédiger de corrigé. Au contraire, il exige histoire, critique, analyse. Pourquoi ? Parce qu'il peut et sait recopier. Pourquoi ? Pour la facilité. Faire explore, défaire exploite. Ne mentez pas, écrivez. Toute la vérité, mais rien qu'elle.

(...)

Nous organisons méticuleusement un monde où seul le savoir canonisé régnera, espace qui risque de ressembler de près à la terre couverte de rats. Unifiée, folle, tragique, la science gagne, va bientôt régner, comme règne et gagne l'hiver. Excellent, le savoir, certes, mais comme le froid : quand il reste frais. Juste et utile, la science, assurément, mais comme la chaleur : si elle demeure douce. Qui nie l'utilité de la flamme et de la glace ? La science est bonne, qui le nie, et même, j'en suis sûr, mille fois meilleure que mille autres choses pourtant bonnes, mais si elle prétende qu'elle est seule et toute bonne, et qu'elle se conduise comme s'il en était ainsi, alors elle entre dans une dynamique de folie. La science deviendra sage quand elle retiendra elle-même de faire tout ce qu'elle peut faire.

Michel Serres - Le Tiers-Instruit

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"Phobies scolaires : le mal de grandir", quand l'école sème la panique (Video/Dispo jusqu'au 5 juin)

2 Juin 2019 , Rédigé par France.Tv Publié dans #Education

"Phobies scolaires : le mal de grandir", quand l'école sème la panique (Video/Dispo jusqu'au 5 juin)

"Ce sont de bons élèves. Ni décrocheurs, ni surdoués : des collégiens comme les autres. Un jour, pourtant, ils ont éprouvé une peur panique à l’idée de retourner à l’école.   « Phobie scolaire » : l’expression est récente, et le mal qu’elle décrit encore mystérieux. Chaque année, des milliers d’adolescents disparaissent des cours de récréation. La scolarité leur est devenue insupportable. Pourquoi ces jeunes font-ils un refus de l’école ? Quelles sont les peurs qui les tétanisent ? Les adultes sont désemparés : enseignants, mais aussi parents, qui voient leur enfant s’enfermer dans son mal-être. À Montpellier, une pédopsychiatre accueille ces jeunes adolescents déscolarisés en hôpital de jour. Elle les aide à cerner leurs angoisses, à apprivoiser leurs peurs pour mieux les surmonter. Pour la première fois, une caméra a pu suivre le travail du docteur Hélène Denis et de son équipe. Ce sont d’autres apprentissages qui se jouent entre ces murs : apprendre à se connaître par la psychothérapie, à respirer par le yoga, à s’entraider par les jeux de rôle… Une petite salle de classe, avec un professeur unique, maintient le lien avec l’univers scolaire.   Dans l’effectif cette année, il y a Léane, 13 ans. Elle adore l’école. Mais sa peur de l’échec et des mauvaises notes la paralyse. Nolann, lui est en 5ème. Sa peur des autres, de leur jugement, lui rend impossible l’idée de retourner au collège. Lila, elle, a peur de tout. Des autres, des profs, des notes... de grandir aussi. Et Laurie, qui est en 6ème, dit avoir « peur de sa peur ». Quatre petits cabossés, quatre ados noués par le mal de grandir. Le film les suit pendant toute une année, de leur arrivée dans l’unité jusqu’à leur retour au collège et à une vie « normale » à la rentrée suivante."

réalisé par : Cécile Tartakovsky

Vidéo à regarder en cliquant ci-dessous

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Réécoutons Michel Serres - L'innovation et le numérique... (Vidéo)

2 Juin 2019 , Rédigé par Panthéon-Sorbonne Publié dans #Education, #Numérique

La révolution numérique en cours aura selon Michel Serres des effets au moins aussi considérables qu’en leur temps l’invention de l’écriture puis celle de l’imprimerie. Les notions de temps et d’espace en sont totalement transformées. Les façons d’accéder à la connaissance profondément modifiées. A cet égard, chaque grande rupture dans l’histoire de l’humanité conduit à priver l’homme de facultés ("l’homme perd") mais chaque révolution lui en apporte de nouvelles ("l’homme gagne"). A la part de mémoire et de capacité mentale de traitement de l’information qu’il perd avec la diffusion généralisée des technologies numériques, l’homme gagne une possibilité nouvelle de mise en relation (d’individus, de groupes et de réseaux, de savoirs) mais aussi une faculté décuplée d’invention et de création. C’est probablement de ce côté-là que se trouvent les réponses aux enjeux contemporains de l’humanité.

