Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Vivement l'Ecole!

Sur les traces de Monique Hervo, à la source d'une histoire algérienne de France

27 Mars 2023 , Rédigé par France Culture Publié dans #Histoire

Monique Hervo au bidonville «la Folie» dans les années 60. (La Contemporaine)/Via Libération

EXTRAITS

Monique Hervo avait consigné la mémoire des bidonvilles algériens, avant de prendre la nationalité algérienne. On a appris sa mort le 20 mars.

A la date du 16 juillet 1961, une Française de trente-et-un ans née dans une famille de petits commerçants pas vraiment militants avait inscrit dans son "Journal" des phrases comme : "La journée de dimanche fut très particulière : attente, angoisse, calme de surface.“ Evoquant les harkis qui s'étaient installés dans les allées du bidonville de Nanterre, cette jeune femme qui venait de dédier sa vie à la cause de l'indépendance algérienne mais que personne encore ne connaissait, poursuivait encore : "On les rencontrait à tous les coins, à tous les détours des baraques. Pas l'animation habituelle du dimanche. Allée des célibataires : pratiquement désertes. Ailleurs, aussi, chez les familles, on n'entendait pas les postes arabes qu'on entend d'habitude de partout". Un feu couvait ce dimanche de juillet, qui se révèlera meurtrier, quelques semaines plus tard, lorsque des Algériens seront jetés à la Seine, le 17 octobre 1961. Cette date sera la plus traumatique de la Guerre d'Algérie sur le sol de métropole, et pourtant elle restera, des décennies durant, l'ornière d'une mémoire enfouie, d'une histoire taboue, et l'évidence muette de responsabilités dérobées.

Parcourir le "Journal" que tenait, les semaines précédentes, cette jeune femme qui s'appelait Monique Hervo, c'est remonter le film et mieux comprendre la séquence. C'est prendre la mesure du sort que la France faisait à ces Algériens qui le 17 octobre 1961, avaient défié la police en manifestant pacifiquement à Paris contre le couvre-feu qu'on venait de leur imposer. Un grand nombre d'entre eux étaient partis du bidonville de Nanterre, où ils vivaient par milliers, pour rejoindre l'Opéra, les "grands boulevards", et ce Paris qui au fond n'était pas le leur. Le lendemain, à la date du 18 octobre, Monique Hervo, la jeune femme, écrivait dans son "Journal" : "Sorties de l’hôpital de Nanterre – Aux lendemains de la manifestation les blessés par balle, à la sortie de l’hôpital, voient donner leur bulletin de sortie directement remis à la police qui « cueille » le blessé et l’emmène, croit-on savoir, pour trois ou quatre jours à Vincennes. D’ailleurs dans tous les hôpitaux, la police consulte la liste des arrivées et sorties des Algériens. C’est classique. C’est d’ailleurs pour cette raison que la majorité n’ira pas se faire soigner à l’extérieur, même dans un dispensaire, de peur de se faire arrêter. A la Folie, dans toutes les baraques des célibataires, il y a des blessés, même gravement atteints, des fractures." Le texte se poursuit, il comble un manque.

(...)

A présent que Monique Hervo est morte, c’est finalement à une kyrielle de rapports de force qui s’emboîtent et parfois se réverbèrent, qu’on a ainsi accès en la découvrant à travers ses livres ou ses archives. Et parce que La Fabrique de l’histoire avait plongé dans les cartons de l’IHTP, couru faire des copies des bandes si précieuses qui venaient d’y être déposées, des extraits de ces archives sonores sont désormais accessibles en ligne, et s’entremêlent aux archives de la radio publique. Vous pouvez accéder aux deux émissions tirées d’un long entretien avec Monique Hervo, ainsi qu’à une partie des entretiens qu’elle-même avait menés parmi ces voisins, en découvrant ces deux épisodes de la Fabrique de l’histoire, qui n’ont pas pris une ride. De source, elle était devenue actrice de cette histoire.

Lire en intégralité en cliquant ci-dessous

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :