Les modifications des programmes scolaires imposées «à marche forcée»?...
Présentés jeudi lors du Conseil supérieur de l’éducation, les ajustements des programmes des cycles 2 à 4, prévus pour une application à la rentrée 2018, ont provoqué l’ire des syndicats : de nombreuses organisations ont préféré quitter la séance.
La décision a fait grand bruit dans la communauté éducative. Le «projet d’ajustement et de clarification» des programmes de français, maths et enseignement moral et civique (EMC) des cycles 2 à 4 (du CP à la troisième) était à l’ordre du jour du Conseil supérieur de l’éducation (CSE, instance consultative du ministère de l’Education nationale), ce jeudi. Le projet, annoncé le 14 juin, est prévu pour une application à la rentrée 2018. Un calendrier très court qui inquiète les syndicats. «Nous avons demandé le retrait de l’ordre du jour de ces projets de programmes, ce que le ministère a refusé de faire. Il a continué à imposer ce travail à marche forcée, à mettre en œuvre à la rentrée», tonne la secrétaire nationale du SE-Unsa, Claire Krepper. Face à ce refus, de nombreuses organisations syndicales (SE-Unsa, SNES-FSU, CGT-Education, FCPE, Unef, Solidaires…) ont décidé de plier bagage et de quitter la séance.
La secrétaire générale adjointe SNES-FSU, Valérie Sipahimalani, explique : «Il ne s’agit pas seulement d’ajustements. Le programme d’EMC a notamment des modifications de fond. Ces programmes vont être publiés durant l’été et devraient se mettre en place à la rentrée. C’est inacceptable. En outre, les textes ne nous ont été communiqués par le Conseil supérieur des programmes (CSP) que deux semaines avant ce jour, des délais de travail impossibles à tenir pour des textes de cette nature.» Claire Krepper souligne de son côté : «On aurait peut-être pu faire passer quelques amendements cosmétiques, mais sur le fond, le ministère avait décidé de ne pas changer d’avis.» En interne, des tensions couvent également. Trois membres du CSP ont contesté, mercredi, certaines déclarations de leur présidente, Souâd Ayada, dans une interview au Point. Ils regrettent notamment que le travail du CSP sous le quinquennat précédent soit «dénigré», ce qui diviserait la communauté éducative avec le «risque d’affaiblir la confiance en l’institution scolaire».
Retour en arrière
Au-delà de la méthode et du calendrier imposés, le contenu des ajustements est également décrié. Les inquiétudes se cristallisent sur les modifications apportées aux programmes de français et d’EMC, ceux de maths étant relativement peu touchés. Sans surprise, comme dans les circulaires du ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer, transmises en avril, on retrouve l’étude des quatre opérations de calcul dès le CP, mais aussi l’apprentissage de l’ensemble de la conjugaison du passé simple en CE2-CM1-CM2, la préconisation de la méthode syllabique pour l’apprentissage de la lecture ou encore la mise en place de dictées quotidiennes.
Un retour en arrière est également opéré du côté de la grammaire. Claire Krepper : «La leçon de grammaire est coupée du reste des activités de français. On doit travailler les exercices grammaticaux traditionnels en réutilisant d’anciennes terminologies très contestées, car tout à fait obscures pour les élèves, comme les COD et COI. Dans les programmes actuels, ils étaient nommés complément de verbe, c’est facile à comprendre pour les élèves.» La notion de prédicat, dont l’introduction dans les programmes avait fait polémique en 2016, est tout bonnement supprimée.
Une République trop théorique ?
Dernier point clivant, le bouleversement de la philosophie générale de l’EMC, basée jusqu’à présent sur l’expérience concrète des élèves. «Ils ont supprimé tous les exemples de mise en œuvre, alors que c’était surtout là-dedans que passait l’esprit des programmes : faire expérimenter et vivre aux élèves les règles de la vie en société, plutôt que d’en faire un enseignement traditionnel», déplore Claire Krepper. Diverses connaissances sont à acquérir du CE2 à la troisième comme le premier couplet de la Marseillaise, les symboles ou valeurs de la République française. La secrétaire générale adjointe du SNES-FSU note : «Le nouveau programme est conçu comme une prise d’informations dans laquelle il faut absolument qu’il y ait une trace écrite. On revient vers un EMC où les valeurs de la République se transmettent et ne se vivent pas, ce sont des conceptions radicalement opposées. Au lieu d’être dans la construction de l’esprit critique et de la citoyenneté, on est dans la transmission des valeurs et des règles. La citoyenneté à l’école est de confronter des idées, comprendre que l’on peut débattre de façon virulente avec des personnes avec qui on s’amuse à la récréation.»
Dans cette course contre la montre, reste encore au ministère à publier les repères annuels promis, qui doivent baliser les cycles de trois ans pour chaque matière.
Marlène Thomas
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Les modifications des programmes scolaires imposées "à marche forcée"?
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“Notre système d’orientation cristallise les inégalités” Interview de Marie Duru-Bellat, marraine de la Journée du refus de l’échec scolaire...
Marie Duru-Bellat, vous êtes sociologue de l’éducation, vous avez travaillé sur les mécanismes de l’orientation tout en étant précédemment conseillère d’orientation, comment définiriez-vous les spécificités de notre système d’orientation?
On peut souligner deux caractéristiques majeures. Il est très institutionnalisé, cadré par des règles relativement précises et mis en musique par des professionnels spécialisés, ce qui pourrait permettre un pilotage spécifique (une organisation précise et actualisée de la diffusion de l’information sur les métiers par exemple, ou encore une explicitation claire des droits des jeunes et des familles). Ce qui n’est pas toujours le cas…
Mais il est aussi très surdéterminé par le contexte global de l’emploi en France : un chômage des jeunes très marqué, un principe « adéquationniste » fort (à chaque emploi est censée correspondre une formation et vice versa), et un climat général de relatif pessimisme par rapport à l’avenir. Du même coup, les élèves abordent leur formation de manière souvent très utilitariste (on pense aux débouchés davantage, parfois, qu’à ses goûts), et très angoissée, car on sait que l’insertion professionnelle sera plus ou moins difficile selon les filières, et qu’on pense que le premier métier sera celui de toute une vie.
En quoi notre système d’orientation cristallise-t-il les inégalités?
Il cristallise les inégalités d’une part parce qu’il donne un poids essentiel à la réussite scolaire telle qu’évaluée par les notes ; or dans notre pays, la réussite des élèves est particulièrement marquée par leur milieu social d’origine, sans compter les imperfections de la notation elle-même. Alors que les différents itinéraires scolaires sont hiérarchisés aux yeux des enseignants et des élèves, on choisit d’autant plus facilement les « meilleures filières » (celles qui donnent accès aux emplois les plus attractifs) que l’on est un bon élève, alors que ceux qui ont plus de difficultés sont relégués dans les voies (et les métiers) dont personne ne veut (et où il y a de la place).
Mais notre système cristallise aussi les inégalités parce qu’il donne, officiellement du moins, beaucoup de poids aux voeux des élèves et de leurs familles : or ces vœux sont très inégalement ambitieux et informés. C’est un constat que l’on fait dans la plupart des pays européens : dans les inégalités sociales de cursus scolaires, les inégalités tenant spécifiquement à l’orientation comptent pratiquement autant que les inégalités liées à la réussite scolaire. Peut-être faudrait-il parfois, paradoxalement, donner moins de poids aux familles et/ou que l’institution les conseille plus précisément, pour contrer l’autos-élection que pratiquent systématiquement les familles les plus éloignées de l’école.
De quels exemples internationaux pourrait s’inspirer la France ?
Ce qui pourrait atténuer le caractère « dramatique » de l’orientation, ce serait avant tout que les jeunes n’aient pas le sentiment de jouer leur vie sur un « choix » scolaire, donc que des réorientations, des passerelles et des retours en formation soient à tout instant possibles. C’est à mes yeux le point essentiel. Mais il est clair que si tous les jeunes partaient dans la vie avec un bagage scolaire de bon niveau et moins inégal, cela faciliterait les choses.
Après, si nous donnions moins d’importance aux diplômes, comme certains pays voisins, alors là encore, l’orientation serait vécue de manière moins dramatique. Alors que nous pensons, en France, qu’il est juste de répartir les « places » dans la société sur la base des diplômes –parce que ceux-ci exprimeraient la valeur, le mérite, les compétences, des personnes-, on voit bien que tant que les diplômes seront aussi inégalement possédés par les uns et par les autres –pour des raisons dont l’école est elle-même responsable-, donner un poids important aux diplômes fige les inégalités. Mais cette idée, que nourrissent les comparaisons internationales[1], apparaît relativement paradoxale en France.
