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Vivement l'Ecole!

Sortir... Exposition "Urgence climatique" - Cité des sciences et de l'industrie

20 Mai 2023 , Rédigé par TV5 Monde - Libération Publié dans #Environement, #Education

«Urgence climatique» : à la Cité des sciences, une expo pop pour éveiller les consciences

Sur un ton convivial et décalé, une exposition permanente inédite s’ouvre à Paris dans le but de vulgariser les enjeux induits par le réchauffement climatique et de donner des clés pour agir, en prenant soin de ne pas attiser l’écoanxiété.

«Commençons par poser les faits : les activités humaines génèrent du CO2 et une concentration importante de CO2 provoque un dérèglement climatique à l’échelle de la planète. Ce n’est pas une opinion, il y a un consensus scientifique sur la question.» Sur une large fresque rouge à l’entrée de la nouvelle exposition permanente de la Cité des sciences et de l’industrie à Paris, ces premiers mots donnent le ton. Tout comme son titre : «Urgence climatique». «Nous ne cherchons pas à convaincre de l’existence du changement climatique, nous sommes au-delà de ça, dans la lutte», insiste Adrien Stalter, muséographe et commissaire de l’expo. La visite, possible à partir de 15 ans en autonomie (les enfants plus jeunes doivent être accompagnés) depuis mardi 16 mai pour une durée de dix ans, est une première du genre en France.

L’objectif est ambitieux : proposer une approche globale permettant de comprendre les mécanismes régissant les émissions de gaz à effet de serre, leurs conséquences sur notre société. Et surtout, les actions possibles à l’échelle individuelle et collective afin de respecter l’accord de Paris qui engage les pays signataires à ne pas dépasser de 2 voire 1,5° C le réchauffement climatique via notamment la neutralité carbone à l’horizon 2050. Pour y arriver, l’équipe muséographique a pu compter sur un comité scientifique de prestige composé d’une douzaine de chercheurs, de Jean-Baptiste Fressoz, à Valérie Masson-Delmotte, en passant par Agathe Euzen, François Gemenne ou encore Magalie Reghezza-Zitt. Le tout, sous l’égide du paléoclimatologue Jean Jouzel, commissaire scientifique de l’exposition.

Longs bidons couleur flashy

Devant nous, trois parcours en accès libre s’articulent autour d’une table d’orientation : «Décarbonons», «Anticipons», «Agissons». Le visiteur est appelé à plonger sous une charpente de bois (issu de forêts du Massif central) accueillant de multiples modules et sculptures colorés qui illustrent de manière ludique les données issues des sources scientifiques les plus récentes et légitimes (rapports du Giec, de l’ONU, du Citepa, de l’Ademe). De longs bidons couleur flashy, atteignant pour certains plusieurs mètres de haut, représentent l’empreinte carbone de Paris (par ailleurs partenaire de l’exposition). On apprend que les émissions indirectes (celles émises en dehors de la ville mais nécessaires à son activité) comme le trafic aérien international, l’alimentation ou encore l’énergie, plombent le bilan carbone de la capitale et sont beaucoup plus élevées que les émissions directes (liées aux activités intra-muros) produites par les secteurs du logement, du recyclage ou de l’industrie.

Juste à côté, des pyramides de cordes épaisses font état du bilan carbone des aliments. Sans surprise, la viande, couleur rouge sang, dépasse de loin les autres monticules, tandis que les pommes de terre font office de bonnes élèves (27,84 kg de CO2 pour 1 kg de bœuf contre 0,37 kg de CO2 pour 1 kg de patates). Assis autour d’une table interactive, Mathilde et Quentin, élèves de terminale spécialité SVT à Colmar en sortie scolaire, s’étonnent du bilan carbone de leur assiette. «J’ai pris le steak de bœuf avec les petits pois et ça consomme presque quatre fois plus de CO2 que le poisson de Quentin. Je pensais pas que c’était autant», s’exclame la jeune fille. «Est-ce que dans le futur on sera obligés d’être tous végétariens ?» se demande Yasser, 12 ans. «C’est vrai qu’on se rend compte que quasi toutes nos activités polluent», lui répond son copain Imanol, 10 ans, en fronçant les sourcils.