Michel Serres a souligné que l’écart entre les pratiques nouvelles nées de la diffusion généralisée, dès le plus jeune âge, du numérique et celles des organisations instituées à une époque où l’humanité vivait autrement, est devenu considérable. L’entrée dans cette nouvelle ère de l’humanité interpelle la sphère académique. L’École et l’Université doivent engager leur métamorphose.

Michel Serres, de l'Académie française, a prononcé cette conférence inaugurale le 29 janvier 2013 pour le lancement officiel du Programme Paris Nouveaux Mondes, l'Initiative d'excellence du Pôle de recherche et d'enseignement supérieur "hautes études, Sorbonne, arts et métiers"(Pres héSam).

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Education - « Une école préfigure toujours un projet de société »

2 Juin 2019 , Rédigé par L'Humanité Publié dans #Education

Education - « Une école préfigure toujours un projet de société »

L’universitaire en sciences de l’éducation, souvent présenté comme la figure de proue des pédagogues, poursuit sa réflexion concernant l’enseignement public. Dans la Riposte, il appelle à œuvrer « sans fatalisme et sans simplisme » devant les politiques éducatives actuelles et les évolutions sociales et sociologiques.

Dix ans après le Devoir de résister (ESF éditeur), qui s’en prenait déjà au retour aux bonnes vieilles méthodes, vous publiez la Riposte (Autrement). À qui, à quoi entendez-vous riposter ?

Philippe Meirieu Au fatalisme et au simplisme en matière éducative. À ce fatalisme qui a pu prendre le visage de la « psychologie des dons » en expliquant qu’il y avait les enfants prédestinés à la réussite et les autres, et parfois le visage d’un « sociologisme » déterministe, pour qui les difficultés sociales étaient insurmontables et que de ce fait les enseignants ne pouvaient que se désespérer en contemplant la reproduction des inégalités. Ce fatalisme prend la forme d’un libéralisme technocratique auquel il n’y aurait pas d’alternative : le service public qui s’efforçait de garantir, grâce à l’effort de l’État et au soutien de la nation, un droit à l’éducation pour toutes et tous, serait condamné, voué à être remplacé par une multitude de services au public mis en concurrence, répondant à la diversité des aspirations idéologiques et claniques de groupes sociaux condamnés à s’ignorer. Je suis exaspéré par l’avalanche de solutions simplistes et de remèdes miracles qui dévale sur l’éducation et l’école : cela va de la méthode de Singapour, censée résoudre miraculeusement les problèmes d’apprentissage en mathématiques, au « retour » de la méthode syllabique, qui permettrait d’apprendre à lire et à comprendre de manière quasiment mécanique, jusqu’au merchandising autour de la méthode Montessori, qui réconcilierait l’acquisition des fondamentaux et celle de l’autonomie, ou au matraquage sur les neurosciences, qui nous livreraient enfin la clé universelle de l’enseignement. Et je ne dis rien de cette profusion invraisemblable des « outils de développement personnel » recyclés en éducation, de la « méditation de pleine conscience » à la « psychologie positive » ! Tout cela renvoie, d’ailleurs, une question de société : quand la lutte quotidienne pour une vie décente et la mise en concurrence systématique entre les personnes provoquent autant de souffrances et de blessures, tant que l’on ne veut pas s’attaquer au mal profond, on se contente (et on fait du profit avec cela !) de mettre sur le marché des pansements individuels pour rendre la situation à peu près tolérable.

Dans votre ouvrage, vous vous situez à mi-chemin entre « antipédagogues » et « hyperpédagos ». Concernant les premiers, vous parlez même d’un « antipédagogisme officiel » de la part du ministre de l’Éducation. Qui sont ces « antipédagogues » ?

Philippe Meirieu À mi-chemin n’est pas le mot qui convient. Je récuse aussi bien ceux qui croient qu’il suffit de « distribuer » les savoirs pour que tous les enfants se les approprient que ceux qui imaginent que l’enfant seul peut tout découvrir dès lors qu’on le place dans la nature et qu’on le regarde avec amour ! Transmettre est un impératif, mais cela nécessite des situations adaptées aux élèves, des contraintes fécondes et des ressources identifiées, un vrai travail pédagogique de la part de l’enseignant… L’antipédagogisme officiel est une sorte de constante des gouvernements de droite : on l’a vu sous Luc Ferry, Xavier Darcos, Gilles de Robien… et on le voit aujourd’hui. Il surfe sur quelques lieux communs comme le « retour de la méthode syllabique et de la dictée », le « retour de l’uniforme » (qui n’a jamais existé chez nous), le « retour des fondamentaux » (comme si les enseignants avaient renoncé à apprendre à lire, écrire et compter à leurs élèves), le « retour de la culture » (alors qu’on abandonne, par ailleurs, les politiques culturelles), le « retour de l’autorité » (qu’aucun professeur n’a jamais voulu abandonner et pour laquelle il voudrait bien être formé). Tout cela constitue une sorte de nébuleuse idéologique dans l’air du temps qui disqualifie la pédagogie, caricaturée sous le nom de « pédagogisme » et évacue toute une tradition qui, de Pestalozzi à Makarenko, de Korczak à Freinet, de Paulo Freire à Fernand Oury, a travaillé sur les moyens de transmettre et émanciper en même temps. Cette tradition est ignorée et je suis convaincu que cela contribue à désarmer les enseignants et à laisser se développer des pratiques génératrices d’inégalités, voire de violences.

Avez-vous été sollicité pour faire partie du Conseil scientifique de l’éducation mis en place par Jean-Michel Blanquer ?

Philippe Meirieu Non, bien sûr. Le débat démocratique sur l’éducation n’a pas véritablement droit de cité. Le ministre ne débat jamais avec le moindre contradicteur, il ne donne que des interviews. À cet égard, ses prédécesseurs comme Xavier Darcos étaient bien plus ouverts. Non seulement ils prenaient parfois le risque de la contradiction, mais ils s’entouraient aussi d’avis venant d’horizons divers. Le Conseil scientifique actuel me semble très fortement connoté neurosciences, et encore, une certaine tendance des neurosciences. Il y a un nouveau scientisme qui croit pouvoir dicter les pratiques à partir des seules connaissances scientifiques empruntées à un champ donné… Attitude qui est tout sauf scientifique !

Selon vous, la rationalité technocratique aboutirait à creuser les inégalités. En quoi le paradigme de l’efficacité avancé par le ministre est-il illusoire et dangereux ?

Philippe Meirieu L’efficacité en soi, cela n’existe pas. On est toujours efficace « pour » ou « à » quelque chose. Le paradigme actuel renvoie à une conception étriquée et utilitariste de l’efficacité. Il évalue les apprentissages de base de manière standardisée sans s’intéresser à ce qui fait sens pour l’élève, à son rapport au savoir et son entrée dans la culture. Or, on connaît bien le phénomène que les Anglo-Saxons nomment Teaching to the test : les enseignants ne forment plus qu’à ce qui sera évalué. Les élèves à l’environnement linguistique et culturel défavorisé sont cantonnés à des savoirs de base dont ils ne comprennent pas les enjeux.

Contre les hyperpédagos, vous critiquez une sorte de spontanéisme ou de consumérisme éducatif, conséquence de l’individualisme qui ferait de l’enfant un projet familial.