Pour cette 11e édition, la Journée du refus de l’échec scolaire explore le thème de l’orientation. CLIQUEZ ICI pour télécharger le document de présentation.
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[1]Voir « Les sociétés et leur école » (2010) et « 10 propositions pour changer d’école »(2015), F.Dubet et M.Duru-Bellat (Seuil).
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Quand Marlène Schiappa et Simone Veil parlent chignon...
Jamais je n'aurais imaginé parler un jour ici de chignons...
Encore moins d'associer à ce "sujet" deux femmes aussi différentes que peuvent l'être Marlène Schiappa et Simone Veil...
Et pourtant...
Je vous laisse le soin de regarder et d'écouter ces deux personnalités publiques, la première omniprésente sur les plateaux et réseaux sociaux, la seconde omniprésente dans nos mémoires.
C'est fait? Vous avez entendu?
Ou quand le chignon n'est pour l'une qu'une manière "d'apprendre à devenir sérieuse" - mesdames, sachez-le: en "Macronie", une femme "sérieuse" enferme sa chevelure dans un chignon - quand pour l'autre il se défait avec aisance, une classe folle et une distinction naturelle à couper le souffle.
En écoutant Marlène Schiappa, Secrétaire d'Etat chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes (Quand Najat Vallaud-Belkacem puis Laurence Rossignol furent Ministre "de plein exercice" soi-dit en passant), je me suis souvenu d'une phrase de ma grand-mère maternelle s'adressant à ma mère qui s'apprêtait à sortir faire quelques courses en ville. Ce devait être dans les années 1960:
"Mais enfin, tu n'y penses pas! Tu ne vas pas sortir "en cheveux!"
Ma mère avait oublié de mettre le chapeau que toute femme se devait de ne pas oublier, afin de dissimuler la chevelure, de préférence attachée. Ce jour-là, elle a d'ailleurs passé outre la recommandation outragée de ma grand-mère.
Nous sommes en 2018...
Je trouve absolument sidérant qu'une femme "dans et de son temps", épanouie, libre, puisse renoncer, d'une certaine manière, à une partie de sa féminité pour être écoutée par les mâles de l'Assemblée Nationale.
Merci donc à Simone Veil, à ma mère et à toutes ces femmes qui n'ont jamais renoncé et ne renonceront jamais à porter leur féminité plutôt que le chignon.
Fut-il magnifiquement confectionné...
Christophe Chartreux
Quand #Parcoursup alimente l'enseignement privé...
Post-bac, les pièges des écoles privées
Face aux incertitudes engendrées par Parcoursup, de nombreux bacheliers se détournent des formations publiques pour poursuivre leurs études. Mais les promesses de certaines écoles sont parfois mensongères et les diplômes pas toujours reconnus.
Ce sont trois copines, croisées peu avant les résultats du bac, à un salon étudiant à Paris. Myriam, Lauryn et Nithusha, 17 et 18 ans, «à la recherche d’un avenir», les bras chargés de brochures sur papier glacé. Acides dans leurs propos : «On nous laisse quel choix ? Personne ne veut de nous dans le public. Alors, c’est soit une formation privée, soit rien.» Aucun de leurs vœux en BTS n’a été satisfait et elles stationnent toujours en bas des listes d’attente à la fac.
C’est un organisateur du salon Studyrama, qui explique sans complexe avoir réservé les trois quarts de ses stands à des écoles privées (management, surtout) pour «présenter aux jeunes la richesse des formations qui ne sont pas répertoriées sur Parcoursup afin qu’ils puissent encore trouver une formation pour la rentrée.»
C’est un enseignant de Seine-et-Marne, dans un lycée de classe moyenne, qui se désole que ses classes ne soient jamais au complet à partir des vacances de printemps : «Il y a toujours un élève absent, en train de passer un entretien dans une boîte à BTS ou une école privée. C’était déjà comme ça l’année dernière. Je crois qu’à force d’entendre que l’université, c’est un carnage avec des taux d’échec énormes, les élèves intègrent que ce n’est pas pour eux.» Sa collègue, en filière technologique, raconte encore comment l’une de ses élèves, qui n’a eu que des «non» à toutes ses demandes de BTS, a reçu dans la foulée des résultats plusieurs coups de téléphone de vendeurs de rêve. En l’espèce, le rêve s’appelle école privée avec promesse de trouver du boulot à la sortie.
C’est enfin cette mère de famille qui a passé des heures à décortiquer par le menu les écoles de management «pour que [son] fils sorte de cette spirale du dossier scolaire qui plombe tout. Le privé, c’est une alternative à ce système, une façon de prendre un autre chemin».
«Les parents sont prêts à payer»
Bien sûr, ces témoignages ne permettent pas de tirer de conclusions générales : il est trop tôt pour mesurer un éventuel effet Parcoursup, les inscriptions se déroulent en ce moment. Mais l’anxiété générée par le système d’affectation, déjà palpable du temps d’APB, est un boulevard pour le business des formations privées… qui se portait déjà très bien.
Le marché prospère depuis vingt ans. Les effectifs du privé dans l’enseignement supérieur ont doublé entre 2001 et 2015. Aujourd’hui, 18,2 % des étudiants suivent un cursus dans le privé, soit 475 000 étudiants, selon les derniers chiffres de 2016-2017. 30 % sont inscrits dans des écoles de commerce (avec une énorme progression de 85 % entre 2001 et 2015), 20 % préparent un BTS dans des instituts privés, 14 % dans les formations paramédicales, 11 % en écoles d’ingénieurs, 7 % dans les facs cathos et 6 % dans les écoles artistiques ou culturelles. Surtout, les effectifs progressent plus vite que dans le public. Ainsi, entre 1998 et 2016, les inscriptions dans le privé ont augmenté de 87,9 % (222 000 élèves en plus), contre 13,9 % dans le public (261 000).
Comment expliquer ce phénomène ? Les mentalités ont évolué. «De plus en plus d’élèves préfèrent jouer la carte d’une formation privée professionnalisante. C’est perçu comme la sécurité et donc les parents sont prêts à payer. La fac est souvent jugée risquée car ne préparant pas à un métier précis», assure Camille Fromaget, fondateur de Study advisor, une start-up mettant en relation des lycéens avec des étudiants pour les conseiller en orientation.
«L’Etat ne peut pas tout faire»
Martine Depas, qui conseille les investisseurs s’intéressant au marché de l’éducation pour le cabinet la Financière de Courcelles, le constate aussi : «Les mœurs ont changé. Ces écoles se cachent moins qu’avant, elles assument beaucoup plus, elles font de la pub ouvertement à présent. Certainement aussi parce que l’Etat se rend compte qu’il ne peut pas tout faire.» Et donc choisit de laisser faire. Le nombre de places créées dans les universités, BTS et classes prépa ne suit pas la hausse démographique. Certes, le gouvernement a mis le paquet, après plusieurs années de disette, en finançant 21 000 nouvelles places dans les filières les plus demandées. Mais cela ne suffit pas à absorber la hausse des effectifs : plus de 30 000 élèves supplémentaires déboulent à chaque rentrée aux portes du supérieur à cause du baby-boom des années 2000. D’ailleurs, la Conférence des grandes écoles (CGE), qui représente 240 établissements, se vante, sur son site internet, d’être un «partenaire indispensable de l’Etat», qui n’aurait plus les moyens de s’en passer… Sans l’assumer. «Notre pays est toujours englué dans le clivage public-privé», déplore Alice Guilhon de la CGE qui regrette qu’on mette dans le même panier les grandes écoles et «les autres, ces structures qui s’ouvrent à tout va pour faire du business». Combien sont-elles ? Difficile à dire. Elles seraient 1 500 à la louche, avec une tendance à la hausse, mais ce n’est qu’une estimation, aucune autorité publique ne tient de recensement précis. Car en France, l’enseignement supérieur est libre. N’importe qui peut ouvrir une école et proposer une formation, à quelques conditions minimales près (casier judiciaire vierge par exemple). En revanche, l’Etat a le monopole de la «collation des grades». En langage clair : seuls les établissements publics peuvent délivrer des diplômes nationaux : «baccalauréat», «licence», «doctorat». Mais les écoles privées peuvent obtenir que leurs diplômes soient reconnus par l’Etat.
«Bachelor» ou «mastaire»
Qui décide et comment ? Libération a cherché à comprendre : prise de tête assurée. En fait, derrière l’étiquette «reconnu par l’Etat», on trouve une myriade de labels dont certains, contrairement à ce qu’on pourrait penser, n’apportent que très peu de garanties. Et un même établissement peut avoir une partie de ses diplômes reconnus par l’Etat et les autres non.
