La loi modifiant les conditions d’accès à l’université a été votée par le Parlement jeudi 15 février. Dans les lycées et les universités, c’est la course – la précipitation diront certains – pour mettre en place cette réforme d’ampleur… Les règles du jeu pour aller à la fac changent dès cette année, et beaucoup de points restent obscurs.

Elèves de terminale, étudiants en réorientation, profs principaux de lycée, conseillers d’orientation, parents mais aussi enseignants chercheurs et équipes administratives dans les universités, tous se retrouvent en première ligne. Libération a décidé de leur donner la parole de façon régulière. Pour que chacun raconte, avec ses mots et son ressenti, cette réforme vécue de l’intérieur.

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Aujourd’hui, Catherine Sindicas, conseillère d’orientation 

Le titre des conseillers d’orientation a changé, on doit désormais dire : psychologue de l’éducation nationale spécialité éducation, développement et conseil en orientation scolaire et professionnelle. Catherine Sindicas travaille depuis vingt ans au CIO (centre d’information et d’orientation) de Clamart, dans les Hauts-de-Seine.

«On commence enfin à y voir plus clair. Les informations nous sont parvenues au compte-gouttes jusqu’à fin janvier. On a même dû retarder les séances d’informations aux familles car jusque-là nous n’avions pas suffisamment d’éléments pour les renseigner. Et puis, il y a des cafouillages. Par exemple, le rectorat nous avait expliqué que pour les licences Staps et psycho, les élèves d’Ile-de-France pouvaient postuler dans n’importe quelle université de la région, la sectorisation n’étant plus le périmètre de l’académie mais de la région académique. Sauf qu’en ouvrant Parcoursup, surprise : les informations indiquaient l’inverse. On a fait remonter le problème, c’était un mauvais paramétrage de Parcoursup par les universités… L’erreur n’a été modifiée que la semaine dernière sur la plateforme.

«Il reste cette question à laquelle je n’arrive pas à avoir de réponse, elle est pourtant centrale : que va-t-il se passer dans les licences les plus demandées quand le nombre de places sera atteint ? Comment cela va finir pour les élèves sur la liste d’attente ? Le ministère a assuré qu’il n’y aura pas de sélection, mais comment les choses vont se passer concrètement ?

«Je conseille aux élèves de formuler leurs vœux en fonction de leurs envies, mais en élargissant au maximum les choix d’universités pour une même licence. Pour l’instant, je ne vois pas bien l’amélioration par rapport à l’ancien système APB, sauf sur un point : ils ne sont plus obligés de hiérarchiser leurs vœux, et cela enlève un vrai stress. Pour le reste, évidemment le tirage au sort n’était pas une bonne solution, mais c’était une pratique à la marge, et il suffisait d’ouvrir plus de places dans les licences concernées. Ce que je déplore aussi, c’est la façon dont nous, ex-conseillers d’orientation [il faut désormais dire psychologue de l’éducation nationale, spécialiste du conseil en orientation, ndlr], sommes mis totalement de côté dans cette réforme. Le ministère a transféré le cœur de notre métier aux professeurs principaux alors qu’ils ne sont pas formés pour… Que devient-on ? On disparaît ?»

Marie Piquemal