Philippe Meirieu Les hyperpédagos peuvent apparaître très minoritaires. Ils le sont statistiquement : les écoles alternatives ne scolarisent que peu d’élèves, mais leurs effectifs croissent de plus de 15 % par an depuis quatre ans, et de plus en plus de parents disent que, s’ils en avaient la possibilité, ils mettraient leurs enfants dans ces écoles. Certes, le phénomène est lié à la montée de l’individualisme, à la fascination pour l’entre-soi et à la volonté d’échapper à la mixité sociale et idéologique. Mais on ne peut pas complètement exonérer l’éducation nationale de toute responsabilité : il est vrai qu’elle peine à se montrer attentive aux besoins de tous les enfants et reste très méfiante à l’égard des pédagogies coopératives.

Vous évoquez une complicité objective entre antipédagos et hyperpédagos, tous allant à l’encontre de l’école publique et populaire…

Philippe Meirieu Oui, les premiers privatisent l’école publique par leur élitisme, les seconds se réfugient dans des écoles privées pour rester entre eux. Les premiers veulent promouvoir l’homogénéité intellectuelle, les seconds veulent promouvoir l’homogénéité idéologique. Mais ces deux formes d’homogénéité sont, l’une et l’autre, très largement sociales.

Qui sont alors les pédagogues ? Au-delà d’enseignants isolés, pensez-vous aux enseignants du mouvement Freinet, du GFEN ?

Philippe Meirieu Oui, bien sûr. Il y a de remarquables pédagogues dans l’enseignement public, dans les mouvements pédagogiques et au-delà. Ce sont ceux qui rejettent le fatalisme et le simplisme, et qui, face à des difficultés sociales considérables et à une hiérarchie souvent inquiète dès que quelqu’un « sort des clous », mettent en place des pédagogies exigeantes avec des contenus culturels ambitieux, avec l’implication de chacun et des règles nécessaires au « faire ensemble », avec l’implication des élèves dans des dispositifs d’entraide et avec une évaluation, non qui « nous fait entrer en concurrence avec les autres, mais qui permet de devenir meilleur que soi-même », comme le disait Albert Jacquard.

Que pensez-vous de la politique éducative du gouvernement, notamment de la mesure phare, le dispositif « 100 % de réussite », qui consiste à dédoubler des classes de CP et de CE1 ?

Philippe Meirieu Nul ne peut contester l’intérêt de baisser les effectifs dans les classes qui scolarisent les élèves le plus en difficulté. Mais beaucoup d’élèves en grande difficulté ne sont pas en REP+. De plus, on a dédoublé les classes en brisant presque complètement le dispositif « Plus de maîtres que de classes », qui était très prometteur et n’a pas été évalué. On l’a fait à moyens presque constants, alors que notre enseignement primaire est très largement sous-doté. Bref, « donner plus et mieux à ceux qui ont moins », ça reste encore devant nous.

Vous plaidez pour une école de la décélération, de l’attention, une école inclusive soucieuse d’hétérogénéité, du plaisir d’apprendre, une école de la coopération qui apprendrait à chacun à devenir meilleur que lui-même, avec les autres.

Philippe Meirieu Oui, ce sont de vrais objectifs, essentiels pour l’école de la République. Ces objectifs s’incarnent, certes, dans des apprentissages disciplinaires précis, mais il ne faut pas que ces derniers oublient qu’ils sont au service du développement de l’intelligence et de la socialité. On a trop tendance à se fixer sur des compétences techniques évaluables de manière chiffrée et à oublier les responsabilités de l’éducation en matière de formation d’un sujet qui « ose penser par lui-même ». Quant au plaisir d’apprendre, ce n’est pas un élément anecdotique, loin de là : si nous ne savons pas réconcilier tous les élèves avec le plaisir d’apprendre et la joie de comprendre, nous réservons l’accès aux connaissances à ceux qui ont découvert ce plaisir et cette joie dans leur environnement.

Cela signifie-t-il que rendre un sens à l’école est inévitablement un projet politique ?

Philippe Meirieu Bien sûr ! L’école n’est pas un lieu politique au sens où elle ne scolarise pas des citoyens mais forme à la citoyenneté. En revanche, un système scolaire est toujours, par ce qu’il enseigne et sa manière de fonctionner, un système politique. Ce qui importe d’ailleurs, dans ce domaine, c’est moins ce qu’il affiche que ce qu’il met en pratique, comment il incarne la liberté (tous les élèves sont-ils vraiment « libres » d’aller en classes prépas ?), l’égalité (le baccalauréat professionnel est-il vraiment « à égale dignité » avec le baccalauréat général ?) et la fraternité (comment faisons-nous vivre au quotidien la découverte de la différence qui enrichit ?). Une école préfigure toujours un projet de société : elle est « prépolitique », mais surtout pas apolitique.

Que pensez-vous de l’actualité des mouvements sociaux atypiques en cours ?

Philippe Meirieu Les mouvements populaires en cours témoignent d’un immense déficit de justice et de reconnaissance sociales. Ils disent aussi la difficulté de construire du bien commun par la seule juxtaposition des intérêts individuels. En toute logique, ils appelleraient une refondation de l’école de la République autour de ses vraies valeurs, articulée à une vision de la société réellement fraternelle, avec un accès aux droits fondamentaux. Là, comme dans bien des domaines, on ne peut plus se contenter de gérer et de boucher les fissures de temps en temps. Il faut imaginer une véritable alternative au processus de distillation fractionnée qui domine aujourd’hui.

Entretien réalisé par Nicolas Mathey
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Jack Johnson...

1 Juin 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Musique

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Coup de coeur... Patrick Grainville...

1 Juin 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Soudain le mouvement, le feu. Dans l’interstice entre deux pierres disjointes de la muraille. Une merveilleuse foudre les frappa. La vie de l’autre côté, dans l’invisible. Le secret. Ils repartirent pleins de trouble, éblouis. Assaillis par mille questions, promesses. Ils grimpèrent sur leurs scooters tout neufs. Libres de filer partout, toujours. Ils rejoignirent les Maures, plongèrent dans leur sauvagerie, le chamboulement de collines serrées, de rochers, d’ombres, de versants noirs. Ils en connaissaient les sentiers perdus. Ils s’arrêtèrent dans un vallon étroit gorgé d’un soleil éclatant et coururent entre les arbousiers en se tenant la main. Cette euphorie les prenait tout le temps. S’élancer aveuglément, la course du cœur battant jusqu’à tomber dans l’herbe. En regardant le ciel, ruisselants de sueur, pantelants.

– On a bien vu ! dit Louise.


– On a vu la même chose, répondit Luc.


Dans l’accroc du mur, l’ondulation furtive. La vie derrière l’écran. Quelque chose qui transformait le monde. Ils revinrent dans le petit immeuble du village où leurs deux familles habitaient. Les parents étaient absents.

Ils allèrent dans la chambre de Louise. Ils se déshabillèrent à toute vitesse et ils s’étreignirent dans la frénésie de leur vision. La porte s’ouvrit d’un coup, le père de Louise les surprit enlacés, dorés, goulus. Luc entre les cuisses de Louise, son dos brun et fin. Convulsé. Il fonça sur le garçon, l’arracha du ventre de sa fille, le gifla, voulut le chasser.

Louise se rebiffa, toute nue :

– Ce n’est pas à toi de nous empêcher ! On fait ce qu’on veut !

La violence de sa fille surprit le père, il se ressaisit et hurla :

– Fiche le camp ! Disparais !

Elle le regarda en proie à la fureur et dans une grimace de haine lui lança :

– Tu trompes maman, tu crois qu’on ne le sait pas, avec la mère de Luc, on vous a vus ! Tu n’as rien à nous interdire, tu vis dans le mensonge !

Le père de Louise ouvrit la bouche, stupide, hagard :

– Salope !


– Ose dire que ce n’est pas vrai !