«La sobriété ne nous fera pas retourner à la lampe à huile»

Un mot revient systématiquement : sobriété. «C’est la clé pour décarboner nos sociétés, souligne Adrien Stalter, en déambulant dans la section “Energie”. On détricote quelques idées reçues sur la transition énergétique, car on assiste en réalité à une addition énergétique. Bois, charbon, pétrole, nucléaire, énergie renouvelable, tout s’empile et notre mix énergétique devient de plus en plus gourmand.» Propositions pour décarboner les villes, décryptage sur les voitures électriques et le moteur hydrogène, immersion dans la forêt de Barbeau (Seine-et-Marne) pour comprendre son rôle de puits de carbone, projection de la montée des eaux et des températures à l’échelle mondiale, analyse des mouvements de désobéissance civile… «Sculptures de données», modules interactifs et vidéos mettant en scène des scientifiques experts dans leur domaine sont ainsi savamment agencés sur 2000 m². Un bémol, la biodiversité, souvent parent pauvre des politiques climatiques, a encore une fois été mise de côté.

Captivés par une vidéo sur la sécheresse en Afrique, Véronique et Gildas, 49 ans et 50 ans, conseillère bancaire et commercial dans le secteur du carton, se disent qu’ils feraient bien de faire plus attention à leur consommation d’eau. «Ils sont pratiquement à sec dans certaines régions d’Afrique. En France ça commence, là-bas c’est dramatique. Si on veut éviter de subir ce qu’ils subissent, y a du boulot !» glisse la Bretonne. Si l’exposition mentionne les phénomènes climatiques extrêmes, elle ne met pas l’accent sur les incendies, inondations, cyclones dévastateurs et autres conséquences désastreuses du changement climatique. «On a décidé d’adopter un ton très chaleureux, convivial, pop, qui va à l’encontre de l’éco-anxiétéassume le commissaire d’exposition. Parfois quand on est très angoissé on fait preuve de déni, on ferme les yeux. Le but est aussi de montrer qu’on connaît les solutions au problème. Ce qu’il manque aujourd’hui, c’est une envie de les mettre en application.»

D’après lui, chacun peut s’interroger sur l’intérêt de prendre plusieurs fois l’avion par an pour partir en vacances à l’autre bout du monde mais pas question d’un voyage vers le passé. «La sobriété ne nous fera pas retourner à la lampe à huile ou à une vie d’Amish, comme a pu le dire M. Macron. Elle peut être heureuse», continue-t-il. L’exposition ne vise pas à culpabiliser le citoyen, ce dernier n’étant responsable «que» de 25 % des émissions de gaz à effet de serre. «Les 75 % restants sont liés à l’activité économique, aux décisions politiques et surtout à l’industrie et au néolibéralisme, système extractiviste, productiviste qui nous interroge sur notre rapport à la planète et à son habitabilité», pointe Adrien Stalter, sous les yeux de Jean Jouzel, qui opine du chef. Le projet n’a pas bénéficié de partenariats privés afin d’éviter que de grands groupes l’utilisent «pour se greenwasher», insiste-t-il. «On a, y compris en France, un fossé entre les ambitions affichées dans la loi et la réalité, abonde Jean Jouzel. A l’échelle planétaire nous allons vers un réchauffement de 3° C dans la deuxième partie de ce siècle. On n’est pas dans les clous. Il faut agir, maintenant ! C’est le sens profond de cette exposition.»

«Urgence climatique» exposition permanente à la Cité des sciences et de l’industrie (75019). Plein tarif 13€, tarif réduit 10 €. Rens. : Cite-sciences.fr

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