Dans les diplômes adoubés, se rangent les «diplômes visés» ou ceux «conférant le grade de master». Il y a aussi les titres RNCP (répertoire national des certifications professionnelles), niveau I, II, III… Des appellations officielles entre lesquelles viennent se faufiler d’autres aux apparences sérieuses mais qui ne recouvrent aucun contrôle de l’Etat : «bachelor», mot emprunté au vocabulaire anglo-saxon, «mastère» (avec un e) ou encore «mastaire». Un fouillis sans nom, et nid à la publicité mensongère.
Les universités le savent. «Chacun dans nos spécialités, on regarde de près les écoles qui se créent. Elles leurrent parfois les étudiants en leur faisant croire qu’ils auront des passerelles à la fac, mais il est hors de question pour nous de prendre en master des élèves venant d’écoles qui n’ont aucune garantie. Ce serait cautionner», explique une enseignante-chercheure en sciences de gestion à Caen.
En fait, il existe deux systèmes de reconnaissance parallèles : l’un sous l’égide du ministère de l’Enseignement supérieur et l’autre sous la tutelle du ministère du Travail. Le premier évalue la qualité pédagogique des formations, l’autre mesure les chances de trouver un emploi à la sortie. Les deux systèmes coexistent, sont censés être complémentaires, mais entretiennent un épais brouillard. D’autant qu’il est possible aux écoles qui obtiennent la reconnaissance du ministère du Travail de louer leur label à d’autres écoles qui ne l’ont pas…
De part et d’autre, les commissions qui examinent les dossiers sont complètement débordées face à l’afflux de demandes. Le problème n’a rien de nouveau, il est identifié depuis un paquet d’années par les autorités. En 2012, la médiatrice de l’Education nationale tirait la sonnette d’alarme, après de nombreuses réclamations des familles. 2014 : l’équipe de François Hollande crée un nouveau label, venant s’ajouter au millefeuille. C’est la naissance des Eespig (établissement d’enseignement supérieur privé d’intérêt général), à mi-chemin entre public et privé.
«Publicité trompeuse»
L’ancienne majorité avait par ailleurs commencé à plancher sur un guide à distribuer à l’entrée des salons étudiants, avec un système de mariannes en couleurs pour s’y retrouver dans la jungle des labels. Le projet a été abandonné. Trop difficile de faire quelque chose de clair… et pas simple à porter politiquement. «Alors que la montée en puissance de l’enseignement supérieur privé pose naturellement des questions sur l’évolution des rapports entre la sphère publique et la sphère privée, le sujet reste relativement tabou en France», pioche-t-on dans un rapport de l’Inspection générale, de juin 2015. Commandé par le ministère de l’époque, ce rapport visait à dresser un état des lieux précis pour procéder ensuite à un grand ménage. L’ancienne équipe s’est arrêtée à l’étape du rapport. Les conclusions sont pourtant édifiantes. Tout y est : «Les commissions [manquent de moyens pour] assumer le flux croissant des demandes qui leur sont adressées ; […] la multiplication des labels entraîne des confusions, voire facilite la publicité trompeuse.» Ce rapport reste d’une parfaite actualité. L’actuel ministère de l’Enseignement supérieur loue d’ailleurs ce «constat très clair.» Et donc ? Une des pistes envisagées serait de reconnaître certains établissements historiques, et non plus seulement les diplômes. Cela ne ferait qu’élaguer la forêt…
Marie Piquemal
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Post-bac, les pièges des écoles privées
Face aux incertitudes engendrées par Parcoursup, de nombreux bacheliers se détournent des formations publiques pour poursuivre leurs études. Mais les promesses de certaines écoles sont parfois ...
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je rejoins demain comme chaque été depuis plus de 45 ans maintenant la maison familiale pyrénéenne.
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Cet été sera pour moi un très agréable moment d'écriture...
"Vous ne pouvez pas attendre de la vie d'avoir un sens. Vous devez lui en donner un."
Romain Gary
A samedi donc pour la suite du voyage...
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Education civique : nouveaux programmes, vieille morale...
Des changements dans les cours d’Enseignement moral et civique doivent être annoncés ce jeudi. Réorganisée autour de la discipline et du respect des codes sociaux, cette matière risque d’oublier de former des citoyens actifs, estime l’un des auteurs des programmes actuels.