Luc admirait la colère de Louise. Il était rempli d’émoi et de fierté. Il n’avait pas peur du père qui s’était tourné vers lui avec une interrogation de rage et de désespoir. Luc renchérit :

– On vous a vus.

Et ils se tenaient là, debout devant lui, nus, beaux. Leur beauté l’éclaboussait. Dans son impuissance furieuse. Les deux gosses braqués, quatorze ans chacun de mauvaiseté concentrée. Le sexe de sa fille, celui de Luc, les deux sexes sans pudeur. Ils couchaient ensemble. Ils l’attaquaient. Et c’était impossible que Louise couche avec Luc. Pas elle, pas lui. Pas dans l’enfance, pas maintenant. Il était sidéré par leur autonomie, leur détermination. Deux animaux, deux bêtes qui montraient les crocs, le mordaient. Ils jaillissaient soudain, sortis de leur gangue, inconnus, venimeux, tordus de hargne. Prêts à tuer ! Oui, capables de le tuer ! Il avait enfanté ça ! C’était là, d’un bloc, deux juges, deux bourreaux.

Il quitta la pièce, les laissant tous les deux dans la chambre de Louise, chez lui. Vaincu.

Patrick Grainville - Le démon de la vie

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Le Jardin du Luxembourg... "J’aime tant le Luxembourg et ton visage trempé…"

1 Juin 2019 , Rédigé par christophe Publié dans #Littérature

Le Jardin du Luxembourg

Juillet 2018...

(A lire en écoutant Alison Balsom à la trompette… )

Il existe dans le monde des endroits semblant avoir été « inventés » pour servir de cocon à des méditations solitaires, des promenades, des rendez-vous amicaux ou amoureux.

Comme ce parc, à El Jadida... Il permettait d’aller lire, de profiter de l’ombre que les larges branches de palmiers-dattiers agitées par le vent marin apportaient, soulageant les corps alourdis par les fortes chaleurs.

Le soir, avant que la nuit s’effondre sur le jour, car la nuit tombe vite au Maroc, je m’asseyais sur les marches descendant de l'entrée de la maison vers la rue. J’attendais l'explosion joyeuse des étoiles étincelant le ciel. J’attendais aussi les cris d’un couple de paons que le parc accueillait. Ils venaient toujours, présents au rendez-vous, accompagnant mes rêves d’enfant surpris par la beauté. Plus tard, à l’université de Rouen, je retrouverai, émerveillé, mes étoiles et mes paons dans « La Sepmaine », ce poème-fleuve de Guillaume Salluste du Bartas :

« Comme un paon, qui navré du piqueron d’amour,
  Veut faire, piafard, à sa dame la cour,
  Etaler tâche en rond les trésors de ses ailes
  Peinturées d’azur, marquetées d’étoiles,
  Rouant tout à l’entour d’un craquetant cerceau,
  Afin que son beau corps paraisse encore plus beau »

J’y consacrerai mon Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) sous la direction bienveillante et lumineuse de Françoise Joukovsky.

Plus tard encore, me rendant souvent à Paris, je tomberai amoureux d’un autre jardin.

Celui du Luxembourg.

Prévert, Coppée, Modiano, tant d’autres ont évoqué ce lieu. Je le fréquenterai souvent, seul ou accompagné. Ses arbres, ses pièces d’eau, ses feuilles mortes ramassées à la pelle en automne, ses bancs, ses cris d’enfants, ses parents lisant d’un œil, surveillant de l’autre le rejeton qui s’amuse.

Et puis là-bas, tout au fond de l’allée principale, toi !

Légère et élégante, j’attends que tu approches. J’attends que tu sois là. J’attends en espérant que l’attente soit plus longue. L’instant est précieux. Avant le baiser, sur nos joues offertes à la tendresse et ton regard profond magnifiant tout dans la seconde, cette seconde, qui plus tard, j'en suis certain, reviendra en souvenir involontaire...

Avec toi, j’ai passé, vraiment ou en rêve – va savoir – des heures à deviser, à refaire notre monde qui en a tant besoin.

