Le ministre est en Une de Libération et est rhabillé pour l’hiver. Après quelques informations diverses, on parlera un peu du supérieur. On terminera avec l’apprentissage car cela chauffe entre le gouvernement et les régions.
Bulldozer
C’est la Une de Libération aujourd’hui « Blanquer bulldozer ». Cela commence par un éditorial de Laurent Joffrin dont le titre est assez évocateur : Sinuosité. « Il sait à merveille séduire les acteurs du secteur, caresser les parents quand il le faut, les profs si nécessaire, désarmer la gauche enseignante et galvaniser en même temps la réacosphère éducative. Plaire à Dubet autant qu’à Finkielkraut. Chauve-souris gouvernante, il dédouble les petites classes : je suis oiseau progressiste, voyez mes ailes ! Il parle uniformes, interdiction des portables, rétablissement du latin : je suis souris conservatrice, vive les rats ! Où cette marche impérieuse autant que sinueuse nous mène-t-elle ? »
Mais il est la coqueluche de l’assemblée : « Quand certains ministres vivent comme une souffrance les questions au gouvernement, lui est de ceux qui se baladent lors des séances des mardis et mercredis. Plusieurs fois, Jean-Michel Blanquer s’est même payé le luxe d’une ovation à l’Assemblée, y compris sur des bancs de l’opposition. »
Il plait à tous cependant « [Les profs] pourraient cependant (de même que les lycéens) se réveiller et se mobiliser sur l’un des projets à haut risque du ministre : réformer cette institution nationale qu’est le bac [...]. Jusque-là, aucun ministre n’y est parvenu. C’est dire si la côte à grimper s’annonce rude. C’est là que le bulldozer Blanquer pourrait caler. Ou non. »
C’est un ministre avec deux discours et quatre visages. On le qualifie de surgé des profs. « C’est toute l’ambivalence de Jean-Michel Blanquer. Le ministre se dit favorable à l’autonomie, à plus de « souplesse dans le système », mais dans le même temps il entend mieux encadrer les professeurs dans leurs pratiques. « La liberté pédagogique, ce n’est pas l’anarchisme pédagogique » : c’était le 5 décembre, rue de Grenelle. »
Pour Philippe Meirieu « Progressivement, on voit se profiler son projet : le caporalisme dans le primaire et le libéralisme dans le secondaire. Une école primaire très encadrée où l’on enseigne les "bons contenus" avec les "bonnes méthodes" pour garantir une sorte de "socle identitaire", et l’autonomie des établissements ensuite, avec la concurrence instituée entre les élèves et entre les établissements. Je crains que ces deux perspectives ne soient des impasses : l’école primaire a autant besoin d’inventivité pour créer du commun entre les élèves que l’enseignement secondaire a besoin de promouvoir la solidarité dans une société déchirée. »
François Dubet, quant à lui, est séduit par le ministre. « Des réformes qui changent la nature du système, il n’y en a pas eu souvent dans l’histoire. Je pense qu’il en est capable, d’autant que, à la différence de ses prédécesseurs, il a de toute évidence le soutien total de l’Elysée. Cela étant dit, on ne sait jamais comment les choses peuvent tourner. Certes, les syndicats enseignants paraissent un peu paralysés. Mais il y a toujours un risque d’un mouvement massif des lycéens et des étudiants, et celui-ci peut s’enflammer à tout moment. »
Moins polémique, un dialogue dans Sciences humaines entre le ministre et Edgar Morin. Comment changer l’école ?
« Quelle école voulons-nous ? Comment l’adapter aux défis d’aujourd’hui ? Et par quels leviers conduire le changement dans une institution souvent perçue comme sclérosée ? Ces questions de fond méritent un débat renouvelé, collectif. Car depuis Jules Ferry, tout a changé : les individus, la société, l’économie, les voies d’accès au savoir. »
Divers
L’école catholique veut raviver la « communauté éducative » par Denis Peiron. “L’enseignement catholique veut inscrire davantage dans le quotidien de ses établissements cette notion formulée il y a 50 ans par l’Association de parents d’élèves de l’enseignement libre (Apel), et reprise depuis par l’école publique.”
Des enseignants inquiets des évaluations
“"On mène une vie professionnelle intolérable. On nous montre du doigt. On met les établissements en concurrence". Ce cri de colère, poussé par une enseignante du lycée Voltaire de Paris à propos des effets des indicateurs des lycées, résume le colloque sur l’évaluation organisé par le Snes le 19 décembre. Fabienne Rosenwald directrice de la Depp et Nathalie Mons, présidente du Cnesco, ont répondu aux questions des enseignants à un moment où ils sentent poindre de nouveaux usages des évaluations dans l’éducation nationale.”
Haute-Loire : l’Education Nationale propose des jardins d’enfants pour soulager les classes uniques. « Dans les plus petites communes de Haute-Loire, il ne subsiste souvent qu’une école à classe unique. Difficile pour les enseignants d’y faire la classe de la maternelle au CM2 pour des enfants de 2 à 11 ans. L’inspection académique propose aux maires de créer des jardins d’enfants. »
Supérieur
Orientation et réussite des étudiants : le projet de loi adopté par les députés
“Après un court examen parlementaire, sans grande saveur, les députés ont adopté le projet de loi modifiant les conditions d’entrée à l’université, mardi 19 décembre 2017. Retour sur les principales modifications apportées sur ce texte par l’Assemblée nationale, avant son examen en séance publique au Sénat, en février 2018.”
Etudes supérieures en France : une attractivité confirmée
“Campus France vient de dévoiler les résultats d’une enquête réalisée avec l’institut Kantar Public auprès de 14.245 étudiants étrangers entre juillet et octobre 2017.
Ce baromètre, troisième d’une série initiée en 2011, s’attache à comprendre les atouts et les principaux points d’insatisfaction dont dispose la France comme destination d’études, ainsi que le rôle joué par la langue française dans son attractivité auprès des étudiants étrangers.”
Apprentissage
Apprentissage : les régions suspendent leurs investissements
“La tension monte entre le gouvernement et les régions, qui ont bien l’intention de se battre jusqu’au bout pour conserver leurs prérogatives en matière d’apprentissage et, surtout, le 1,6 milliard d’euros de financements qui va avec. Elles ont décidé de suspendre toute nouvelle décision d’investissement en matière d’apprentissage « compte tenu de l’incertitude sur leurs compétences » dans le cadre de la réforme à venir, a plaidé mercredi l’Association des régions de France. Et l’ARF d’appeler le gouvernement « à la raison ». Du côté du ministère du Travail, c’est silence radio. Et pour cause. Lancée mi-novembre, la concertation avec les partenaires sociaux, les régions et les chambres consulaires sur ce dossier sensible n’est pas bouclée. En outre, le sujet est également sur la table dans le cadre de la négociation entre les partenaires sociaux sur la formation professionnelle.”
Apprentissage : les régions menacent de quitter la concertation
“Remonté contre la perspective que les branches professionnelles prennent le leadership sur l’apprentissage, les régions critiquent le double langage du gouvernement.”
Apprentissage : « Nous ne serons pas le cornichon sur l’assiette de charcuterie »
“Alors que le gouvernement envisage de confier l’apprentissage aux branches professionnelles, les régions se rebiffent et dénoncent « une privatisation ».”
Géraldine Duboz