L’enseignement moral et civique (EMC) existe, sous cette appellation, depuis la loi de refondation de l’école de 2013. C’était un projet à maints égards nouveau, au moins sur deux points : il couvre la totalité de la scolarité, du CP aux classes terminales des lycées (y compris le lycée professionnel) et il ne se réduit pas à la seule éducation civique, puisqu’il introduit, dans son intitulé même, une dimension morale explicite.
Les programmes de 2015 se sont efforcés d’être à la hauteur de cette nouveauté, en refusant de faire d’un tel enseignement une resucée des leçons de morale et d’instruction civique d’antan - ce dont d’ailleurs les enseignants ne voulaient guère. Ces programmes insistaient (puisqu’il faut en parler au passé) sur la nécessité de s’appuyer sur des dispositifs pédagogiques propices à l’acquisition d’une culture morale et civique réfléchie, argumentée, critique plus que dogmatique : propices, en un mot, à une culture morale et civique pouvant faire sens pour les élèves et aussi pour les enseignants qui ne regardaient pas forcément d’un bon œil l’idée même de réintroduire la morale à l’école.
Il serait aberrant d’affirmer que ces programmes étaient parfaits. Mais il faut s’interroger sur les changements qu’apporte la réécriture actuelle, et dont certains éléments sont annoncés ce jeudi par le Conseil supérieur de l’éducation, parmi plusieurs «ajustements» dans les programmes scolaires. La nouvelle vision conserve comme des vestiges certains éléments des programmes d’EMC de 2015. Mais elle leur tourne le dos et s’inscrit dans un discours général de la restauration à la fois préoccupant et probablement inopérant : apprentissage de la Marseillaise (déjà voulu, avec le succès que l’on sait, par Chevènement en 1985), retour de la dictée quotidienne, de la grammaire scolaire traditionnelle, retour à l’idée d’une progression par année - ce qui vide l’idée de cycle d’une grande partie de son sens, dénonciation idéologique des prétendus «idéologues» qui auraient sévi jusqu’alors (antienne indémodable depuis environ cinquante ans), idéal d’un retour à l’ordre et à la discipline, à l’apprentissage des règles de conduite (langage, décence vestimentaire, hygiène), symbolisé dans le nouveau projet d’EMC par le recours insistant au thème du respect (le mot revient si souvent qu’il serait fastidieux d’en compter les occurrences) : on est loin des enjeux d’une culture morale et civique qui apprenne aux jeunes à construire ensemble un mode commun qui ne peut plus être présenté comme un donné préexistant et indiscutable. La faiblesse pédagogique du nouveau texte est à cet égard éloquente. Un enseignement moral et civique se doit - comme tout enseignement - de rendre cohérents entre eux finalités, contenus et méthodes. Or, de celles-ci, des dispositifs mis en avant par le programme de 2015, il ne reste rien ou presque (une ou deux références au «débat réglé» et, plus modestement, à «l’éthique de la discussion»). Rien des discussions à visée philosophiques pour le primaire, de l’examen de dilemmes moraux, du recours possible aux jeux de rôle, des exemples suggérés dans le programme de 2015 de situations pédagogiques utiles à la mise en œuvre des objectifs d’un tel enseignement. Rien, en somme, des implications pédagogiques que comporte la volonté de former des citoyens actifs et, comme le disait si éloquemment le philosophe Alain, «incommodes».
La référence explicite à la liberté pédagogique des enseignants est à cet égard significative. Elle laisse la porte ouverte aux formes les plus surannées d’éducation morale et fait de ce programme un vœu pieux. Prenez-y vous comme vous voulez, dit-il en somme aux enseignants, pourvu que vous fassiez de vos élèves des individus et des citoyens respectueux des lois et des codes sociaux.
Le retour affiché et démagogique au «bon sens» ne doit pas tromper. Le nouveau projet d’enseignement moral et civique n’est pas à la hauteur des enjeux moraux et civiques d’une République non épargnée, tant s’en faut, par les querelles concernant les valeurs. Il renonce à l’ambition d’affronter les défis éthiques et civiques d’un tel pluralisme et de faire comprendre que des hommes et des femmes qui ont la liberté de ne pas se ressembler doivent pouvoir trouver dans leur confrontation même des raisons et des moyens de se rassembler.
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Education civique : nouveaux programmes, vieille morale
Des changements dans les cours d'Enseignement moral et civique doivent être annoncés ce jeudi. Réorganisée autour de la discipline et du respect des codes sociaux, cette matière risque d'oubli...
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