Il y a dans ce jardin ce que mes voyages m’ont offert à savourer. Les lumières de Tipasa, la fraîcheur d’Hyde Park, les mystères de Ryoan-ji, les douceurs de Majorelle, les tableaux de Giverny…

Je te reverrai au Luxembourg… Nous ferons « orchidée » comme d’autres faisaient « catleya ». Je tiendrai ta main dans la roseraie. Et ne la lâcherai plus…

La France, en ce mois de juillet, bruisse et souffre des échos d’une affaire politique grave. Je suis loin de Paris. C’est au jardin du Luxembourg que j’enfouis ma mémoire. C’est au jardin du Luxembourg que j’offre mes projets. La « Macronie » peut bien trembler. S’effondrer. Je m’en fiche. Elle obtient ce qu'elle mérite.

Je sais que tu viendras, élégante et légère, me tendre tes joues fraîches sous la pluie de septembre.

J’aime tant le Luxembourg et ton visage trempé…

Christophe Chartreux

“L’art sauvera le monde.” - Dostoïveski

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Circulaire de rentrée : Ce que des enseignants en disent..

1 Juin 2019 , Rédigé par Le café Pédagogique Publié dans #Education

Circulaire de rentrée : Ce que des enseignants en disent..

EXTRAIT

Publiée au bulletin officiel du 29 mai, la circulaire de rentrée fait grincer des dents. Sur la forme, sur le fond, les craintes sont multiples. Professeur des écoles, directeurs et inspecteurs de l’éducation nationale font part de leur ressenti. D’autres ont préféré passer leur tour, « cette circulaire à la fois vide de sens didactique et pédagogique, est insupportable par son cadrage des enseignants ».

« On peut faire du lire-écrire-compter jour et nuit, on n’améliorera pas le niveau en gavant nos élèves comme des oies »

Mathieu est directeur depuis plus de dix ans. Il en a lu des circulaires mais celle-ci lui semble particulièrement injonctive et directive. « Le ministre reste sur son idée d'une seule pédagogie, d'un seul type d'apprentissage en oubliant que la construction des compétences ne peut se limiter à un seul courant de pensée. Où est la marge de manœuvre des enseignants ? Où est l'adaptabilité nécessaire aux façons d'apprendre des élèves ? Va-t-on vers une société standardisée ? » Il n’est pas plus rassuré lorsque l’on aborde le contenu et les préconisations du ministère. « Il enfonce des portes ouvertes. Oui un enseignant ne peut se passer de séances d'apprentissage systématisées. Mais il ne peut s’en contenter. Qu’en est-il de la transversalité ? De l'épanouissement de l'élève, qui n’est abordé que pour les maternelles ? De la culture humaniste ? J'ai l'impression que nous devenons une fabrique de bons soldats et non plus de citoyens. On peut faire du lire-écrire-compter jour et nuit, on n’améliorera pas le niveau en gavant nos élèves comme des oies. Il faut autre chose... »

Mourad est directeur lui aussi. Selon lui, « la circulaire est extrêmement directive. Pour de jeunes enseignants c'est peut-être rassurant d'être guidé notamment s'ils débutent avec un CP. Mais pour des enseignants chevronnés les préconisations, si ce ne sont que des préconisations, peuvent paraître étranges. La plupart des PE ont conscience de l'importance de tous ces points, tels que la relation aux parents, la mise en confiance des élèves… Ils mettent déjà en place des dispositifs permettant un traitement individualisé de leur parcours. Ainsi avec ce texte, les enseignants peuvent se demander si leur travail est réellement reconnu car on a l’impression qu'on découvre des pratiques qui sont déjà ancrées dans notre quotidien. Cette circulaire apporte des recommandations qui sont tellement précises qu'elles ressemblent à des prescriptions. En tant qu'ancien enseignant de CP et directeur d'école je vois à quel point la pression est mise depuis l'an dernier sur les enseignants de CP.  Le nom du dispositif, 100% de réussite, ajoute à lui seul une énorme pression ».

(...)

François Jarraud

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